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Quelle politique par rapport au PCF ?

Ni rire ni pleurer, mais comprendre la situation et saisir les opportunités

mardi 1er février 2000

La participation du PCF au gouvernement, la mutation proposée par la direction, les interrogations, les inquiétudes et les mécontentements surgis parmi les militants ont rendu plus actuelle que jamais la question de l’attitude et de la politique que devraient avoir les communistes révolutionnaires vis-à-vis de ce parti.

Sur ce sujet, la tendance Révolution ! de la LCR et la fraction L’Etincelle de LO partagent bien des analyses mais ont également certaines divergences. Convergences Révolutionnaires étant aussi un cadre de discussion entre nous, les deux articles ont pour but d’entamer le débat.


L’avenir possible du PCF ne devrait guère faire débat parmi nous. Tout au plus, peut-être, en ce qui concerne les rythmes de cette évolution prévisible, inscrite dans la ligne de son évolution passée et à laquelle ouvertement et consciemment pousse sa direction actuelle. Si ce n’est pas une intégration dans le PS (ne reparle-t-on pas d’un « congrès de Tours à l’envers » ?) qui attend un PCF enfin complètement débarrassé de l’odeur de soufre qu’il a longtemps gardé de ses origines diaboliques, bolcheviques, ouvrières, communistes, c’est au moins celle parmi les partis de l’establishment.

Un pas de plus

Ces vingt dernières années il a fait de grands pas dans cette direction. Les événements l’ont aidé : certains auxquels il a contribué comme le retour de la gauche au gouvernement qui lui a donné l’occasion de faire la preuve de son dévouement aux intérêts de la bourgeoisie française ; d’autres dans lesquels il n’était pour rien comme la fin de l’URSS ; d’autres enfin qu’il ne souhaitait certainement pas comme son déclin électoral et militant même si c’est bien sa propre politique qui en est responsable.

Dans ce processus il a perdu une bonne part des liens particuliers qu’il avait avec la classe ouvrière et le monde du travail. Une bonne part, pas tous. Il est bien erroné de considérer que ce processus largement entamé serait arrivé à son terme, et que de ce point de vue le PCF serait déjà aujourd’hui au point où en est arrivé le PS il y a déjà longtemps. Nombre de ses militants ouvriers l’ont quitté, ceux qui restent sont souvent moins actifs politiquement qu’ils ne l’étaient. Mais il lui en reste encore bien plus qu’à tout autre formation politique, dont certains qui ne demanderaient qu’à se réactiver et qui le font d’ailleurs quand leur parti leur en fournit, de plus en plus rarement, l’occasion. Bien sûr, l’hémorragie ne peut que se poursuivre avec la poursuite de la politique actuelle.

Aucune raison de se réjouir

Une autre erreur grave est de se réjouir de cette hémorragie, ou de considérer qu’elle est a priori positive pour l’extrême gauche. Pour se convaincre du contraire il suffit de jeter un coup d’œil hors des frontières de l’hexagone. Dans beaucoup de pays l’évolution des PC staliniens a été plus loin et plus vite mais dans la même direction que celle du PCF. Partout ils ont perdu de leur importance, de leur influence et de leurs militants, parfois jusqu’à quasiment disparaître. Nulle part cela s’est produit au bénéfice des courants communistes révolutionnaires.

Les ex-militants ont abandonné la politique ou ont rejoint des formations plus à droite, les anciens électeurs se sont perdus dans l’abstention ou ont reporté leur voix sur les sociaux-démocrates (ou pire) et les syndicalistes qui ont rompu la « courroie de transmission » ont adopté des attitudes encore plus collaborationnistes avec les patrons ou le personnel politique bourgeois. Que tous ceux-là aient pris leurs distances ou leur indépendance du stalinisme, la belle affaire vraiment pour le mouvement communiste révolutionnaire ou le mouvement ouvrier !

Cette évolution n’était sans doute pas inévitable. Mais pour qu’elle ait pris une autre direction il aurait fallu que les révolutionnaires ne croient pas que l’effondrement des PC staliniens était un progrès en soi. Il aurait fallu qu’ils aient au moment opportun une politique vis-à-vis de ces PC et de leurs militants.

Certes pendant longtemps et dans de nombreux pays, c’était difficile, voire impossible, à cause de la faiblesse des révolutionnaires. Mais justement aujourd’hui, en France, le rapport des forces a changé. Les récentes élections ou les manifestations de cet automne l’ont démontré. Alors s’il est un moment où l’extrême gauche, et notamment LO et la LCR, devrait développer une politique envers le PCF c’est bien aujourd’hui : quand sa direction prétend encore défendre les intérêts des travailleurs, même si c’est contredit par toute sa politique ; quand une partie de ses militants se sent encore communiste ; et quand l’extrême gauche ne peut plus être jugée par eux comme quantité négligeable.

Pour une politique explicite

Nous ne convaincrons pas les militants du PCF, ou au moins une partie d’entre eux, de nous rejoindre dans les luttes (et a fortiori un jour dans la construction d’un véritable parti communiste) si nous ne les convainquons que nous ne sommes pas des ennemis, que nos buts sont les leurs.

Nous ne le ferons certainement pas en abandonnant les objectifs qu’il nous semble indispensable de proposer au mouvement ouvrier tout entier, ceux du plan d’urgence. Nous ne le ferons certainement pas en atténuant ou taisant nos critiques de la politique du PCF, ses reniements, ses dérives et ses trahisons passées et présentes. Mais nous ne le ferons pas non plus sans lui proposer de combattre en commun.

Dans les mois qui viennent, alors que se poursuit l’offensive de la bourgeoisie aidée par le gouvernement, ce ne sont pas les occasions qui vont manquer aux militants révolutionnaires de proposer à ceux du PCF de se concerter pour voir comment préparer les ripostes : contre les applications de la loi Aubry, sur les conditions de travail comme sur les salaires, contre le projet de réforme de la santé, celui des retraites, etc. Mais pour faciliter ces contacts à la base ces propositions doivent être faites aussi de parti à parti, émaner de nos organisations toutes entières. Comment les militants du PCF pourraient-ils autrement avoir les éléments pour juger vraiment de la politique des révolutionnaires comme de celle de leur direction si les révolutionnaires n’ont pas fait à celle-ci les mêmes propositions qu’ils font aux militants ?

Puisqu’en ce moment il y a au PCF des militants qui se posent des questions, c’est le moment de leur en poser. Ce n’est pas quand ils auront disparu que la situation nous sera plus favorable.

Le 8 janvier 2000, Jacques MORAND


Construire une alternative révolutionnaire face au PCF, l’autre article sur la politique par rapport au PCF

Mots-clés PCF , Politique