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Tchétchénie : une sale guerre pour l’exemple

samedi 1er avril 2000

Fusillades sommaires, viols, pillages, tortures dans les sinistres camps de filtration, les témoignages se multiplient sur les atrocités commises par les soldats russes en Tchétchénie, à l’abri des regards.

Cette deuxième guerre de Tchétchénie devait être une expédition éclair, réglée en quelques semaines, à en croire les rodomontades d’Eltsine et de Poutine. Les soldats russes y semblent pourtant bien englués pour longtemps et les conséquences n’ont pas fini de s’en faire sentir.

Les motifs de la guerre

Opération de politique intérieure, destinée à donner à Poutine, le remplaçant d’Eltsine, l’autorité dont il manquait pour les futures élections présidentielles ? Certes. Le gouvernement russe a d’ailleurs lui-même orchestré de multiples provocations et attentats, comme ceux de Moscou, pour justifier la guerre. Mais d’autres raisons motivent probablement cette intervention.

Cette petite république du Caucase a proclamé unilatéralement son indépendance il y a neuf ans, en 1991. A l’époque, le pouvoir russe était confronté à l’éclatement des 15 républiques qui formaient l’URSS et n’avait pas les moyens de s’y opposer. En Tchétchénie, il a dans un premier temps accepté un compromis stipulant que les raffineries ainsi que la partie tchétchène de l’oléoduc acheminant le pétrole de la mer Caspienne resteraient russes. Puis, en 1994, devant l’état de déchirement du pays livré aux exactions de bandes armées, le pouvoir russe estima que la situation lui redevenait favorable. Il a alors déclenché l’offensive pour ramener ce pays dans son giron, en y menant une guerre totale pendant près de deux ans, de décembre 1994 à août 1996, faisant plus de 50 000 morts, avant d’être contraint de se retirer, devant la résistance des Tchétchènes et l’opinion russe écœurée de voir revenir les cercueils de ses fils.

Une opération de destruction systématique

Cette fois, les atrocités commises contre les civils ne le cèdent en rien aux récentes exactions serbes au Kosovo, pour terroriser les populations albanaises. Comme dans chaque guerre de ce genre, ces méthodes ont comme résultat de précipiter la population dans les bras de ses aventuriers nationaux, même s’ils étaient peu appréciés. Ces derniers sont avant tout des brigands sans scrupules qui, au nom de la foi, pillent le pays et se forgent leurs fiefs. Le 3 février 1999, le président tchétchène a instauré la « charia », loi islamique héritée du Moyen Age, visant à soumettre les femmes d’abord et le reste de la population au bon vouloir des « gardiens de la foi » genre talibans ou ayatollahs iraniens.

Mais quels que soient ses dirigeants du moment, c’est au peuple tchéchène de décider de son sort, de s’autodéterminer, et certainement pas au régime russe de lui imposer sa terreur.

Hors de Tchétchénie, les troupes russes !

La guerre totale menée contre la population tchétchène a sans doute valeur d’avertissement pour les autres peuples du Caucase, en particulier la république voisine du Daghestan, possédant une grande partie du littoral de la Caspienne. La menace est tout aussi claire envers l’Azerbaïdjan qui produit l’essentiel du pétrole de la Caspienne, accusé de laisser passer sur son territoire des combattants tchétchènes. L’avertissement vaut également pour l’ensemble du territoire russe et ses populations : il n’est plus question de permettre quelque sécession que ce soit. Les peuples de toute la Russie sont visés par le durcissement du régime.

La complicité hypocrite occidentale

Quant aux dirigeants occidentaux, en dépit de maigres protestations pour la galerie, ils semblent tous d’accord pour laisser le régime russe faire le ménage dans ce qu’ils s’accordent à lui reconnaître comme sa chasse gardée. Ce qui ne les empêche pas d’autre part d’essayer de détourner l’acheminement du pétrole de la mer Caspienne : Américains et Turcs ont en effet ensemble rénové un oléoduc contournant la Russie, inauguré en mai 1999.

Il semble de plus en plus clair que les buts de guerre russes sont l’établissement, avec le consentement des Occidentaux d’un régime suffisamment fort pour que l’Etat russe redevienne un partenaire fiable de l’impérialisme.

9 mars,

Laurence VINON

Mots-clés Monde , Russie , Tchétchénie