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Elections municipales : retour aux vieux démons du sectarisme ?

mardi 1er août 2000

L’annonce que Lutte ouvrière et la Ligue communiste révolutionnaire s’apprêtent à se présenter séparément aux prochaines élections municipales pose non seulement dans ces deux organisations mais aussi pour tous les militants et sympathisants de l’extrême-gauche, la question de savoir où en sont les rapports entre elles.

Nos deux courants, la tendance Révolution ! de la LCR et la fraction L’Etincelle de LO, qui ont milité et militent pour un rapprochement des deux organisations sur une base révolutionnaire, sont confrontés une nouvelle fois à la nécessité de définir la politique à proposer à leurs organisations respectives.

Voici donc un des deux premiers points de vue venant des deux courants qui collaborent à l’édition de Convergences Révolutionnaires.


LO vient de prendre la décision, malheureuse et lourde de conséquences, de décider unilatéralement d’arrêter définitivement les discussions avec la LCR en vue de constituer des listes communes aux prochaines municipales.

Lors des élections européennes, la LCR et LO ont eu la volonté politique de constituer un cadre unitaire sur la base de la défense d’un plan d’urgence contre la politique du patronat et du gouvernement qui réponde aux aspirations des travailleurs, des chômeurs, de la jeunesse. Le succès de la campagne et de la liste Laguiller-Krivine a montré la justesse de ce choix, mais il donnait aussi de nouvelles responsabilités aux deux organisations : celle de maintenir et de consolider ce pôle, pas seulement lors des échéances électorales mais aussi dans l’intervention politique quotidienne et lors d’échéances politiques importantes. La frilosité l’a malheureusement emporté car peu de choses ont été réalisées, du fait de la direction de LO qui a refusé plusieurs propositions de la LCR, en dehors de l’activité commune au Parlement européen et de banderoles et de cortèges communs lors de manifestations (Michelin, 16 octobre, 1er mai). Et maintenant la direction de LO vient de mettre un coup d’arrêt au processus engagé lors des européennes en refusant tout accord avec la LCR pour les municipales alors que plus que jamais les révolutionnaires ont la possibilité d’occuper un espace politique à un moment où la crise du PCF s’approfondit.

Certes des divergences existent entre les deux organisations, mais elles pouvaient être d’autant plus facilement surmontées qu’il y a un large accord sur la base politique, se situant dans le prolongement de la campagne des européennes, sur laquelle mener la campagne du premier tour.

La LCR était favorable à l’ouverture des listes, dans le cadre d’un accord et d’une plate-forme nationale Ligue-LO, à des groupes constitués ou à des individus qui se retrouvaient en accord avec notre démarche générale et notre orientation alors que LO manifestait pour le moins un grand scepticisme face à une telle ouverture. Quoi de plus naturel pourtant que les révolutionnaires aient, chaque fois que possible, la préoccupation d’associer des groupes ou des militants individuels à leurs campagnes politiques ?

Sur le second tour, les désaccords portaient sur la fusion des listes avec les listes de la gauche plurielle et sur la consigne de vote au second tour. Suite aux premières discussions entre les deux organisations, la LCR a clairement indiqué que la question des fusions devait se discuter commune par commune et qu’elle ne se poserait que dans un nombre de cas très limité. Quant à la consigne de vote au second tour, la divergence n’est pas nouvelle. LO préconise en général l’abstention et la LCR appelle à battre la droite. Position générale qui n’empêchera pas LO, on peut prendre les paris, à appeler à voter au second tour dans certains cas pour des listes conduites par le PCF ou pour le moins à se confiner dans une prudente attitude de silence radio, et qui n’a pas empêché la Ligue de son côté à ne pas donner de consignes de vote lors des dernières élections législatives partielles. Et si la divergence est réelle, il faut la situer à son juste niveau. Il ne s’agit en effet pas pour la LCR ni de rabattre les voix pour la gauche plurielle, ni de valoriser la politique menée par la gauche par rapport à celle menée par la droite. La question n’est vraiment pas là. Il s’agit simplement de ne pas renvoyer dos-à-dos les électeurs qui votent pour les partis de gauche et ceux qui votent pour les partis de droite. Par ailleurs, les élections municipales ont un caractère particulier. Les révolutionnaires peuvent-ils être totalement indifférents au fait que, quand la droite gagne par exemple des mairies traditionnellement gérées par le PCF, elle s’empresse d’accentuer la politique libérale en fermant les centres de santé, en supprimant les colonies de vacances ou l’accueil des enfants avant et après les horaires scolaires, en dégradant les conditions de travail des employés communaux ? C’est certes discutable - et c’est d’ailleurs discuté au sein même de la LCR - mais il ne s’agit que de cela et de rien d’autre.

Et il est erroné de vouloir trouver comme le fait LO une soi-disant cohérence entre la campagne du premier tour et la consigne de vote au second tour. Prenons un seul exemple : quelle cohérence y avait-il entre la campagne présidentielle d’Arlette Laguiller en 1981 et le vote « sans illusion mais sans réserve » au second tour pour Mitterrand ? Voilà qui montre bien que cette question du second tour est une question éminemment tactique et qu’elle ne saurait constituer un point de rupture. Et ce d’autant que la proposition faite par la LCR que les têtes de liste et les listes ne donnent pas de consignes de vote (ce qui est finalement assez proche d’une consigne d’abstention), chacune des deux organisations pouvant développer ses propres explications était un compromis parfaitement acceptable…pour peu qu’on en ait la volonté politique.

Les raisons réelles de cette rupture sont ailleurs. Il faut les trouver à la fois dans la volonté de LO d’assurer son hégémonie sur l’extrême-gauche et par son sectarisme à l’égard des militants politiquement inorganisés et du mouvement social comme en témoigne encore une fois son absence de l’immense rassemblement de Millau. Mais à ce sectarisme, nous ne répondrons pas par le sectarisme et nous continuerons sans relâche à proposer que la LCR et LO interviennent ensemble chaque fois que c’est possible car cette unité est un des éléments pouvant aider à la construction d’une véritable alternative anticapitaliste et révolutionnaire aux organisations réformistes.

Le 2 juillet 2000 Léonce Aguirre

Mots-clés Elections , LCR , Lutte ouvrière , Politique