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Mornes législatives en Allemagne

dimanche 29 septembre 2013

La chancelière Angela Merkel a remporté ces élections en augmentant de 8 points le score de la CDU-CSU (Chrétiens démocrates), porté à 41,5 %. Cela dit, elle ne récupère pas tout ce qu’ont perdu les libéraux du FDP qui faisaient partie de sa coalition gouvernementale et paraissaient plus ouvertement dans le camp du patronat : 10 points en moins pour eux, qui pour la première fois dans l’histoire de la RFA, sont en dessous de la barre de 5 %. Du coup, Merkel a moins de voix que le SPD (Parti social-démocrate), le parti Vert et Die Linke (Parti de gauche) réunis. Et moins de sièges au parlement qu’eux réunis. Ces trois pourraient donc théoriquement former un gouvernement, ce que le SPD et les Verts ont cependant exclu avant même l’élection – le SPD ayant jusque-là toujours rejeté l’alliance avec Die Linke, une formation qui compte des « communistes » dans ses rangs ! Le plus probable est alors une nouvelle « grande coalition » entre CDU et SPD comme entre 2005 et 2009. Avec un SPD qui, avec ses 25,7 %, ne s’est guère remis de sa débâcle de 2009… ni du fait que son chef de l’aile bien droitière Steinbrück a été ministre des finances sous Merkel. Die Linke est passé de 11,9 % à 8,6 %. Ce parti « de gauche » ne brille pas dans les luttes, n’a de perspective qu’électoraliste et parlementaire, particulièrement peu crédible cette fois où la victoire de Merkel était prévisible. La participation aux élections est en légère augmentation avec quand même 30 % d’abstentions. Ce sont surtout des travailleurs ou des chômeurs qui sont restés chez eux.

Retour sur la campagne

« Wahl » en allemand, veut dire élection, mais aussi choix. La campagne a pourtant été marquée dans les classes populaires par le sentiment de n’avoir aucun choix, entre la CDU (Union démocratique chrétienne) de la chancelière Angela Merkel qui est au pouvoir depuis 2005, et le SPD (Parti social-démocrate) dirigé par Peer Steinbrück qui peine à paraître opposant. Les craintes que n’augmentent les abstentions ont même poussé l’IG-Metall, la plus grosse fédération syndicale du pays, à faire campagne : « Allez voter ! »« Pour un emploi stable et juste ».

Emploi et salaire marquent la campagne

Tous les partis traditionnels ont mis « le travail » en avant, à l’exception du petit FDP de droite dure et bien cravatée (au pouvoir en coalition avec Merkel depuis 2009). Du travail donc, un bon travail ! Angela Merkel a clairement milité pour, car il en va selon elle des profits, toujours davantage de profits ! La social-démocratie de son côté, a savamment joué sur les mots, le travail assurant à la société « mehr Wert », un plus de valeur… sachant que « Mehrwert » en un seul mot n’est rien d’autre que la fameuse « plus-value » de Marx décortiquée par lui comme allant tout entière dans la poche des patrons.

Si l’essentiel de la campagne a tourné autour de questions sociales, c’est qu’effectivement le règne d’Angela Merkel a été marqué par la baisse des salaires, l’amputation des allocations sociales, l’explosion de l’intérim et les pertes d’emplois liées à des restructurations. Certes, en Allemagne, les patrons ne parlent pas de licenciements puisqu’ils les négocient avec les syndicalistes des comités d’entreprise, mais les emplois n’en disparaissent pas moins !

Un smic en Allemagne ?

L’Allemagne du prétendu miracle économique est devenue championne en mini-jobs de 200 à 450 euros maximum par mois, pour des contrats à temps partiel : ce que le gouvernement SPD de Schröder et sa batterie de lois Hartz vieille de 10 ans avaient autorisé les patrons à pratiquer. Rien d’étonnant à ce que la revendication d’un salaire minimum soit d’actualité depuis des années, et populaire. Tous les politiciens en campagne, à peu de choses près, en ont parlé.

Angela Merkel la première, et même au pluriel : elle ne promet pas un smic, mais des salaires minimums selon les branches, selon les régions, à négocier entre organisations syndicales et patronales, et qu’une loi pourrait rendre obligatoires. Les travailleurs connaissent déjà ces smics à la Merkel : dans le domaine de l’intérim, il y a un smic à 8,19 euros de l’heure à l’Ouest, à 7,50 euros à l’Est. Dans le domaine des soins aux personnes âgées, il y en a un à 8,50. Tous bruts ! Les patrons les estimant systématiquement trop élevés, ils cherchent des combines pour détourner les prescriptions légales… et les trouvent !

La social-démocratie fait un genre de surenchère : un seul et même smic pour tous, de 8,50 euros ! Honteusement bas, selon bien des travailleurs qui de plus se rappellent qu’à l’époque de la grande coalition gouvernementale entre CDU de Merkel et SPD (entre 2005 et 2009), les sociaux-démocrates s’étaient opposés à tout salaire minimum… et que, plus loin encore dans le passé, c’est le social-démocrate Schröder à la tête du gouvernement qui avait porté la série d’attaques la plus violente contre le niveau de vie des classes populaires. Dans ces années 2002-2003, une vraie « thérapie de choc » en faveur des patrons, en comparaison de laquelle les mesures prises depuis par Angela Merkel pourraient paraître douces !

Seul Die Linke (genre de Front de Gauche) déclare : « Assez bavardé, un salaire minimum, maintenant, et à 10 euros ». Mais méfiance aussi à l’égard de ce parti assez roublard pour afficher en gros le mot « Révolution* » sur ses placards publicitaires, néanmoins flanqué de cet astérisque qui renvoie à une petite note qui dit : « Non, seulement… ». Une version allemande de la révolution par les urnes de Jean-Luc Mélenchon !

Choisir plutôt la lutte

Certes, il n’y a pas eu en Allemagne de réaction spectaculaire des travailleurs aux sales coups des patrons et du gouvernement. Mais des grèves d’avertissement et débrayages syndicaux ont généralement été suivis, dans la métallurgie ou les services publics. Des grèves ont eu lieu dans le transport aérien. La combativité est surtout étroitement canalisée par des appareils syndicaux qui jouent le jeu de la collaboration. Des brèches pourtant peuvent s’ouvrir. La colère a éclaté récemment chez Daimler à Brême. Au début septembre, une grève « sauvage » (hors cadre légal) a éclaté chez Opel à Bochum, ceux de l’équipe de nuit montrant que les travailleurs ne sont pas prêts à se laisser imposer la fermeture de l’usine en 2014. Les jeux électoraux n’étouffent pas la colère.

Le 23 septembre 2013

Sabine MÜLLER


Restos et… bouteilles du cœur ?

Les bouteilles de bière font le bonheur de ceux qui les vident, mais aussi de ceux qui les ramassent vidées. Eh oui ! L’habitude se répand d’abandonner les canettes sur la voie publique, non par négligence, mais parce que le verre est consigné et que d’autres pourront se faire un peu de fric en allant les rendre ! La récupération des bouteilles est donc devenue le « mini-job » de certains vieux, ou moins vieux, particulièrement démunis ! Un miracle allemand !


Les 630 sièges du nouveau Bundestag

CDU/CSU 311
Les Verts 63
SPD 192
Die Linke 64
Mots-clés Allemagne , Elections , Monde