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Espagne : Indignés et toujours là

dimanche 25 septembre 2011

Le 15 mai 2011 commençait le mouvement des Indignés d’Espagne. En quelques jours, dans une soixantaine de villes, des campements se sont installés pour exprimer l’indignation. Populaire, le mouvement l’a été. Des millions de personnes sont allées voir qui étaient ces indignés qui tenaient tête et criaient leur rejet du système. Lorsque les campements ont cessé avec, notamment, la fin de l’occupation de la Puerta del Sol de Madrid en juin, les Indignés ont continué tout l’été à faire entendre leur voix.

Des manifestations, le 19 juin, ont rassemblé plus de 250 000 personnes. Tout l’été a été marqué par de multiples actions, en particulier pour empêcher des expulsions de logements, regroupant des dizaines de personnes chaque fois. Outre les assemblées générales qui ont continué sur les places auparavant occupées, des assemblées de quartier ont pris l’habitude de se réunir. Les Indignés ont programmé une grande manifestation le 15 octobre et, dans leurs rangs, certains commencent à parler de la nécessité de la grève générale.

Des manifestations laïques à l’occasion des JMJ (Journées mondiales de la Jeunesse catholique, d’accueil du Pape) ont aussi marqué l’été. En Espagne, la déclaration de revenus comporte une case à cocher si l’on souhaite verser 0,7 % des impôts pour financer l’Église catholique... Lorsque l’on coche l’autre case, la somme va à des œuvres sociales et caritatives (parmi lesquelles beaucoup d’associations catholiques !). L’organisation des JMJ a été largement aidée par l’État et la Communauté de Madrid. Cette débauche de fonds a révolté, sur fond de chômage qui dépasse les 20 % ! À l’appel d’associations laïques, au moins 5 000 personnes se sont rassemblées, rabrouées violemment par la police. Elles ont tenté d’occuper en retour... la Puerta del Sol !

Les Indignés ont permis que s’exprime spectaculairement une colère restée sourde jusque-là. L’ambiance a changé.

La « règle d’or »

Tandis que le socialiste Zapatero annonçait un nouveau paquet de mesures contre les travailleurs — dont encore un « allègement » du droit du travail facilitant l’emploi précaire — il lançait sa tentative de contre-feu aux mobilisations populaires : l’annonce d’une réforme constitutionnelle d’urgence, contenant une « règle d’or » (simple pétition de principe) d’équilibre budgétaire. Cette réforme a été votée à la va-vite, par le truchement d’un accord entre le PSOE (le Parti socialiste ouvrier espagnol) et le PP (le Parti populaire, de droite), la plupart des autres partis [1] la rejetant. Des élections législatives anticipées se tiendront le 20 novembre et les grands partis battent la campagne pour savoir qui, d’Alfredo Pérez Rubalcaba (PSOE) ou de Mariano Rajoy (PP), sera le nouveau chef de gouvernement. Bonnet blanc et blanc bonnet. Après s’être fait le champion de l’austérité, Zapatero annonce maintenant le rétablissement de l’impôt sur le patrimoine (équivalent de l’ISF)... qu’il avait lui-même supprimé en 2008. Peu probable que cela suffise à convaincre l’électorat populaire.

Les gouvernants tentent surtout fébrilement de rassurer les marchés sur le paiement de la dette espagnole. En particulier en montrant qu’ils sont prêts à assainir les administrations, centrale et locales. En Espagne, beaucoup de services publics (comme l’enseignement) sont gérés par les « Communautés autonomes », l’équivalent des régions françaises.

Les deux principaux syndicats qui, après la journée de grève générale de septembre 2010, s’étaient distingués... par leur soutien à la réforme des retraites de janvier 2011 reculant à 67 ans l’âge de départ, ont cette fois enfilé quelques frusques d’opposants... Une manifestation à leur appel a réuni plusieurs dizaines de milliers de personnes. Si leur axe principal est d’appeler à un référendum sur la réforme constitutionnelle, une jonction s’est faite entre le cortège syndical et celui des Indignés (une première), dont une partie demande aussi un référendum.

Plus importante est la mobilisation naissante des enseignants en cette rentrée scolaire. Inspirés par les méthodes des Indignés, ils ont multiplié un peu partout les rassemblements contre les conséquences des coupes budgétaires décidées par les Communautés autonomes (à Madrid, l’horaire d’un enseignant passe de 18 heures à 20 heures, 3 000 professeurs remplaçants sont licenciés). Élèves et parents ont défilé aux côtés des enseignants le 14 septembre dans la capitale et deux journées de grève y sont programmées les 20 et 21 septembre.

Les grandes manœuvres politiques n’ont pas rafraîchi le climat social !

14 septembre 2011

M.C.


[11 Il s’agit principalement de IU (gauche unie, coalition autour du PCE) et des partis nationalistes et régionalistes. Un député socialiste, ancien secrétaire général du syndicat CCOO, s’est aussi opposé à la réforme.

Mots-clés Espagne , Indignés , Monde