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Plans sociaux, PSE, GPEC, « départs volontaires » : Les multiples visages des licenciements collectifs

jeudi 2 octobre 2008

Supprimer des emplois par des départs volontaires est devenu très tendance ! Ces derniers mois, Pfizer, LCL (ex-Crédit Lyonnais), Alcatel-Lucent ou Le Figaro ont ouvert des plans de départs volontaires pour réduire leurs effectifs. Outre Atlantique, les trois grands constructeurs automobiles de Détroit, General Motors, Ford et Chrysler, bouclent également des plans similaires.

Celui lancé par Renault en cette fin 2008 est sans doute inspiré par l’accord de GPEC (Gestion prévisionnelle des emplois et compétences) signé entre tous les syndicats – sauf la CGT – et la direction de PSA1. La direction de Renault pense-t-elle trouver suffisamment de volontaires au départ pour éviter de prendre des mesures plus coercitives ? En 2007, PSA avait bien trouvé (quitte à exercer quelques pressions) 5 090 « volontaires » pour les 4 800 départs programmés.

Le plan actuel de Renault innove encore un peu dans les méthodes expéditives pour opérer des licenciements collectifs. Une histoire marquée par des résistances et des conflits, parfois durs.

À partir du milieu des années 1970, alors que commencent les grandes vagues de licenciements, le gouvernement de droite renforce quelque peu la législation sur les licenciements économiques : introduction de l’autorisation administrative en 1975 (supprimée dix ans plus tard), augmentation de l’indemnisation du chômage pour licenciement économique, à la suite de l’explosion de colère des sidérurgistes lorrains (une mesure, là aussi, éphémère).

Avec les vagues de licenciements des années 1980, on a vu apparaître les mesures permettant aux patrons, notamment ceux de l’automobile, de réduire leurs effectifs, en particulier pour les rajeunir, par des dispositifs de départs en retraite anticipés, FNE, ARPE ou CASA, eux aussi aujourd’hui disparus.

En 2002, le « plan social » a laissé, sous la baguette magique de Martine Aubry, la place à un bien mal nommé « plan de sauvegarde de l’emploi » . Le but de cette loi (partiellement annulée après le retour de la droite) était de permettre aux syndicats de faire de prétendues « propositions économiques » alternatives. Course au bon « repreneur » , mirage de bonne « suggestion industrielle », amuse galerie plus qu’organisation de la riposte. On en connaît l’efficacité.

En 2005, la loi dite de « cohésion sociale » de Jean-Louis Borloo a étendu l’obligation pour les entreprises de procéder à une « Gestion prévisionnelle des emplois et compétences » . Procédure employée par Peugeot l’an dernier. Négociée avec les syndicats, cette gestion prévisionnelle est censée anticiper les évolutions de l’entreprise… et ses suppressions d’emplois, en négociant par avance les incitations au départ. Aux syndicats de vanter les mérites des aides aux reconversions ou mutations obtenues. Au patron de choisir la date et le nombre des « volontaires » désirés.

La toute dernière loi passée en juillet 2008 par le gouvernement Sarkozy-Fillon fait un pas supplémentaire en instaurant la « rupture conventionnelle par consentement mutuel » . Un simple arrangement entre le patron et chacun des salariés suffit. On sait, dans le rapport de force actuel, ce que le consentement des salariés peut avoir de volontaire et spontané…

Les départs volontaires présentent de nombreux avantages pour les entreprises :

Règle n° 1 : Ne pas prendre les salariés de front en leur annonçant qu’ils sont mis à la porte. Chaque salarié peut penser qu’il n’est pas concerné s’il ne se porte pas volontaire. Question de réduire les risques de contestation collective.

Règle n° 2 : Individualiser les conditions de départ. Chacun selon son âge, sa qualification, son mode de départ (reclassement, retraite ou « projet professionnel »).

Règle n° 3 : Diviser les salariés entre eux. Ceux qui ont peur de perdre leur emploi et ceux qui sont tentés de partir, les anciens qui arrivent prêts de la retraite, les jeunes qui ont des opportunités ailleurs…

Mais ce sont des licenciements qui sont au menu, négociés par avance chez PSA ou décrétés par le patron comme à Renault, en échange de compensations ridicules au regard des bénéfices réalisés par ces entreprises qui dégraissent pour augmenter leurs profits. Et surtout en regard de l’avenir réservé aux salariés : chômage pour ceux qui partent et surcharge de travail pour ceux qui restent.

Ces départs se déroulent sur fond de pression générale pour pousser dehors : climat délétère à l’intérieur de l’entreprise, surcharge de travail ou à l’inverse baisse de charge, voire chômage technique, discours alarmiste de la direction sur les sombres perspectives, menaces de mesures plus directives et moins avantageuses en cas de non atteinte des objectifs de départs « volontaires »…

Renault a choisi ses objectifs : la suppression d’une équipe sur la ligne de production de la Laguna à l’usine de Sandouville et donc 1 000 « volontaires » à trouver ; 10 % de réduction des coûts de la R&D (Recherche et Développement), donc 3 000 départs volontaires dans ce secteur, 10 % des effectifs…

Un simple coup d’œil à la grille des aides au départ dits volontaires montre qu’elles sont bien moindres que les indemnités accordées dans le passé. Et gare à qui ne se dépêche pas : le mini bonus au volontariat (de 4 à 6 mois d’indemnité en plus de l’indemnité de licenciement légale) est dégressif, et le dispositif s’arrête fin avril ça tombe à zéro. Avec la menace de licenciements secs si les volontaires ne sont pas trouvés.

Actionnaire à hauteur de 15 % de Renault, le gouvernement jure qu’il va bien veiller à ce que les réductions d’effectif s’y fassent sur la base du volontariat. Mais les emplois supprimés dans le cadre de plans sociaux, de PSE, de GPEC ou autres plans de départs volontaires, ce sont toujours bel et bien des licenciements.

Ce qui est plus que jamais à l’ordre du jour, c’est l’interdiction des licenciements !

E.Q.

Mots-clés Licenciements , Politique
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