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« Tout va très bien, madame la rectrice… » (air trop connu)

jeudi 2 septembre 2021

Pré-rentrée, ce mercredi 1er septembre, dans un collège normand classé « sans histoire », mais dont le personnel, enseignant surtout mais pas seulement, commence à sentir la moutarde lui monter au nez…

Je suis prof remplaçant. Que mes missions durent quelques semaines, ou que je bouche les trous pour l’année, je ne fais que passer. Mais à force de tourner, il m’arrive de revenir sur mes pas. Ce mercredi, je reconnais malgré les masques pas mal de visages rencontrés à mon précédent passage. Au traditionnel café d’accueil, les collègues échangent des nouvelles comme n’importe quelle année. Mais une fois entrés dans la grande salle de réunion pour le briefing annuel du chef d’établissement, et une fois entrés un quart d’heure après dans le vif du sujet – les moyens obtenus pour cette année qui commence –, l’atmosphère change.

Dans ce collège tranquille, les élèves viennent en majorité de « CSP+ ». Majorité veut dire qu’il y a aussi un certain nombre d’élèves de milieux pas vraiment favorisés, et d’ailleurs, on vient enfin de décrocher une assistante sociale à demeure pour s’occuper d’eux – et des autres aussi, car l’argent ne résout pas tous les problèmes… Surtout, ces élèves sont de plus en plus nombreux. Quasiment une centaine de plus en trois ans. À force de râler, les enseignants ont obtenu une petite rallonge d’heures. Le nombre moyen d’élèves par classe est passé de 27,3 l’an dernier à… 26,9. Ce qui veut dire en fait un paquet de classes à 28 ou 29. Pire, du côté des agents administratifs, des surveillants (AED) et des conseillers principaux d’éducation (CPE) qui les encadrent, c’est rien du tout ! « C’est un poste de secrétaire, un CPE à temps plein et deux AED en plus qu’il nous faut », martèlent les collègues depuis le printemps dernier. Ils ont alerté la presse, mené des actions, rencontré des tas de responsables. On leur a promis une réponse en juin, puis début juillet, puis… La coupe est pleine.

Pourtant, ce n’est pas l’orage. En grande partie parce que l’an dernier, l’adjointe a assumé la direction du collège toute seule, à bout de bras, le chef d’établissement étant détaché dans les échelons supérieurs de l’administration. Et que ça recommence cette année. Or, personne n’a envie de la voir partir en arrêt, et le collège risquer de partir, lui, à la dérive. Finalement, on s’accorde pour accueillir les 6e normalement demain jeudi, histoire de ne pas se mettre leurs parents à dos d’emblée, mais faire savoir aux cadres du rectorat qui reçoivent la direction du collège le vendredi que si nous n’obtenons rien, on passera à l’action dès le lundi suivant.

La réunion reprend son cours. Le chef d’établissement relaie les directives de la rectrice : « En cette année d’élection, nous serons particulièrement tenus à notre devoir de réserve. » Ah bon ? Macron est tombé si bas dans les sondages chez les profs qu’il faut nous dire de nous taire dès septembre ? Il poursuit : « Le ministre tient particulièrement à ce que nous menions des actions en défense de la laïcité. » À l’heure de la pandémie, chacun ses priorités… Nous ce serait plutôt de rattraper un peu du temps d’apprentissage perdu ces deux dernières années. Blanquer, lui, a une élection à gagner, et plutôt à droite si on comprend bien. Mais le meilleur est pour la fin. La rectrice se félicite de la revalorisation de nos salaires… de 20 à 24 euros par mois. « Mais cette fois, tout le monde y a droit, pas juste les enseignants en tout début de carrière », croit bon d’ajouter le chef d’établissement. Qui a néanmoins pris la précaution de faire préparer un repas pour tout le monde le midi : s’il fallait compter sur la rectrice pour désamorcer la crise…

Correspondant local

Mots-clés Enseignement , Politique
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