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Moria brûle et l’État français verse… des larmes de crocodile

dimanche 4 octobre 2020

Le 9 septembre dernier, un incendie a brûlé entièrement le plus grand camp de réfugiés d’Europe, Moria, sur l’île grecque de Lesbos. La France de Macron a aussitôt proposé d’accueillir… quelques centaines de mineurs isolés. Les dizaines de milliers d’autres migrants, adultes ou familles, peuvent continuer à croupir en Grèce en attendant l’expulsion…

D’un enfer à l’autre

Le camp de Moria est un « hotspot », euphémisme désignant une prison pour migrants. Au prétexte de trier les « bons » et les autres, on y prélève pour le compte du fichier Eurodac les empreintes digitales de chaque candidat à l’asile. Si ce dernier passe dans un autre pays d’Europe pour y faire une demande, Eurodac indique dans quel « hotspot » il est passé pour l’obliger à y retourner faire ses démarches. C’est le principe du « règlement de Dublin », visant à empêcher les migrants déboutés de tenter leur chance ailleurs sur le continent.

Conçu pour accueillir 3 000 personnes, Moria en abritait près de 13 000, vivotant dans l’attente d’une réponse favorable à leur demande d’asile. Depuis l’incendie, des milliers de personnes errent sur l’île de Lesbos. Manquant de tout, les réfugiés cherchent à atteindre Mytilène, le principal port de l’île, pour y prendre un ferry vers Athènes. Mais le gouvernement grec a placé Lesbos en état d’urgence et dépêché neuf bataillons de policiers pour barrer la route aux réfugiés, tandis qu’un nouveau camp « provisoire », Kara Tepe, était construit à la hâte.

La politique barbare de l’Union européenne…

Depuis 2014, on estime à au moins 20 000 le nombre de migrants morts en tentant de franchir la Méditerranée. La seule réponse des États européens est de renforcer les frontières. Mardi 23 septembre, leur nouveau « pacte pour la migration » n’a pas dérogé à la règle. Le règlement de Dublin serait abrogé, à la grande satisfaction des États grec, italien et espagnol, sur le sol desquels Dublin tend à fixer les migrants. Pour qu’il n’y ait « plus jamais de Moria », l’UE s’engage à… ouvrir les suivants hors de son territoire, dans des pays généralement plus pauvres et plus autoritaires ! Bonjour la solidarité !

Depuis mars 2020 déjà, les garde-côtes grecs reconduisent dans les eaux turques les réfugiés, quand bien même ils réussissent à atteindre les îles grecques. Cette véritable entorse au droit international n’est possible que parce que la Turquie d’Erdoğan accepte de collaborer avec l’Union européenne. Bien sûr, quand le même Erdoğan envoie sa flotte de guerre parader dans les eaux de Chypre, pays membre de l’UE, Macron lui fait les gros yeux. Mais il évite de se brouiller avec le sous-traitant en blocage des flux de réfugiés syriens. Du reste, quand il s’agit d’enfermer les migrants, même les mafias esclavagistes libyennes sont des interlocuteurs respectables pour Macron, Merkel et leurs semblables.

…est d’abord celle de la France

Actuellement, 40 000 migrants sont bloqués sur les îles grecques, parfois depuis des années. Ils représentent 0,06 % de la population française. Mais notre gouvernement présente comme un geste inouï l’accueil de 500 gosses. Qui n’est pour l’instant qu’une promesse. Rappelons que la France de Hollande n’a jamais tenu aucune des siennes. Au total, l’État français a enfermé plus de 50 000 étrangers sans papiers en 2019. Il a profité du confinement pour attaquer les conditions de vie des réfugiés en vidant par la force squats et campements, en suspendant les dépôts de demandes d’asile et en multipliant les expulsions ! Louison Mungu Mawu, qui a longtemps vécu à la rue en France avant d’obtenir le statut de réfugié politique, témoignait dans le journal Le Monde le 25 septembre : « Des gens sont devenus fous à cause [du règlement] Dublin » et du traitement policier des migrations qu’il implique. Macron et consorts ont reçu le message. Ils préparent bien pire.

24 septembre 2020, Jimmy Gadajoz et Mathieu Parant

Mots-clés Migrants , Monde
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