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Autriche : le covid-19 aussi…

jeudi 26 mars 2020

Comme la plupart des pays, l’Autriche a relâché les conditions du chômage partiel pour éviter de trop grands coûts aux patrons face à l’épidémie du coronavirus. Auparavant, le chômage partiel était dans un premier temps payé par l’employeur (à 80 % du salaire net, 90 % pour les plus bas salaires), avant d’être remboursé par l’État. Dès lors, 400 millions d’euros ont été mis à disposition, somme renouvelable bien évidemment si l’argent venait à manquer, pour payer dès le premier jour avec l’argent des contribuables. De plus il est maintenant possible de mettre 100 % des salariés d’une entreprise au chômage partiel. ­

Les patrons autrichiens ne se sont pas laissé prier : l’entreprise de jeu de hasard (?!) Casino Austria a mis 2000 salariés au chômage partiel, les grandes entreprises autrichiennes du BTP, la STRABAG et Andritz, l’ont fait à bien plus grande échelle. Presque quotidiennement, les unes et les autres annoncent des plans de chômage partiel, plus de 18 000 le 20 mars, souvent du jour au lendemain et sans information préalable, ni discussion avec les salariés ou les syndicats.

Mais la « manne » du chômage partiel ne s’applique pas aux plus précaires. Alors que l’agence de chômage autrichienne (AMS), se targuait de chiffres historiquement bas à la fin février, avec un peu moins de 400 000 personnes sans emploi (sur une population active d’un peu moins de cinq millions, soit entre 4,2 % et 7,5 % selon les calculs), elle a dû constater une soudaine hécatombe la semaine dernière. Du lundi 16 au jeudi 19 mars, l’agence a enregistré 97 500 nouveaux chômeurs ! Le dimanche 22 mars, le chiffre a grimpé à 115 600. En quelques jours, le nombre de chômeurs a donc explosé de 25 % !

C’est surtout dans le tourisme, qui pèse beaucoup dans l’économie autrichienne, et dans le BTP que des patrons ont finalement décidé que des plans de licenciement seraient facilités. Mais aussi parmi les intérimaires, les salariés de boîtes de sous-traitance, où presque 10 000 travailleurs ont été licenciés. Tout cela évidemment alors que, comme partout, les patrons profitent de crédits, de reports de paiements… et de plans massifs de chômage partiel, payés par l’État, donc bien par les impôts des travailleurs et travailleuses.

Frontières fermées + chômage massif = Tout bénef’ pour les patrons de l’agro-alimentaire ?

Dans le même temps, les gros producteurs agricoles et les entreprises agro-alimentaires ajoutent leurs revendications aux cahiers de doléances présentés au gouvernement. La fermeture des frontières les prive de la main-d’œuvre saisonnière surexploitée, puisée habituellement et en grande partie parmi les migrants d’Europe de l’Est. Ces chômeurs – que Marx décrivait comme une « armée industrielle de réserve » – sera-t-elle mobilisée pour une nouvelle campagne, sur de nouveaux champs de bataille… agricoles ? Il semble bien que oui. Le gouvernement s’est empressé de proposer son aide pour orienter une partie des nouveaux chômeurs vers l’agriculture, où il manque 5000 saisonniers, et vers l’industrie alimentaire en quête elle aussi de milliers de personnes. Tout est bien dans le meilleur des mondes, un retour à la terre, mais bien capitaliste !

Pourquoi pas une solution « à la française » où Muriel Pénicaud en appelle elle aussi à « l’armée de l’ombre » (décidément, le vocabulaire militaire a la cote !), à ces centaines de milliers de travailleurs mis au chômage partiel et qui pourraient aller aider les agriculteurs, tout en gardant une partie de leur allocation cumulable avec les salaires de misère payés aux saisonniers ?

Une riposte qui s’annonce ?

Heureusement, les travailleurs d’Autriche ne restent pas sans défense face à ces attaques frontales. Dans ce pays au dialogue social pourtant bien rôdé, un débrayage sauvage des travailleurs de Greiner Perfoam, qui produit des matières plastiques et de la mousse artificielle, a eu lieu près de Linz, contre la « conduite irresponsable de la boîte » et a duré deux heures avant que les travailleurs ne reprennent le travail avec de maigres concessions sous la pression conjuguée de la direction… et des syndicats. À Ried, c’est sous la menace d’une grève que l’entreprise a accordé une semaine de congés payés pour mettre en place des mesures de sécurité et désinfecter les lieux de travail.

Des premières réactions qui donnent de l’espoir, car il y aura des comptes à régler, à la fin de la pandémie ou dès maintenant !

Dima Rüger

Mots-clés Autriche , Covid-19 , Monde