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Editorial

Oui, démission ! De qui ?

jeudi 10 novembre 2005

Absurde ou gratuite, la flambée de violence qui secoue le pays depuis 8 jours au moment où nous écrivons ? Non, sans perspective, ce n’est pas la même chose. Mais ce n’est certainement pas à gauche ni dans le mouvement ouvrier qu’on peut ou doit s’en étonner.

Nous assistons à la révolte d’une fraction de la jeunesse prolétarienne, celle qui est la plus démunie de travail, de cadre de vie social, de culture et d’espoir. Celle aussi du coup, évidemment, qui au quotidien ne voit souvent de porte de sortie que dans la débrouillardise, l’individualisme et la nécessité de ne pas se préoccuper des autres, quand ce n’est pas de les écraser. Ou qui, quand elle laisse éclater son exaspération, comme en ce moment, s’engage dans une révolte aveugle, dans ses méthodes comme dans ses cibles. Mais c’est quand même bien une authentique révolte d’une partie de notre classe.

Pour que les révoltés dépassent la simple volonté d’exprimer la colère et la hargne, il leur faudrait prendre conscience d’être partie prenante d’un mouvement plus large, que leur combat s’intègre dans une lutte d’une autre ampleur. Alors, l’explosion pourrait se transformer en autre chose qu’une émeute et se donner d’autres objectifs que casser pour casser, brûler pour brûler, quoi qu’on brûle, et même si c’est l’école du quartier, les bus de la ville ou la voiture du voisin.

Cette conscience et ces objectifs, ne comptons pas sur la gauche ou les syndicats pour les apporter. Même simplement par l’exemple. Ils ont rarement été aussi éloignés... de se les donner pour eux-mêmes. Rarement été aussi plats. Rarement montré moins de volonté de mener le combat pour la défense des pauvres et des travailleurs. Comment des jeunes en révolte pourraient-ils leur prêter la moindre attention ?

La gauche, y compris la gauche de la gauche, elle, ne pense qu’aux élections. Belle perspective à offrir aux banlieues en ébullition que de bien voter dans un an et demi !

Les syndicats, y compris la CGT, n’ont qu’un objectif en tête : disperser et émietter au maximum les luttes éventuelles des travailleurs. Quelle perspective de convergence pourraient-ils offrir aux luttes de la jeunesse ? Quand des jeunes en décousent avec la police, au risque de se retrouver devant le juge, puis en prison, quelle considération peuvent-ils porter à des gens qui poussent marins de la SNCM ou traminots de la RTM a cesser leur lutte sous la menace d’un dépôt de bilan ou... d’un jugement du tribunal ?

Pour avoir une chance, même une chance seulement, d’être pris en considération par cette partie de la jeunesse prolétarienne, sans tradition, sans conscience de classe et sans boussole politique ou sociale, il faudrait que le mouvement ouvrier ait, à défaut des militants qui lui manquent dans cette fraction du prolétariat, au moins des dirigeants qui montrent qu’ils ont envie eux-mêmes d’en découdre avec ses ennemis, le gouvernement et les patrons.

Alors peut-être pourrait-il proposer aux banlieues d’autres moyens, moins stupides et plus efficaces, d’exprimer leur colère ou de faire entendre leurs revendications. Et faire comprendre aux jeunes que ce n’est pas dans une lutte sans ou même contre le reste de la population, mais avec, qu’ils ont des chances de changer leur sort.

Sinon la révolte d’aujourd’hui soit se dissipera sans résultat autre qu’une démoralisation encore plus grande, soit pire, dressera de plus en plus les révoltés contre l’autre partie de la population et des travailleurs, au risque d’être récupérée par les pires ennemis des uns et des autres.

6 novembre 2005

Mots-clés Banlieue , Politique