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36 jours de grève à la Polymécanique, au printemps 1971

lundi 14 mai 2018

Partie 1

[transcription du récit oral de Théodore Topolanski lors d’un meeting de Lutte Ouvrière, le lundi 7 juin 1971]

C’est aujourd’hui que nous avons repris le travail à la Polymécanique, après une grève de trente six jours. A l’origine de ce mouvement de colère des 1200 travailleurs de cette usine de Pantin, il y a la quasi suppression d’une prime dite de bilan, qui existait depuis trois ans dans l’entreprise, époque à laquelle devait être mise en place la ‘participation’. La prime qui était de 2,25 % en 1969, de·2,65 % en 1970, fut ramenée à 0,1 % cette année. Justification donnée aux travailleurs : les bénéfices réalisés étaient plus faibles, quasi-nuls l’année précédente.

La diminution de la prime qui déclencha la colère

Les bénéfices en question, ceux sur lesquels est calculée la prime de bilan, sont les bénéfices déclarés soumis à l’impôt et n’ont rien à voir avec les bénéfices réels, car les amortissements de matériel en sont déduits. Plus un patron investit dans son entreprise, moins il paye d’impôts sur les bénéfices l’année suivante, mais cela ne signifie pas pour autant qu’il en fasse moins.

C’est de cela que les travailleurs de la Poly n’ont pas été dupes. Ils ont vu les nouvelles machines entrer dans les ateliers, la production augmenter ainsi que les cadences d’ailleurs ; ils ont vu le prix des Mobylettes monter également. Fallait-il alors qu’ils acceptent de voir leur paye diminuer ?

La direction un mois auparavant avait annoncé que la prime serait certainement diminuée par rapport à celle de·l’année précédente. Elle avait annoncé une augmentation des salaires de 3 % au premier juin en même temps. Elle pensait ainsi que les ouvriers allaient admettre ces miettes en compensation. Mais ce n’est pas ainsi que cette mesure fut prise par les travailleurs de la Poly. La prime de bilan, on la touchait en une seule fois, alors que les 3 % étaient à venir. Et l’usine étant en majorité composée d’O.S. [ouvriers spécialisés], c’est-à-dire de bas salaires, la plupart d’entre nous avait déjà placé en pensée cette somme qu’on nous annonçait maintenant quasi nulle. Au lieu d’un peu plus d’une semaine de salaire, nous n’avions plus que l’équivalent de 10 paquets de cigarettes. Tout cela n’aurait sans doute pas suffi à déclencher la grève s’il n’y avait pas eu l’intervention organisée des militants de notre tendance au travers de la section syndicale FO. que nous avions créée au lendemain des évènements de mai 68, ce qui ne veut pas dire, vous vous en doutez, que nous sommes des partisans de Bergeron [André Bergeron, alors secrétaire général de FO].

Le montant de la prime devait être annoncé un jeudi au comité d’entreprise. Dès le lundi nous faisions déjà une propagande orale dans l’entreprise pour débrayer immédiatement au cas où la prime annoncée serait diminuée. Un délégué CGT dit à ce moment, en parlant de cette proposition, que « c’était dangereux car on risquait de faire supprimer la prime ». Jeudi matin avant la réunion du CE. [Comité d’entreprise], notre section distribuait un tract dans lequel elle invitait tous les syndicats et tous les travailleurs de l’usine à manifester au cas où l’annonce faite dans la journée du montant de la prime attesterait sa diminution. Nous avons été les seuls à faire cette propagande, mais comme la suite des évènements nous l’a prouvé, c’est parce que nous étions les plus près des préoccupations des travailleurs et que nous avons le mieux su tenir compte de leurs réactions. Et cela, grâce à un travail systématique que nous effectuons depuis cinq ans dans l’entreprise à l’aide du bulletin, et à l’aide notre activité syndicale depuis trois ans. Nous représentons aux élections de l’année dernière près de 30 % des suffrages contre 61 % à la CGT et 9 % à la CFDT.

Dès que le chiffre de la prime fut connu, l’indignation se fit entendre. La réunion du CE se termina vers midi, il fallut attendre 15 heures pour avoir la réponse de la CGT à la proposition de débrayage que nous avions faite. Entre temps, de nombreux ouvriers demandèrent aux délégués CGT ce qu’ils attendaient. Une assemblée fut convoquée par tous les syndicats pour le lendemain 9 heures. Il n’y eut pas besoin de tract pour cela et 95 % des ouvriers y furent présents.

Manifestation au siège de Motobécane

A partir de là, tout se déclencha assez rapidement. La proposition que nous avons alors faite d’aller à la direction de la Poly immédiatement, fut d’emblée réalisée par la masse des ouvriers. Après avoir fait huer le directeur qui tentait d’expliquer que si la prime passait sous le nez des ouvriers, ce n’était pas de sa faute car la prime résultait d’un calcul, nous avons proposé d’aller manifester au siège de Motobécane à Pantin, rue Lesault. Car nous faisons partie du trust MB, nous fabriquons les moteurs des Mobylettes qui sont montés dans les usines de Saint-Quentin où travaillent 2 700 ouvriers. Jusque-là et depuis trois ans, le PDG. de MB, Noblet, était le même que celui de la Poly. Et la prime en question était identique dans toutes les usines du·trust.

Vote de la grève illimitée et de l’occupation de l’usine

Après avoir été reçus par le PDG, qui refusa notre revendication, nous avons parlé de grève illimitée sans toutefois demander aux travailleurs de se prononcer immédiatement. De retour à l’usine, il n’était pas question de reprendre le travail et il fut décidé une consultation du personnel pour lundi. La CGT demandait alors que la consultation se déroule pendant que le travail aurait repris. Elle n’eut pas gain de cause sur cette question. Par contre nous avons accepté que trois questions soient posées : êtes-vous pour la grève illimitée, pour la grève limitée, et autres propositions. Nous avons obtenu que l’on fasse voter séparément le deuxième collège.

Les résultats donnèrent 56 % des ouvriers pour la grève illimitée et 27 % pour des débrayages limités sur le collège ouvrier, et 52 % pour la grève illimitée si l’on ramenait cela sur l’ensemble des deux collèges. Les représentants CGT et CFDT présentèrent cela sans enthousiasme, et ce fut moi qui en tant que représentant de la section FO proclama la grève illimitée et fit voter sur l’occupation de l’usine.

Dans l’après-midi, malgré l’hostilité de la CGT et de la CFDT, nous entraînâmes la quasi totalité des grévistes en un cortège qui parcourut d’abord les ateliers et fit débrayer quelques-uns des rares ouvriers qui étaient au travail, puis ensuite les bureaux dont plus de la moitié rejoignirent les grévistes. La grève avec occupation fut alors annoncée à la direction qui demanda aux délégués de s’engager à laisser travailler ceux qui le demanderaient. Ce que tous acceptèrent, sauf le représentant de FO qui refusa de répondre.

Le lendemain matin, nous avions fermé les portes pour ne laisser entrer que les grévistes. Mais un délégué CFDT, aidé par un délégué CGT, avait ouvert la porte et avait laissé entrer une cinquantaine de ceux qu’un camarade surnomma par la suite « les Versaillais ».

Sur mon intervention, les autres ne purent entrer malgré les vitupérations du directeur de la production, à qui il fallut faire un barrage physique pour l’empêcher d’ouvrir les portes. Les non-grévistes étaient composés essentiellement de cadres et d’employés et d’un tout petit nombre d’ouvriers. La direction les fit revenir quotidiennement devant l’entreprise par la suite, mais ils se découragèrent rapidement et leurs rangs devinrent de plus en plus clairsemés. Car à dater de ce jour, plus personne de la Poly ne travailla dans l’entreprise. Les cinquante qui étaient entrés le premier jour furent échangés par un marchandage avec la direction. Elle demandait qu’une dizaine de techniciens de l’entreprise « Carter », qui travaillent habituellement là, puissent entrer. Le comité de grève trancha en demandant l’échange, ce qui fut accepté par la direction.

Grève de la Polymécanique de 1971

Le Comité de grève

Car il y avait un comité de grève. Nous avions proposé qu’il se constitue par l’élection d’un ou plusieurs délégués par équipe ou par atelier. Il se constitua de manière différente, mon camarade vous en parlera tout à l’heure.

La grève ainsi mise en place, avait suffisamment de garanties pour pouvoir durer.

Dès la fin de la semaine, tous les délégués étaient convoqués devant le tribunal des référés, statuant en procédure d’urgence pour prononcer éventuellement un arrêté d’expulsion. Nous y sommes allés afin de retourner la manœuvre du patron contre lui. Nous nous y sommes présentés en accusateurs et non en accusés. J’expliquai le pourquoi de nos revendications. Comme dans les attendus de l’accusation figurait le reproche que seule une minorité avait décidé la grève, puisqu’il n’y avait eu que 700 votants sur un effectif de 1166, et que 52 % seulement s’étaient prononcés pour la grève illimitée, je rappelai qu’aux élections présidentielles il y avait eu 25 à 30% d’abstentions, que celui qui siège aux plus hautes fonctions de l’Etat n’avait eu que 33 % des suffrages exprimés, et qu’il n’était pourtant venu à l’idée de personne de le traîner devant un tribunal. A la question de savoir pourquoi nous occupions l’usine, que posa le tribunal, je répondis que la grève avait été décidée démocratiquement et qu’il n’y avait pas de raison qu’une minorité empêche la majorité de réaliser ses décisions.

L’avocat stalinien s’en prend aux étudiants « …à cheveux longs… »

Ce ne fut pas le langage de l’avocat stalinien qui parla au nom de la CGT. Il présenta les revendications de façon misérabiliste, disant entre autres que « nous luttions pour que nos enfants aient un peu plus de pain à table », parlant du sacrifice que faisaient les délégués en militant, bref avec une argumentation qui n’aurait sûrement pas passé la rampe devant les ouvriers de la Poly. Mais le comble, c’est les raisons qu’il donna de l’occupation. Il fallait selon lui que les ouvriers « gardant l’outil de travail d’aujourd’hui préservent la fortune de demain ». Il y avait de quoi faire pleurer de rire un O.S. de père en fils. Mais cela n’est pas tout, c’était aussi pour empêcher « quelques jeunes à cheveux longs et crasseux de venir faire des dégâts de ceux qui comme chez Renault viennent en Rolls Royce (qu’ils laissent à quelques rues de distance), donner des conseils aux ouvriers ». J’en passe et des pires.

Le tribunal d’ailleurs prit une décision dilatoire, celle de nommer un expert huissier pour vérifier dans quelles conditions se faisait l’occupation. On n’a jamais vu ce dernier. La direction a fait appel, et le jugement devait avoir lieu le lendemain de la fin de la grève. De toutes façons, les avocats avaient trouvé la procédure permettant de remettre le jugement à quinzaine.

L’argumentation de l’avocat stalinien devint par la suite sujet à plaisanteries dans l’entreprise. Par exemple le secrétaire de l’union locale CGT Maisonnave, qui a les cheveux longs, a plusieurs fois suscité la réflexion : « Tiens, un étudiant ! ». Ou bien quand un ouvrier dit devant un délégué CGT qu’il y avait un gars à cheveux longs, pas de l’usine, qui rôdait, un autre demande : « Mais est-ce que ce n’est pas Maisonnave ? ».

Les camarades de Saint-Quentin se mettent en grève

Le fait marquant de la deuxième semaine de grève, ce fut l’entrée en lutte des camarades des usines de Saint-Quentin. Cela influença le moral des ouvriers. A la fin de la semaine précédente, le comité de grève avait envoyé des équipes de la Poly avec un tract à Saint-Quentin, et l’accueil avait été assez chaleureux.

La grève à Saint-Quentin commença huit jours plus tard que la nôtre et se termina près d’une semaine avant, mais elle nous fut d’un secours moral précieux. Nous n’avons eu que des contacts très indirects avec Saint-Quentin, puisqu’ils passèrent par le canal syndical, car nous n’avions par la suite plus de forces à consacrer à une liaison directe. Nous avions besoin des meilleurs camarades sur place pour faire les quêtes, pour organiser l’occupation, et surtout pour discuter et soutenir le moral des ouvriers que les militants staliniens tentaient de miner en se faisant les porte-voix de ceux qui, comme dans chaque grève, sont prêts à abandonner dès les premières souffrances. Et celles-ci commencèrent dès la fin de la première quinzaine, quand les ouvriers qui étaient tous partis avec une paye en poche, durent se passer de la suivante.

« Noblet, si tu continues, les gars de la Poly te botteront les fesses »

Il y eut des secours distribués par les mairies de gauche à leurs habitants grévistes, et pour ceux qui habitent dans des municipalités de droite c’est avec le résultat des collectes qu’ils furent soutenus. La mairie de Pantin fournit des repas et le prix de la cantine fixé au départ à 2,50 francs sans la boisson, fut ramené à 1,50 franc. Personne ne creva de faim, mais ni les tiers provisionnels ni les loyers ni même les traites n’ont été payés par nombre d’entre nous.

Au moment où le moral était un peu plus bas, à la veille du pont de l’Ascension, alors que le patron n’avait plus donné signe de vie depuis une douzaine de jours, la CGT proposa d’aller faire une démarche à l’inspecteur divisionnaire du travail. Nous y étions opposés, mais les ouvriers présents étaient partisans de cette démarche pour demander de nouvelles discussions. Après avoir donné notre point de vue, nous nous sommes pliés à la volonté des ouvriers.

Par contre un certain nombre de manifestations auxquelles nous avons participé ont contribué à réchauffer le climat dans l’entreprise, même si peu nombreux, parmi les grévistes, furent ceux qui y participèrent. Ils revinrent suffisamment enthousiastes à l’usine pour communiquer leurs impressions aux autres. Ce fut le cas de la manifestation du 14 mai dans la métallurgie, ainsi que celle sur la retraite le 27 mai. Entre temps, au lendemain du week-end de l’Ascension, en réponse aux lettres individuelles de la direction demandant à ceux qui voulaient reprendre le travail de voter par retour du courrier, nous avons fait une manifestation au siège où nous sommes allés à plus de 200 en chantant : « Noblet, si tu continues, les gars de la Poly te botteront les fesses » et en scandant nos revendications et « Ce n’est qu’un début continuons le combat ».

Romain en avant et à droite, en tête de la manifestation des grévistes de la Polymécanique (en 1971).

Certains des jeunes immigrés avaient dès le début de la grève largué leur hôtel et élu domicile à l’usine

C’était un début de semaine, et il y avait, comme à chaque fois, plus de monde que d’habitude. Ceux qui étaient là, qui pour beaucoup ne venaient guère dans la semaine, étaient de plus chauds partisans de la continuation que ceux influencés par les staliniens qui venaient plus souvent. Mais que ces derniers démoralisaient en râlant tout le temps dans le style : « Il n’y a encore personne pour monter la garde cette nuit », ou alors « C’est toujours les mêmes qui se tapent le boulot », ou encore en comptant leurs heures de présence comme s’ils étaient au boulot. Heureusement qu’il y avait les révolutionnaires pour être de bonne humeur et pour qui la grève, loin d’être une corvée, fut une partie de plaisir. Ce qui ne les empêcha pas de prendre souvent une part plus grande que les staliniens à toutes les tâches que nécessitait l’occupation. Et pour les jeunes dont notre groupe est composé en majorité, on passait d’aussi bons week-ends à l’usine que bien d’autres en dehors. Parmi les jeunes immigrés, certains avaient dès le début de la grève largué leur hôtel et élu domicile à l’usine. On chantait, on jouait, on discutait entre copains, c’était tout de même bien mieux que le train-train quotidien métro, boulot, dodo.

Dans l’ensemble le moral était bon. La preuve, la Direction ne reçut que 244 réponses à ses lettres individuelles alors que le comité de grève en ramassa environ 500, que les ouvriers avaient ramenées au lieu de les renvoyer à la -direction. Si bien que la direction fut bien obligée de reculer. Cela se fit par étapes.

Plus on tenait, plus le patron lâchait

La première semaine elle proposa de supprimer l’augmentation de 3 % et de la remplacer par une prime égale à 1,75% sur le salaire de l’année précédente. La deuxième semaine elle proposa de payer 3 % avec effet rétroactif au premier janvier 1971. Puis plus rien pendant treize jours. Ensuite, elle proposa une répartition uniforme de ces 3 % rétroactifs, ce qui donnait 240 F pour tous et une somme de 250 F remboursable en cinq mois. Puis toujours la même prime, mais 100 F non remboursables et 150 remboursables. Puis 150 remboursables et 150 non remboursables. Chaque offre nouvelle incitait un peu plus les staliniens à pousser à faire voter pour la reprise, mais renforçait aussi un peu plus les ouvriers les plus combattifs car elle faisait la preuve que plus on tenait, plus le patron lâchait et que tout ce qu’il déclarait impossible l’était devenu avec un mois de production en moins.

Nous en étions là à la fin de la quatrième semaine de grève. A plusieurs reprises, les ouvriers repoussèrent les tentatives des dirigeants CGT de faire un vote car ils se souvenaient des manigances de 1968 qui avaient permis, à l’aide de deux votes successifs, de faire reprendre le travail en faisant voter y compris les cadres qui n’avaient jamais été grévistes.

Le lendemain de la Pentecôte, les dirigeants CGT se déconsidérèrent complètement, et quand ils parlèrent de consultation, les ouvriers scandèrent nombreux « Non, non, pas de vote ». Le lendemain, les dirigeants CGT changèrent de position et la Direction n’allait pas tarder à en faire autant. Les délégués furent convoqués pour assister en observateurs au comité d’entreprise de Motobécane. A Saint-Quentin le lendemain du week-end de Pentecôte, la CGT avait fait reprendre ceux de l’usine de montage des vélos. Au montage des Mobylettes elle n’avait pas réussi à faire reprendre le travail entièrement : la moitié des ouvriers était encore en grève ; les cadres, la maîtrise et les techniciens ainsi que les employés n’avaient pratiquement jamais arrêté le travail, la prétendue liberté du travail ayant toujours été respectée à Saint-Quentin.

Noblet : « … si la grève ne se termine pas à la Poly, je donnerai ma démission de PDG… »

A la mécanique, il restait 80 grévistes sur 300 ouvriers. La situation ne se présentait donc pas de façon brillante, Noblet fit le chantage suivant : « Je fais des propositions pour Saint-Quentin, celles que je ferais demain pour la Polymécanique seront du même ordre ; si la grève ne se termine pas à la Poly, je donnerai ma démission de PDG de la Poly. Et cela signifiera que le travail dans cette entreprise sera moins assuré car MB pourra alors chercher des sous-traitants qui lui reviennent moins cher ».

Pour Saint-Quentin, il proposa pour l’essentiel la prime de 240 F et une prime de reprise de 100 F et 250 F remboursables. Ce qui fut accepté par les délégués de Saint-Quentin. Les nouvelles propositions que fit Noblet le lendemain étaient sensiblement les mêmes que celles de la semaine précédente.

…Noblet démissionne…

Nous avons alors refusé et il nous a annoncé sa démission. La CGT était consternée. Pas nous. Dans les manifestations et dans l’usine nous chantions : « Noblet, salaud, Poly aura ta peau ». C’était fait. De plus nous avons expliqué qu’un changement de bonhomme préparait un changement de politique et annoncerait un nouveau recul de la direction. Nous ne nous étions pas trompés, et l’après-midi même, la direction nous faisait de nouvelles propositions. La discussion dura encore un jour pour aboutir à un accord entre la CGT et la direction pour organiser un vote sur les propositions suivantes :

…Les nouvelles propositions de la direction

Une prime uniforme de 260 F. L’augmentation de 3 % est maintenue avec un minimum de 30 centimes ce qui fait 12 centimes supplémentaires pour l’O.S. La garantie que par des augmentations trimestrielles non hiérarchisées, l’équivalent de la prime de l’année dernière sera distribuée sous forme d’augmentation de salaire l’année prochaine. La prime de vie chère est améliorée et devient non hiérarchisée.

Sur ces points on peut déjà dire qu’en ce qui concerne la revendication qui fut au départ de la grève, nous avons eu gain de cause. Les 260 F plus 1’ augmentation qu’apporte pour l’O.S. le plancher à 30 centimes apporteront dans l’année l’équivalent de la prime de l’année dernière. Quant aux années suivantes, elle nous est garantie dans le salaire. Mais en ce qui concerne le paiement des heures de grève, le résultat est maigre : 200 F de prime de reprise, le paiement de 3 jours fériés, le paiement de la première journée de grève, et la neutralisation de la grève sur certaines primes élève le montant à 450 F maximum pour l’O.S. pour plus de 5 semaines perdues.

C’est pourquoi nous avons refusé ainsi que la CFDT de faire un vote, persuadés que la direction aurait encore reculé sur ce terrain devant la fermeté des syndicats et des ouvriers. Nous nous sommes décidés à appeler à voter contre la reprise car nous n’avions plus les moyens de faire boycotter le vote, beaucoup d’ouvriers considérant maintenant que la grève était gagnée. On laissait rentrer les « Versaillais ». Même les cadres revenaient visiter leurs bureaux avant le résultat du vote. Ainsi pour le directeur dans le bureau duquel j’étais installé.

Une grève gagnée

Nous aurions pu obtenir plus, mais nous pouvons dire qu’effectivement nous avons gagné. Les secours qui pour beaucoup d’entre nous auront atteint 200 francs, ainsi que l’avance de 250 F remboursable en cinq mois, permettront que les conséquences de la grève soient relativement rapidement atténuées.

Le fait qu’un quart des ouvriers aient encore voté contre la reprise montre aussi au patron qu’il subsiste une importante minorité consciente que seule la lutte paye et consciente du rôle que jouent les appareils bureaucratiques. Le patron n’est sûrement pas près d’oublier que toucher à nos acquis, si petits soient-ils, peut lui coûter très cher.

Nous sortons donc de cette grève que nous avons provoquée et maintenue pendant 36 jours, avec un bilan positif tant pour les ouvriers de la Poly que pour notre organisation dans cette entreprise.

Grève de la Polymécanique de 1971 : Romain au centre, au premier rang du cortège des grévistes (blouson noir)

Partie 2

Transcription du récit oral d’un autre camarade de l’usine

Selon les faibles commentaires que la presse a bien voulu accorder à la grève de la Poly, et en particulier le Monde, le mouvement aurait été dirigé par les militants de notre tendance, syndiqués à FO. S’il est vrai que la section FO-Polymécanique est animée par nos camarades, il est aussi vrai (et la presse l’a passé sous silence) que d’autres militants de LO sont à la CGT. Moi-même, je suis syndiqué à la CGT, et malgré l’hostilité des bureaucrates à nos idées, nous nous efforçons, mes camarades et moi, de nous exprimer et d’imposer la démocratie dans le syndicat.

Cela n’est pas toujours facile, et durant la fin de la grève, les discussions au sein de la CGT ont été vives, les staliniens essayant de nous évincer de toute activité. Je vais essayer de vous expliquer quels ont été, tout au long de la grève, les rapports entre staliniens et militants révolutionnaires.

Les camarades de Renault vous qui ont relaté le déroulement de leur grève et leurs rapports avec le PCF ont montré comment les staliniens « cohabitaient » avec les révolutionnaires à l’intérieur de l’usine. Les multiples tentatives d’intimidation et les provocations nous ont permis d’apprécier les méthodes qu’emploient les partisans de « la démocratie avancée » lorsqu’il s’agit des révolutionnaires. Ces messieurs préfèrent se servir de leurs poings plutôt que de tolérer à l’intérieur de l’usine un courant qui remet en cause leur attitude et dénonce leur rôle démobilisateur.

Mais durant les trente six jours qu’a duré notre grève à la Polymécanique, c’est tout le contraire qui s’est produit. Les staliniens ont du tolérer et même à bien des reprises suivre le courant révolutionnaire qui existait dans l’usine. Pas une seule fois durant toute la grève, les militants du PCF n’ont pu servir le traditionnel couplet anti-gauchiste que nos camarades d’entreprise connaissent si bien. Non seulement ils n’ont pas pu nous évincer du mouvement, mais à bien des reprises, ils ont dû sous la pression des ouvriers, reprendre nos solutions, se ranger à notre avis, même si c’était sans grand enthousiasme.

Le respect de la démocratie ouvrière imposé par les révolutionnaires

La cause principale de cette cohabitation est de toute évidence la profonde démocratie dont toute la grève de la Poly a été empreinte. Le respect de la démocratie ouvrière imposé par les révolutionnaires a permis de mener à son terme une grève qui, si l’on avait laissé faire les staliniens, n’aurait jamais eu lieu. Notre première victoire fut la constitution du comité de grève. Pour notre part, nous étions pour un comité de grève élu par l’ensemble des ouvriers et dont chaque membre, choisi par ses camarades de travail, représenterait un secteur de l’usine. Dans les faits, ce sont les travailleurs les plus combattifs qui se sont retrouvés chaque jour au comité de grève, bien que pour la plupart non élus directement par leurs camarades. Les 44 membres représentaient tout de même tous les courants de pensée et tous les secteurs de l’usine, y compris les bureaux.

Le fonctionnement démocratique du comité de grève et sa capacité à prendre des décisions, l’ont finalement imposé aux staliniens, ceux-ci ne cachant pas leur aversion et traitant les réunions du comité de grève de « forums » permanents, quittant les réunions puis y revenant, menaçant de rompre l’unité syndicale, bref jouant les offensés, mais finalement faisant contre mauvaise fortune bon cœur.

Le comité de grève, la meilleure arme

Le comité de grève tout au long du mouvement, a été notre meilleure arme car la réalité bien vivante du comité a diminué d’une façon considérable la force de l’appareil CGT qui d’habitude pèse de tout son poids dans la conduite du mouvement, influant la plupart du temps vers une reprise rapide du travail, et empêchant l’expression d’opinions opposées. Et même lors de questions très importantes, lorsque le comité de grève ne pouvait décider, c’était devant les travailleurs que se tranchaient les questions, ce qui garantissait de toutes façons le respect de la démocratie. Parallèlement, la tenue quasi journalière d’assemblées générales des grévistes, permettait d’avoir un contact permanent avec l’ensemble des ouvriers.

L’exemple le plus frappant du rôle du comité est la détermination de la plateforme revendicative. Les dirigeants CGT de la Poly avaient eu une réunion avec les dirigeants CGT de Saint-Quentin où se trouve l’usine de montage des « Mobylettes ». Ils avaient déterminé ensemble une augmentation de salaires de 6 %. Mais une fois devant le comité de grève, hormis les staliniens, personne n’était d’accord pour les augmentations en pourcentage. Puisque nous ne pouvions nous mettre d’accord, au comité de grève le secrétaire FO demanda que ce problème soit jugé par les travailleurs. La direction CGT accepta, mais deux heures après, avant l’assemblée générale, elle revenait nous voir en disant qu’elle était d’accord et acceptait les 0,60 F pour tous.

Existence d’un courant révolutionnaire dans l’usine depuis 5 ans

Si les révolutionnaires ont pu à maintes reprises diriger et orienter la grève, ce n’est pas seulement à cause des solutions qu’ils préconisaient, mais aussi grâce à leur implantation parmi les travailleurs. En effet, l’existence d’un courant révolutionnaire animé par des camarades de notre tendance, et leur activité dans l’entreprise depuis cinq ans, a permis que les idées des travailleurs les plus combattifs sur le rôle des syndicats, ou sur la poursuite du mouvement, se cristallisent et s’expriment, et ceci a pu se vérifier tout au long du mouvement, mais particulièrement à deux reprises.

Le jour du début de la grève le responsable CGT proposait une consultation sur les lieux de travail ! Alors que le représentant FO proposait d’aller réclamer notre dû au patron. Or si FO n’avait pas été là, les ouvriers très en colère ce jour-là, seraient rentrés au travail pour signer une pétition, alors que là, les révolutionnaires ont concrétisé sur le champ le mécontentement des travailleurs en les appelant à manifester. L’autre exemple est aussi significatif. A la fin de la quatrième semaine de grève, il était évident que les dirigeants de la CGT voulaient par un vote faire reprendre le travail, et du jeudi au mardi suivant, tous les gens du PCF ne parlaient que de consultation. Il a fallu que nos camarades, ainsi que certains CFDT, fassent une propagande intense contre le vote pour que les staliniens reculent devant la détermination des ouvriers. Et durant ces jours, il arrivait fréquemment que les travailleurs interrompent en assemblée générale les orateurs cégétistes, leur signifiant leur désaccord avec de telles méthodes. On peut voir par là que si notre grève a duré plus de cinq semaines, ce n’est pas grâce aux gens du PCF, mais bien grâce aux « gauchistes » présents dans l’usine. Et non seulement ils étaient là jour et nuit, mais nous pouvons dire que l’usine, nous l’avons occupée aussi nombreux et parfois même plus que les staliniens, car nombre de jeunes, d’immigrés les plus actifs occupaient avec les « gauchistes » parce que c’était plus marrant.

Tous les soirs de petits groupes, parfois avec guitare, passaient agréablement les heures de garde sans que l’occupation soit vraiment ressentie comme une corvée ; et durant les week-ends, c’ est encore nous qui organisions les loisirs : orchestres, cinéma ou artistes ont distrait les ouvriers et leur famille venus à l’entreprise durant les fins de semaine.

Maintenir l’unité des travailleurs

Une autre de nos principales préoccupations, fut notre constant souci de maintenir l’unité des travailleurs durant tout le mouvement. En effet les arguments classiques des staliniens tendent toujours à nous présenter comme des diviseurs ou des gens qui s’appuient sur une minorité pour déclencher l’action. Or nous pouvons dire que dans notre grève, si à bien des reprises nous nous sommes trouvés à la tête du mouvement et soutenus par les ouvriers, nous n’avons pas rejeté les staliniens en les accusant des pires méfaits ; nous avons critiqué leurs positions et ceci sans concessions, mais nous avons essayé aussi de les rallier à nos solutions, afin que les ouvriers ne pensent pas que les « gauchistes » brisent l’unité et ne sont là que pour diviser. Les révolutionnaires ont fait la preuve qu’ils savaient non seulement déclencher un mouvement mais aussi le mener à son terme, sans s’écharper à tous propos avec les staliniens. Nous ne nous faisions pas d’illusion sur 1’ attitude des dirigeants staliniens et nous les considérions pour ce qu’ils sont, prêts à vendre la grève pour des miettes et démoralisant constamment les ouvriers.

Finis, les petits ronrons habituels autour du tapis vert

Nous les avons poussés l’épée dans les reins, car cette grève, ils n’en voulaient pas, et d’ailleurs, l’un d’entre eux a exprimé clairement qu’ « il en avait marre de faire la grève pour LO ». Cependant les « gauchards’’ comme ils disent avec mépris, ne sont pas étrangers au mouvement ouvrier, n’en déplaise à Séguy – ils ne « pissent » pas « sur les tombes » – , mais ils sont capables d’organiser la lutte face au patronat et de faire triompher les revendications des ouvriers. Ils sont capables d’organiser et de faire vivre un mouvement, de se faire accepter malgré toutes les calomnies, comme dirigeants ouvriers. Les révolutionnaires à la Poly, ce n’est pas seulement quelques enragés, partisans de la grève pour la grève, mais c’est surtout des dizaines d’ouvriers qui prenaient conscience que les petits ronrons habituels autour du tapis vert, ça ne suffit pas et que lorsque le patron leur enlève une semaine de salaire, et bien, ils ne disent pas  »merci patron" mais font trente six jours de grève avec occupation et rentrent la tête haute conscients de leur force.

A ce titre d’ailleurs, je voudrais citer deux exemples qui illustrent le souci d’unité dont nous avons fait preuve. Le patron n’était pas venu depuis treize jours à l’entreprise, et tous les ouvriers s’inquiétaient sur la poursuite des négociations. L’union locale de Pantin demanda une entrevue avec l’inspecteur du travail pensant ainsi « forcer » le patron à négocier. Ne nous faisant pas d’illusions sur cette démarche, avons déclaré que nous étions contre. Mais les ouvriers préférant que l’on s’y rende, par souci d’unité, nous y sommes allés, et bien sûr cette réunion n’a rien donné.

Ensuite au moment où les dirigeants CGT voulaient organiser un vote, nous avons été violemment contre, ainsi que les ouvriers. Mais lorsqu’au bout de quatre jours les staliniens ont changé leur fusil d’épaule, et ont au contraire poussé à la lutte, nous ne les avons pas enfoncés en dénonçant leur opportunisme, mais nous les avons soutenus pour faire ensemble la cinquième semaine de grève.

L’activité des révolutionnaires dans la CGT

Ces quelques propos sur notre mouvement seraient incomplets si je ne parlais pas de l’activité des révolutionnaires dans la CGT. En effet à bien des reprises, la présence des « gauchistes » dans la CGT a influé favorablement pour battre en brèche les reculs incessants de 1’ appareil CGT. Notre influence au sein de la CGT est bien sûr loin d’être majoritaire, et il serait faux de dire que les staliniens n’ont plus d’influence et que sous prétexte qu’il y a des gauchistes à la Poly, les bureaucrates rasent les murs. En effet, les staliniens c’est un appareil, mais c’est d’abord tout un réseau de militants et de sympathisants honnêtes propageant les idées du PCF, et encore maintenant, c’est surtout les staliniens qui contrôlent le mouvement ouvrier et qui organisent les plus conscients. L’implantation des révolutionnaires est loin de concurrencer sur ce terrain le PCF, et si au cours du mois de mai, les directions syndicales ont pu freiner le mouvement, c’est bien qu’ils se sentent forts et jouissent d’une impunité presque totale. Mais pourtant à la Poly, notre présence et notre activité dans la CGT ont influé sur leur comportement, parce que justement, ils se sentaient contestés au sein même de leurs organisations. Au début du mouvement, après l’annonce du montant de la prime de bilan, nos camarades syndiqués à la CGT ont été voir les délégués pour organiser la riposte. Peut-être alors, s’il n’y avait eu que FO pour proposer un débrayage, n’auraient-ils rien fait, et de les avoir contraints de bouger, c’était déjà une première victoire. Ensuite tout au long du mouvement, à l’intérieur des assemblées de syndiqués, nous sommes intervenus pour défendre le point de vue des révolutionnaires, alors que les staliniens essayaient de brader la grève.

Déjà au cours de la première réunion CGT, le secrétaire de l’Union locale ne voulait pas de non-syndiqués dans le comité de grève. Il ne voulait même pas de comité du tout prétextant à propos des syndiqués  : « ils payent leurs timbres, ce n’est pas pour rien ». Nous nous sommes élevés contre et nous avons fait circuler une liste pour s’inscrire au comité. Ensuite au bout de la troisième semaine, le secrétaire de l’union départementale vint nous dire « qu’il faut avoir les pieds sur terre » et que pour finir la grève au plus vite, il fallait abandonner purement et simplement le paiement des heures de grève. Là non seulement nous nous sommes élevés contre, mais la grande masse des syndiqués a protesté, et le permanent est reparti avec ses « propositions constructives ».

A la fin de la grève le petit groupe que nous formions était à l’index, et les staliniens nous reprochaient déjà d’être « dans la bande à FO », ceci à la suite d’un incident aux portes, lorsque le responsable PCF de la Poly avait enfoncé le piquet de grève pour faire rentrer les non-grévistes, chose que nous avons dénoncée en assemblée générale. Aussi à la réunion suivante, où on ne nous avait pas convoqués mais où nous sommes venus quand même, lorsqu’un camarade intervint pour s’élever contre la proposition de vote, les bureaucrates s’opposèrent hargneusement à ses arguments. Pourtant une partie de l’assistance exprima son accord avec nous. En somme, à chaque réunion CGT, notre présence a permis que les staliniens ne vendent pas la grève pour un plat de lentilles, puisqu’à chaque fois les décisions qu’ils comptaient faire adopter pour s’en prévaloir devant les ouvriers, nous les avons combattues et même quelquefois vaincues.

Pour que la fraction stalinienne ne s’accapare pas le monopole du syndicat

Même pour certains problèmes tels que la solidarité, nous avons réussi à leur faire adopter nos positions. En effet, après quatre semaines de grève, les staliniens refusaient toujours d’étendre les collectes aux entreprises hors de Pantin. Or le mardi nous avions été collecter chez Rateau. Les staliniens de cette entreprise refusèrent de donner aux collecteurs et propagèrent des calomnies honteuses sur notre grève dans leur entreprise. C’est donc avec le seul soutien de la CFDT chez Rateau que la collecte fut faite. Ecœuré par ces procédés, de retour à la Poly, nous avons été voir les délégués CGT réunis en petit comité. Devant nos protestations contre de telles méthodes, ils ont été obligés de rectifier le tir et une semaine plus tard, ils ont finalement accepté d’étendre la solidarité à tout le département et cela après trente trois jours de grève. On voit là combien leur désir d’aider1es grévistes était grand, sans doute pensaient-ils comme un dirigeant CGT de chez Rateau que l’argent irait à la fête de LO.

Ces quelques exemples nous ont donc montré que finalement, le fait que des révolutionnaires soient à la CGT nous a permis d’intervenir jusque dans le fief du PC et que cela a influé pour une part certaine dans la conduite de la grève. Maintenant avec les camarades CGT qui au cours de la grève nous ont appuyés, nous comptons bien aller demander des comptes aux bureaucrates, et il est certain que nous ne nous laisserons pas faire. Puisque le syndicat est l’arme des travailleurs, nous lutterons pour que la fraction stalinienne ne s’accapare pas le monopole du syndicat, et que la démocratie s’y installe.

Les enseignements de cette grève sont nombreux pour nous. Mais quoi qu’il en soit, nous pouvons dire ce soir, que les révolutionnaires ont pesé de tout leur poids sur la conduite du mouvement et qu’ils ont fait la preuve de leur aptitude à diriger les luttes, pas avec des théories fumeuses, mais en avançant des idées conformes aux intérêts des travailleurs. Nous avons prouvé que le courant révolutionnaire, s’il sait se faire accepter par les travailleurs, peut se développer dans l’entreprise et s’y implanter définitivement. Pour nous militants et sympathisants de Lutte Ouvrière, nous avons gagné une audience considérable et nous avons provoqué des remous jusque dans la CGT qui ne pourra plus répandre autant de calomnies sur notre compte et désormais compter un peu plus avec nous, et cela aussi c’est une victoire.

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