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La Libye, un vieux prestataire de service

mercredi 13 décembre 2017

2004 : Le programme de la Haye, signé par 25 pays européens, officialise l’externalisation de la gestion des demandeurs d’asile vers le Maghreb ou le Moyen-Orient. C’est, dans les faits, déjà le cas depuis 2000. Les camps libyens sont directement financés par le ministère de l’Intérieur italien sous mandat européen. Ces véritables camps de concentrations sont gérés par Kadhafi.

2007 : Les marines italienne et libyenne officialisent leur collaboration pour que les rescapés récupérés par l’un ou l’autre soit envoyés dans les camps. La même année Sarkozy est élu en ayant probablement bénéficié de fonds fournis par Kadhafi par l’intermédiaire d’un porte-valise de l’UMP.

2011 : Les révolutions arabes touchent la Libye et le gouvernement de Kadhafi entre en guerre contre le « Conseil National de Transition libyen » qui est partiellement issu de l’État de Kadhafi. La France change de camp et intervient contre Kadhafi qu’elle fait exécuter sommairement après avoir bombardé les principales villes. Parallèlement, elle distribue de très grandes quantités d’armes, principalement à des mercenaires.

2012 : En Libye, c’est le chaos. Les camps de migrants sont gérés par des bandes armées issues de l’ancien appareil d’État que rien ne distingue plus des mafias, si tant est qu’on pouvait les distinguer auparavant. Les milliers d’armes distribuées en Libye et l’emploi de mercenaires touareg contribuent à étendre la guerre au nord du Mali, zone revendiquée par les séparatistes touareg du Mouvement national pour la libération de l’Azawad. À la faveur d’un coup d’État au Mali qui affaiblit l’armée malienne, ce mouvement fusionne avec le mouvement salafiste Ansar Dine et proclame l’indépendance de l’Azawad. C’est le début de l’intervention française au Mali dans une guerre qui entraîne d’importants déplacements de populations dont une partie va se retrouver dans les camps libyens. Aujourd’hui, l’armée française est toujours déployée, dans le cadre de l’opération Barkhane, non seulement au Nord du Mali mais dans une zone qui s’étend à l’est jusqu’au Tchad et implique non seulement le Mali mais aussi la Mauritanie, le Burkina Faso, le Niger et le Tchad (pays qui se sont regroupés en 2014 dans le G5 Sahel pour constituer une force militaire sans grands moyens et qui sert surtout à légitimer la présence des troupes françaises).

2013 : Suite à une condamnation par la Cour des droits de l’homme et à un nouveau naufrage médiatisé faisant au moins 366 morts au large de Lampedusa, la marine italienne lance son propre programme de sauvetage en mer Mare Nostrum.

2014 : Mare Nostrum est remplacé, après moins d’un an, par l’opération Triton gérée par Frontex, l’agence européenne de coopération opérationnelle aux frontières extérieurs. Cette opération, beaucoup moins coûteuse, ne dispose d’aucun bateau de sauvetage et repousse les embarcations de migrants vers les côtes libyennes. Les vedettes de Triton patrouillent et, à leur approche, certains migrants préfèrent se jeter à l’eau plutôt que d’être renvoyés dans les camps. L’opération Triton est toujours en cours…

2015 : L’OIM, l’Organisation internationale pour les migrations, estime que, depuis 2000, il y a eu 22 000 morts en Méditerranée et peut-être le double dans le Sahara.

2016 : L’opération de l’Union européenne Sophia vise à renforcer le financement et l’entraînement des garde-côtes libyens pour qu’ils capturent les bateaux de migrants et les ramènent vers les camps. En juillet dernier, elle a été prolongée jusqu’à la fin de l’année 2018.

2017 : Après le reportage de CNN, le haut-commissaire de l’ONU aux droits de l’homme, le prince jordanien Zeid, affirme que la politique de l’UE en Libye est inhumaine. Une politique tout de même connue depuis longtemps. L’ONU estime à 20 000 le nombre de migrants dans les camps libyens sans que l’on sache comment cette estimation a pu être produite.

Evan Yale

Mots-clés Libye , Migrants , Monde