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Chemins de fer britanniques privés... pas d’accidents !

vendredi 1er octobre 2004

En 1993, le gouvernement conservateur de John Major fait éclater British Rail en une centaine de secteurs indépendants. L’infrastructure ferroviaire est confiée à un monopole privé, Railtrack, qui est chargé d’entretenir les voies et d’attribuer des « sillons » horaires aux transporteurs. 25 sociétés franchisées reprennent le trafic voyageur de British Rail et achètent auprès de Railtrack le droit d’utiliser l’infrastructure.

Pour les usagers, c’est le début d’une longue descente aux enfers. La sécurité est totalement délaissée. Les accidents se succèdent : Southall (1997 : 7 morts), Paddington (1999 : 31 morts), Hatfield (2000 : 4 morts), Selby (2001 : 10 morts)... Pour ne citer que les plus meurtriers. La responsabilité de Railtrack apparaît au grand jour : les voies ne sont plus entretenues. L’accident d’Hatfield s’est produit à cause d’un rail cassé, aucune réparation n’avait été faite. Le groupe privé a préféré reverser des dividendes toujours plus énormes à ses actionnaires, plutôt que d’investir pour rénover l’infrastructure ferroviaire. Du coup, entre 1997 et 1999, l’action Railtrack a augmenté de 400 %. Un humoriste noir a pu dire qu’elle suivait la courbe du nombre de morts.

Les compagnies chargées du transports des voyageurs ne sont pas moins en cause. Beaucoup d’accidents sont causés par des franchissements de signaux d’arrêt, comme à Southall ou à Paddington. Elles ont toujours refusé d’installer des systèmes de sécurité ATP (Automatic train protection) qui permettent d’assurer l’arrêt immédiat du train. Les conditions de travail qu’elles imposent aux conducteurs contribuent aussi à l’insécurité : les salariés travaillent souvent plus de 70 heures par semaine et deux semaines d’affilée sans aucun jour de repos. A un tel rythme, une vigilance de tous les instants devient difficile.

Les compagnies n’ayant pas voulu investir, les voyageurs doivent supporter quotidiennement de nombreux retards et la surcharge des trains, due au manque de matériel roulant. En revanche les tarifs britanniques sont maintenant les plus élevés d’Europe. Ils représentent environ le double des tarifs français, eux-mêmes dans la moyenne du continent.

Mais comme l’affirme sans complexe le « 10 Year Plan-Transport 2010 », un plan gouvernemental chargé de redresser la situation, « la priorité était la réduction des subventions publiques, non l’amélioration et le développement des services » ! Résultats probants ! L’Etat dépense aujourd’hui trois fois plus pour les chemins de fer qu’avant la privatisation (rappelons que la raison de la privatisation était la mauvaise gestion et le coût élevé de l’entreprise publique !). Depuis des années, il paye 80 % des sommes que les transporteurs doivent verser à Railtrack pour l’utilisation du réseau. Il a subventionné Railtrack pour faire les travaux d’entretien nécessaire, après le scandale provoqué par les accidents.

Les travaillistes, revenus au pouvoir, ont bien vite abandonné leur promesse de renationaliser les chemins de fer. Tout récemment, le gouvernement Blair a fait le choix de démanteler Railtrack, mais c’est au profit d’une autre société privée, Network Rail. Bien qu’elle soit officiellement « à but non lucratif », il n’est pas difficile de prévoir qu’elle servira elle aussi à dégager le maximum de profits pour des intérêts privés. Quant aux actionnaires de Railtrack, l’Etat s’est engagé à ce qu’ils ne subissent aucune perte, à ses frais...

Lydie GRIMAL

Mots-clés Cheminots , Monde , Privatisations , Royaume-Uni
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