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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 112, mars-avril 2017

Éditorial

Utopique… disent-ils

Mis en ligne le 5 avril 2017 Convergences Politique

Quand Philippe Poutou défend son programme sur un plateau télé ou derrière un micro, cela ne rate pas. Il y a toujours un journaliste pour lui rétorquer : mais n’est-ce pas utopique ?

Utopiques aujourd’hui, ces mesures d’urgence pour le monde du travail ? Utopiques, l’interdiction des licenciements et des suppressions de postes, le partage du temps de travail entre tous jusqu’à ce que tout le monde ait un emploi ? Utopique qu’il n’y ait pas un salaire inférieur à 1 800 euros net ? N’est-ce pas un minimum que d’avoir un emploi et un salaire (qui est même au dessous du salaire moyen de 2 200 euros) ? S’il fallait cocher la case, comme si souvent on nous y invite, vous diriez quoi de ce programme de 1 800 euros minimum : « très bien », « bien », « passable » ou « insuffisant » (surtout quand on a des gosses) ? Des Marine Le Pen, François Fillon ou autres Bruno Le Roux pensent que c’est parfaitement utopique… de vivre avec si peu ! Et ils trouvent des jobs à leur petite famille, sur des deniers publics, bien mieux payés que cela ! Serait-ce utopique encore, que les salariés de l’automobile, des banques, des transports, des hôpitaux ou du nettoyage, ceux qui font tourner la machine, aillent mettre un peu leur nez dans les comptes de leurs patrons ? Car ce sont surtout les patrons qui nous sortent la rengaine qu’il serait utopique d’embaucher et d’augmenter les salaires !

Utopique, la fin d’un cauchemar ?

Bref, utopique d’en finir avec la gangrène du chômage qui touche en réalité jusqu’à cinq millions de personnes ? Utopique d’en finir avec la plaie des 250 000 SDF dans le pays, dont des milliers de personnes vivant en permanence dans les rues des grandes villes (15 000 dont c’est la situation dite « stable » à Paris) ? Utopique de remettre sur ses pieds une société où huit multimilliardaires possèdent autant que la moitié la plus pauvre du monde ? Utopique d’envisager la fin de l’horreur des guerres qui ravagent le Moyen-Orient et une partie de l’Afrique, et dont la rapacité des trusts des grandes puissances est en grande partie responsable ?

La question qui tue, celle des moyens !

Deuxième cartouche sortie par ceux qui nous reprochent d’être chimériques et ne peuvent pas nier que le programme d’urgence avancé serait un minimum : mais comment vous chiffreriez la dépense ? Comment vous financeriez ? Où trouver l’argent ? Il n’y en a déjà plus dans les caisses de l’État… Taratata…

Bien sûr on peut répondre, on répond d’ailleurs, selon le refrain de nos manifs, que « l’argent il y en a, dans les caisses du patronat ». On donne même des chiffres en millions ou milliards, par exemple ces 100 à 150 milliards d’aide que l’État verse chaque année à un grand patronat richissime (voir les performances du CAC 40), qui pourraient avantageusement financer les postes manquants dans les écoles ou les hôpitaux ; on chiffre ce que la suppression du budget militaire rapporterait pour construire des logements dits « sociaux » et donner ainsi à la fois des logements aux sans-abri et du travail dans le bâtiment… Des chiffres, en voulez-vous ? ? En veux-tu en voilà : par exemple, les 56 milliards distribués en dividendes en 2016 aux actionnaires du CAC 40 auraient permis de créer, en incluant toutes les cotisations sociales, près d’un million et demi d’emplois à 1 800 euros net par mois. Et on en passe.

Mais notre nombre d’or est ailleurs !

Ce n’est pas qu’une question de millions d’euros. L’unité décisive de mesure n’est pas celle-là, selon nous ! C’est en travailleurs, et travailleurs en lutte, qu’il faut compter. L’an dernier contre la loi Travail, on a harcelé pendant quatre mois le gouvernement, mais une fois seulement, et pour un jour seulement un million de travailleurs sont descendus ensemble dans les rues des villes du pays. Cela n’a évidemment pas suffi. Il faut qu’on donne plus, qu’on paie plus ! Avec une grève générale, une vraie de dix millions de travailleuses et travailleurs, on commencerait à sortir de l’utopie et à rendre réalistes nos quelques mesures d’urgence. C’est cela, le coût ou le prix. Et qu’est-ce qu’un ou deux millions en lutte, sur un total de plus de 20 millions de salariés en France ? Sans compter qu’ils entraîneraient derrière eux des centaines de milliers de jeunes, de chômeurs et bien d’autres. Et à ce nombre-là, on pourrait même pousser plus loin l’utopie !

On arriverait à l’imagination au pouvoir !

C’est seulement quand des millions commencent à prendre en main leurs affaires que ce qui apparaissait utopique devient soudain possible, voire une réalité très menaçante pour les classes dominantes. À ce moment-là, la bourgeoisie n’invitera plus les révolutionnaires sur ses plateaux-télés pour les traiter doucereusement de gentils rêveurs… Elle tentera de les enfermer derrière des barreaux comme redoutables bolcheviks ! Ce qui n’y suffira pas si des millions d’exploités et opprimés restent mobilisés, le temps qu’il faut pour l’emporter et que leur colère devient contagieuse et planétaire.

Cela s’appelle une révolution. Comme en France à la fin du XVIIIe siècle, en Russie il y a un siècle, à moindre échelle dans bien d’autres pays et occasions depuis, où le système a été ébranlé si ce n’est encore renversé…

On n’a quand même pas rêvé !

27 mars 2017

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