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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 63, mai-juin 2009

Usine SANDEN (Bretagne)

Usine SANDEN (Bretagne) : 6 mois de chantage et de mise en condition avant licenciements

Mis en ligne le 30 avril 2009 Convergences Entreprises

La multinationale japonaise Sanden Corporation, créée en pleine guerre en 1943, est le numéro 1 mondial de la fabrication de compresseurs pour la climatisation des voitures, avec un effectif d’environ 8 400 personnes pour des usines un peu partout dans le monde et… en Bretagne. Elle s’y est installée il y a 13 ans au milieu des champs, à Tinténiac, dans la « Bretagne Romantique » de Chateaubriand, à mi-chemin sur l’axe Rennes-Saint-Malo.

L’usine s’est implantée à proximité de l’immense usine de PSA La Janais (8 000 salariés) située à une trentaine de kilomètres, l’un de ses principaux clients ; elle fournit aussi Volkswagen, Fiat et Renault. La région autour de Rennes accueille généreusement depuis des années les entreprises japonaises, à coup de grosses subventions publiques (Canon notamment et... Mitsubishi, qui après avoir utiliser ses 10 ans de subventions d’installation à totalement fermé en 2002 en mettant à la porte environ 1 000 travailleurs).

Dureté des conditions de travail, turn-over énorme. La plupart des salariés de l’usine Sanden de Tinténiac sont jeunes, entre 25 et 35 ans. Les salaires y sont plus bas qu’à PSA et l’ambiance y est dure notamment à cause de la politique de flux tendu. Les syndicats ne sont apparus qu’après plusieurs années d’existence de l’usine.

À l’heure de la crise, l’usine Sanden comme beaucoup d’entreprises sous-traitantes de l’automobile, en profite pour se réorganiser.

Automne 2008 : exit les intérimaires 

La direction achève de renvoyer la quasi totalité des intérimaires et CDD qui furent plus de 350 pour environ 848 CDI. Cela, quand PSA mettait à la porte plus de 1000 intérimaires et que d’autres sous-traitants faisaient de même dans la foulée. Pour les milliers de travailleurs précaires du très important secteur de l’automobile rennais, la situation de l’emploi devient très rapidement catastrophique.

Au moment où elle se débarrasse des précaires, Sanden fait ajouter des avenants au contrat des équipes du week-end permettant de les faire basculer en 2/8 en semaine en cas de baisse de la production. Tout en affirmant que cet avenant ne servirait peut-être jamais, elle met la pression sur les salariés pour qu’ils le signent individuellement. Puis la direction décide de mettre fin au contrat avec ISS, l’entreprise de nettoyage industrielle. Pour avril la trentaine de salariés ISS seront tous remplacés par des salariés Sanden. À charge d’ISS de se décarcasser pour leur trouver de nouvelles missions ailleurs…

Début 2009 : exit l’équipe de week-end

Arrive janvier. Dans un premier temps, la direction prend la décision d’appliquer l’avenant : l’équipe du week-end est stoppée pendant 3 mois, la plupart passant en semaine pour la période, le reste mis en chômage partiel qui dure depuis. Dans un deuxième temps, une fois l’équipe de week-end scindée, la direction annonce sa fin définitive. Des salariés qui étaient de week-end depuis des années parce qu’ils avaient une autre activité professionnelle en semaine ou parce qu’ils s’occupaient d’enfants, se retrouvent coincés. Ceux qui refuseront de passer définitivement en semaine avant le 24 mai seront licenciés.

Dans le même temps, la direction annonce son intention de transférer une partie de l’équipe de nuit en 2/8 en appelant au « volontariat ». Tout cela dans un contexte où les jours et semaines chômés payés à 60 % du salaire s’enchaînent depuis décembre.

Mois de mars : un accord pourri

La direction mène des négociations tambour battant pour faire accepter un accord de modulation des horaires de travail. Il s’agit d’éviter de payer le chômage partiel en mettant en place des périodes d’activité haute (pouvant aller jusqu’à 45 h par semaine sur 6 jours, y compris le samedi après-midi, avec des amplitudes atteignant 10 h par jour) et d’activité basse permettant de ne pas travailler de la semaine. Le délai de prévenance pour les horaires de travail ne serait que de 7 jours, voire moins « en cas de force majeure ». Il y aurait annualisation du temps de travail : les heures sups ne seront comptabilisées qu’à la fin de l’année au lieu du mois, d’où une baisse de rémunération pour les salariés.

Le chantage est le suivant : l’accord permettrait – peut être – de garder 40 à 50 emplois à l’unité d’assemblage, et s’il n’est pas signé, la direction en appliquerait un autre encore plus défavorable : celui de la branche métallurgie (la signature d’aucun syndicat de la boite n’étant nécessaire dans ce cas).

L’indignation des salariés est telle que le mercredi 25 mars, date butoir choisie par la direction pour mettre fin aux discussions, tous les syndicats refusent de signer. Fortement contrariée, la direction a dû s’asseoir sur son ultimatum. Petite victoire morale donc, mais de courte durée.

Des négociations reprennent immédiatement pour déboucher 24 heures plus tard sur la signature de tous les syndicats, ayant l’impression d’avoir le couteau sous la gorge. Les seuls véritables gains de cette rallonge des négociations sont le paiement à 25 % des heures le samedi après midi et la majoration de 20 % des heures supplémentaires effectuées en dehors du délai de prévenance de 7 jours.

Puis un plan de licenciements

Avec l’accord de modulation, la direction prétendait sauver des emplois. À peine est-il signé, qu’elle passe à l’étape suivante : elle dévoile 5 jours après un plan de licenciement préparé en secret depuis des mois. Elle compte licencier 67 salariés ne travaillant pas directement à la production (administratifs, techniciens, maintenance, encadrement...) ainsi que les salariés du week-end au chômage partiel qui refuseraient toujours de passer en semaine et une partie de l’équipe de nuit qui n’accepterait pas de passer en 2/8 avant le 6 mai.

Et voilà le plus fort : dans le même temps, Sanden prévoit, pour les 12 prochains mois, 9 mois de fortes activités. Les semaines de plus de 35 heures ont déjà recommencé et l’augmentation des commandes suite au succès de la prime à la casse a déjà un effet sur l’intensité du travail demandée aux ouvriers. L’entreprise envisage une nouvelle production de pompes à chaleur et réfléchit à une possible extension, grâce à l’aide de l’argent public.

Résumé de toute l’opération : Sanden a saisi l’opportunité de la crise pour restructurer l’entreprise et conforter ses profits. Mais à trop tirer sur la corde, la direction découvrira peut-être qu’elle se casse.

Hersh RAY

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