De Versailles à Pointe à Pitre, le roitelet de l’Elysée, en cette veille des vacances d’été, croit déjà l’affaire dans le sac : nouvelle offrande aux riches avec l’annonce d’un Emprunt Sarkozy et nouvelles rodomontades anti-ouvrières : « Le droit de grève ne peut être utilisé comme un instrument de propagande et de déstabilisation politique. Je ne suis pas prêt à accepter l’inacceptable » a-t-il asséné en Guadeloupe, bien à l’abri de toute contestation populaire au milieu de 600 gendarmes. Entre-temps, son porte-voix de premier ministre de préconiser, en pleine déferlante de plans de licenciements… le recul de la retraite à 67 ans..
La grève, un « instrument de déstabilisation politique » . La formule n’est pas si mal trouvée, après tout, pour peu qu’on y ajoute la déstabilisation sociale. Et sous la menace, quel aveu ! C’est que la précipitation de ces annonces estivales est à la mesure du petit vent de panique qui a saisi le gouvernement et le patronat cet hiver et au printemps. Les séquestrations de cadres dirigeants, les manifestations ouvrières massives de janvier et mars, et la longue grève générale de la Guadeloupe, à titre prémonitoire pour la métropole, ont fait craindre le pire à toute cette cour de versaillais accourue la semaine dernière à la convocation (y compris l’opposition dite socialiste, qui vient de se montrer tout aussi servile aux Antilles).
Et puis, esprit de « responsabilité » des ténors confédéraux oblige (dûment salué par la gent gouvernementale et patronale), l’orage social annoncé s’est délité. Pour un temps ! Car les grandes manœuvres éteignoirs des confédérations syndicales n’ont abouti, en fait, qu’à une situation sociale en trompe-l’œil. Leurs appels au 1er mai et 13 juin ont fait fiasco. Certes. On ne peut lanterner indéfiniment les travailleurs à coups de sages promenades dans les rues soigneusement programmées à plusieurs semaines de distance. Mais ceux qui croient pouvoir profiter de cet apparent « reflux » social, pourraient bien s’y tromper.
En dépit de la parenthèse électorale des européennes, les coups de colère locaux contre ces plans de licenciements qui se suivent plus rapidement que jamais, n’ont pas cessé. La colère des salariés, dans le secteur public comme dans le privé, est plus que latente. Elle explose par petits bouts. Ici dans tel ou tel hôpital, dans tel bureau de poste ou centre de tri, là chez un équipementier automobile, puis un autre et un autre encore, ou dans le secteur des semi-conducteurs, de la chimie, du pneu… où l’accumulation des profits fait enrager les futurs licenciés. Le problème de l’heure n’est pas la démobilisation du monde du travail, mais la dispersion de ses multiples mobilisations locales, en lâcher de ballons en quelque sorte. Il ne faudrait sans doute objectivement pas grand-chose pour passer à l’étape de leur convergence, d’une véritable lutte d’ensemble : la détermination d’équipes de militants et grévistes locaux décidés à se coordonner et faire tache d’huile, en passant outre les freins confédéraux.
Le gouvernement mise sans doute sur une trêve estivale. Mais certains précédents historiques devraient l’inciter à la prudence : en 1952, un certain Pinay lançait son emprunt qui permit à la bourgeoisie française d’échapper à l’impôt sur les successions ; en 1953, un certain Laniel reprenait la politique de rigueur de Pinay et prenait des décrets-lois à la veille de l’été s’en prenant au régime des retraites des fonctionnaires. En plein mois d’août, des postiers de Bordeaux déclenchaient une grève qui s’étendit à la SNCF, à EDF-GDF… en une grève générale de 4 millions de salariés. Le gouvernement dut céder. En 2009, qui sème le vent des licenciements et des provocations anti-ouvrières pourrait bien récolter un fameux ouragan, bien au-delà de cet été 53 oublié...
28 juin 2009
Mots-clés : Nicolas Sarkozy