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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 23, septembre-octobre 2002

PCF : y a-t-il une vie après la catastrophe électorale ?

Mis en ligne le 5 octobre 2002 Convergences Politique

3,37 % pour Robert Hue à la présidentielle, 4,95 % pour ses candidats aux législatives, le PCF a certes sauvé son groupe parlementaire en obtenant 21 députés (contre 35 en 1997), mais il est depuis en état de choc électoral.

La cause de l’effondrement, dernière étape d’une dégringolade commencée il y a vingt ans, sont connues : les classes populaires ont massivement déserté le Parti communiste, compromis jusqu’au cou dans la politique anti-ouvrière du gouvernement Jospin. Ce type de sondage valant ce qu’il vaut, Ipsos indiquait que 3% des ouvriers auraient voté pour les candidats communistes le 9 juin (ils étaient 36 % en 1978) contre 7% pour l’extrême-gauche, pourtant elle-même réduite à moins de 3% des voix. Depuis quelques années, Hue avait pourtant tenté de donner le change, en essayant de montrer qu’il avait « un pied au gouvernement, un pied dans le mouvement populaire ». La manifestation du 16 octobre 1999 puis l’initiative de Calais en défense des salariés de Danone ont peut-être mis du baume au cœur des militants, mais elles n’ont pas dupé l’électeur. Pas plus sans doute que ses bien tardives contritions actuelles : « Comment et pourquoi avons-nous glissé d’une participation découlant des circonstances de la dissolution de 1997 à une participation naturelle, scellant aux yeux de l’opinion l’intégration à un système qu’elle rejette (…) ? »

Quel avenir pour le PCF ?

La question est posée à nouveau, par les militants sous le choc, comme par les dirigeants qui voient leur carrière politique bien compromise. Robert Hue lui-même a ainsi saisi l’occasion de la dernière Fête de l’Humanité pour poser on ne peut plus clairement le dilemme dans une tribune publiée dans le quotidien du PCF. Celui-ci a deux voies devant lui, résumait-il en substance, soit il se fond dans un ensemble plus grand (mais alors avec qui ?) soit il tente de maintenir son identité. Repoussant la première alternative, qui de toute évidence tente un certain nombre de notables du parti (ni « dissolution dans la social-démocratie », ni construction d’un « pôle de radicalité », une « gauche de la gauche qui serait peut-être radicale et véhémente, mais sans doute impuissante ») il se prononçait pour le maintien du PCF en tant que tel. Position certes volontariste, mais qui ne fait qu’amener la question suivante, essentielle : comment redonner des couleurs au parti ? Quelle politique pourrait bien lui rendre une partie au moins de son lustre d’antan ?

Car, par-delà le combat des chefs et des cliques qui polarise les médias (Hue, battu lui-même à Argenteuil-Bezons, sera-t-il le bouc émissaire pour une politique qu’il a incarnée mais qui eut l’assentiment de tout l’appareil ?), pour l’instant personne n’a apporté une réponse, qui d’ailleurs n’existe peut-être pas.

La conférence nationale qui s’est tenue fin juin n’a fait que repousser le problème en accouchant de l’annonce d’un congrès au printemps 2003. Des responsables comme Pierre Zarka, Patrick Braouzec et autres « refondateurs » ont réclamé en vain des « états généraux du communisme », qui associeraient tous ceux qui peuvent se sentir communistes sans pour autant êtres membres du PCF, y compris des organisations comme la LCR ou des militants syndicaux ou associatifs, alors que Hue et Buffet, ont imposé la tenue d’un congrès réservé aux seuls adhérents du PCF. Difficile d’y voir pour l’instant autre chose que de petites manigances d’appareil, le calcul des premiers étant de trouver des appuis à l’extérieur contre la direction, celle-ci à l’inverse espérant pouvoir mieux contrôler un congrès des seuls membres.

Oui, difficile d’apercevoir derrière ces manœuvres une voie de redressement. En Europe il n’y a d’ailleurs aucun exemple alléchant à suivre. En Espagne, la tentative d’une coalition réformiste à la gauche du PS, la Gauche unie, s’est elle aussi effondrée aux dernières élections générales. En Italie, si l’ancien PCI s’est transformé il y a dix ans en grand parti social-démocrate, c’est que la place n’était pas prise, comme elle l’est en France par le PS. Un parti communiste demeure, Rifondazione comunista, mais outre que sa survie s’explique par une situation différente (les ex-staliniens ont pu s’adjoindre une bonne partie de l’extrême gauche tout en gardant la haute main sur le parti, ce qui ne serait peut-être pas le cas en France où cette extrême-gauche a tout de même recueilli 3 millions de voix aux présidentielles, bien plus que le candidat du PCF) sa réussite reste finalement tout aussi limitée que celle du PCF. Il n’a d’ailleurs au fond aucune autre politique à proposer : l’alliance avec la gauche et même le centre, en se permettant parfois des foucades de franc-tireur pour prendre une pose un peu plus radicale.

Car c’est bien là qu’est l’impasse pour le PCF : sauf à redevenir révolutionnaire et promouvoir une politique de classe (ce que ni lui ni personne ne peut envisager) le PCF n’a d’autre perspective au final qu’une politique d’alliance avec le PS, c’est-à-dire de répéter celle qui l’a amené là où il est. On voit difficilement comment elle pourrait l’en sortir.

Aujourd’hui ses dirigeants disent vouloir prendre leur distance d’avec cette politique. En 1984 déjà, après ses premiers déboires électoraux, le PCF avait semblé faire un virage à gauche en claquant la porte du gouvernement et en se donnant des airs contestataires. Mais pendant les 13 années d’isolement relatif qui suivirent (les liens ne furent jamais rompus évidemment avec le PS), la direction du PCF ne cessa de lancer de nouvelles formulations d’une union de la gauche qui ne dirait pas son nom et pourrait ainsi avoir l’aval des militants. Ce fut par exemple l’époque du PUP, le « Pacte unitaire pour le progrès ». On a vu depuis que la valse des étiquettes ne changent pas le contenu d’une politique.

Restent les militants…

Ils sont encore des milliers. Il faut aussi compter des sympathisants non encartés, mais liés à l’appareil communiste et diffuseurs de son influence à travers de multiples structures syndicales ou associatives. On l’a vu encore lors de la toute récente fête de l’Huma : tous ont pris le résultat des élections comme une gifle, même ceux qui ne portaient pas l’action du gouvernement Jospin ni celle des ministres PCF eux-mêmes dans leur cœur. Et même si certains ont aujourd’hui le réflexe de serrer les rangs, pour « sauver le parti », il est probable que l’hémorragie va continuer et qu’on en verra encore renoncer à toute activité militante ou d’autres se replier sur le syndicat ou l’amicale des locataires.

L’extrême-gauche a certainement marqué des points en se montrant intraitable à l’égard du gouvernement de la gauche plurielle, et en gagnant sur cette base 3 millions de voix, notamment dans les milieux populaires. Cela ne suffit pourtant pas en soi pour qu’elle constitue un espoir crédible (comme l’ont montré les résultats des législatives qui ont annulé en partie ceux des présidentielles) et qu’elle attire à elle des milliers de militants communistes qui chercheraient à sortir de l’ornière.

Pour cela elle doit proposer une politique d’interventions et de luttes au PCF et à ses militants. Une politique qu’elle a encore à élaborer.

27 septembre 2002

Bernard RUDELLI

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