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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 59, septembre-octobre 2008

Où en est le mouvement de grève des travailleurs sans papiers ?

Mis en ligne le 2 octobre 2008 Convergences Politique

Depuis le mois de février 2008 et l’occupation du restaurant de La Grande Armée par 9 sans-papiers qui y étaient employés, les mouvements de grève pour la régularisation ont pris de l’ampleur. Au cours d’une première vague lancée au mois d’avril par des militants de la CGT soutenus par certains du PCF et d’extrême gauche, puis d’une deuxième déclenchée au mois de mai, plus de 1 700 travailleurs se sont mis en grève, sur 67 sites différents, pour l’essentiel en région parisienne. En ce mois de septembre, sans que l’on puisse parler d’une troisième vague, une trentaine de sites étaient toujours touchés par des grèves.

Des occupations d’églises, qui donnaient aux mouvements de sans-papiers une résonance humanitaire, on est bien passé à une lutte des salariés employant ce qui a toujours été l’arme du mouvement ouvrier : la grève.

Avec succès, puisque plus de 1 000 d’entre eux ont ainsi obtenu leur régularisation. Cela reste peu, bien sûr, et tout à fait insuffisant, face au grand nombre des travailleurs sans papiers. Mais ceux qui se sont battus, en dépit des difficultés de leur situation, la crainte d’être expulsé s’ajoutant à celle de perdre son emploi, ont appris à s’organiser collectivement, se sont syndiqués, ont contrôlé leur mouvement en assemblée générale ou en comité de grève, et ont accumulé une expérience que d’autres, dans la même situation, pourront mettre à profit.

Sur certains sites, des revalorisations salariales ont parfois été obtenues dans les protocoles de fin de grèves. Ainsi, le combat pour la régularisation rejoint directement celui pour les autres revendications ouvrières. Il s’inscrit bien dans celui de l’ensemble du monde du travail face à un patronat qui joue sur la concurrence des travailleurs entre eux et tire les salaires vers le bas en profitant des plus vulnérables.

Cette lutte ne fait pas l’unanimité au sein de la CGT. Mais les militants qui s’y sont investis avec enthousiasme, ont bien vu que, même s’il fallait sortir des cadres habituels de leur intervention, il y avait là une possibilité supplémentaire de lutter contre l’exploitation patronale et contre le gouvernement. Et, y compris et d’abord au sein de la CGT, cela provoque des discussions sur les luttes nécessaires aujourd’hui, sur celles à mener aux côtés des travailleurs les plus précaires et sur les liens indispensables entre les unes et les autres.

Pour Sarkozy et son gouvernement, ces régularisations obtenues collectivement sont une épine dans le pied. Ils avaient cru pouvoir se faire sans frais un fonds de commerce de la chasse aux sans-papiers et des expulsions, et voilà que leur honteuse politique leur revient dans la figure. C’est le sentiment d’être traqué en permanence, de devoir vivre dans une crainte constante, sentiments volontairement suscités par la politique de nos gouvernants, qui a poussé ces travailleurs à sortir de leurs cuisines ou de leurs chantiers pour revendiquer. Ces gouvernants avaient pondu le fameux « article 40 » pour donner encore plus de liberté aux patrons, en octroyant la possibilité à ceux d’entre eux employant des sans-papiers de régulariser ceux qu’ils choisiraient, leur fournissant ainsi un moyen de pression ou de chantage supplémentaire. Mais c’est ce même article qui, en donnant un but concret aux grèves, a permis d’imposer des centaines de régularisations mais dans un cadre que le gouvernement n’avait pas imaginé, un cadre collectif.

Ces régularisations sont certes encore soumises à l’arbitraire des préfectures, qui ont chacune leurs critères. Mais ce premier et insuffisant recul devant la catégorie de travailleurs la plus défavorisée et privée de droits, rappelle à d’autres que la lutte paie.

L’association Droits devant ! impliquée dans le mouvement, fait elle-même le constat que ces grèves ont amené en un court lapse de temps un nombre de régularisations bien plus important que les occupations d’églises et les grèves de la faim précédentes, ce qui n’est évidemment pas une condamnation de celles-ci qui ont eu l’insigne mérite d’être à l’origine et d’impulser le mouvement des sans-papiers.

22 septembre 2008

Lydie GRIMAL


La Tour d’Argent, côté cour !

Le 17 septembre, 7 travailleurs sans papiers de la Tour d’Argent, en grève, ont investi ce fameux restaurant parisien, aidés de militants CGT, pour exiger leur régularisation. Le patron a d’abord accepté de remplir leurs dossiers, déposés le soir même en préfecture par les bons soins du ministère Hortefeux, directement saisi. Un record de rapidité ! Dans le protocole signé, il était même spécifié que la direction s’engageait à servir un repas aux grévistes !

Mais à peine la première nuit passée sur place, le patron les a fait expulser par ses nervis. Grévistes et militants CGT ont alors immédiatement décidé d’assigner le patron en justice, en référé heure par heure, pour non respect du protocole. Au tribunal, le patron s’est entendu rappeler un certain nombre de vérités par le juge : qu’il est normal que des salariés se mettent en grève pour leurs droits, qu’en tant qu’employeur, il est tenu de discuter avec eux de leurs revendications…

De toutes les manières, cette expulsion n’était pas nécessairement une bonne opération pour la direction de la Tour d’Argent. Sur le trottoir, les banderoles et les affiches étaient encore plus visibles, et la musique troublait l’ambiance feutrée du restaurant ! Ce qui a conduit trois jours plus tard à la signature d’un nouveau protocole permettant aux grévistes d’avoir à nouveau un local à leur disposition dans les locaux de la Tour d’Argent. Il est désormais de notoriété publique qu’un restaurant qui sert des repas à 150 € le midi et 300 € le soir, exploite sans vergogne des sans papiers au fond de ses cuisines… mais aussi que ces travailleurs ne se laissent pas faire éternellement.

L.G.


La chasse aux réfugiés politiques par le préfet de Nantes

Déjà deux associations seulement pouvaient domicilier administrativement les travailleurs immigrés demandeurs du droit d’asile (droit garanti, paraît-il, par la Constitution !). Or pouvoir déclarer un domicile est une condition obligatoire pour pouvoir déposer un dossier en préfecture et bien peu de réfugiés, et pour cause, connaissent un particulier susceptible de les héberger quand ils arrivent en France. Cet été les deux ont été interdites de domiciliation par la Préfecture de Nantes. Du coup, un certain nombre de réfugiés n’ont pas pu déposer leur demande de droit d’asile.

Début septembre l’une d’elle, Aida (Accueil et information pour les demandeurs d’asile), a été ré-autorisée (mais avec un quota de 40 familles maximum) tandis que l’autre, le Gasprom, section nantaise de la Fasti (Fédération des associations de soutien aux travailleurs immigrés) perdait son agrément. Cette dernière décision arbitraire des autorités fait d’ailleurs suite à une série de tracasseries comme des perquisitions de la police et de la gendarmerie.

Ne pas pouvoir déposer de demande d’asile a des conséquences très concrètes pour ces réfugiés, qui fuient la misère, les guerres, et l’oppression : pas d’accès à la CMU, pas d’accès à l’Allocation temporaire d’attente, pas de carte de transport en commun, pas de bons d’accès aux bains douches publics, pas d’accès à l’hébergement d’urgence, ni d’accès aux centres d’accueil des demandeurs d’asile, pas même d’accès à l’école pour les enfants…

Comme les gouvernements précédents celui des Sarkozy, Fillon et autres Hortefeux continue à soutenir les dictatures d’Afrique et d’ailleurs, qui sèment misère et oppression. Mais ils ne veulent plus voir ici la moindre trace des conséquences de cette misère et de cette oppression, conséquences elles-mêmes de leur politique : ces dizaines, voire centaines de milliers de persécutés de par le monde et dont seulement quelques uns arrivaient encore jusqu’à maintenant à trouver refuge en France.

Cette ignoble politique ne peut pourtant pas s’expliquer par une prétendue « invasion » de réfugiés. Si 1 158 dossiers de réfugiés avaient été déposés auprès des services de l’État en 2004, les chiffres chutent d’année en année : 922 en 2005, 418 en 2006, 377 en 2007.

Étienne LOUVERTURE

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