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Accueil > Éditos de bulletins > 2009 > novembre > 2

« On bosse ici ! On vit ici ! On reste ici ! »

La grève des travailleurs sans papiers s’étend. Commencée à 3 000 le 12 octobre, elle rassemble aujourd’hui 4 600 grévistes, cartes de grévistes en main. Le mouvement touche une cinquantaine de sites, où s’organisent des « piquets » qui se sont regroupés et centralisés par grandes professions où l’emploi illégal de main-d’œuvre est devenu endémique : nettoyage, sécurité, bâtiment et travaux publics, restauration, et intérimaires. Les travailleurs des enseignes de l’intérim sont présents dans tous les secteurs, mais se sont regroupés aussi : assemblées quotidiennes de plusieurs centaines de grévistes, comité de grève de quelque 80 délégués de piquets, pour mieux résister aux patrons de l’intérim et des entreprises utilisatrices qui se renvoient la patate chaude de leur embauche illégale. Pour l’ensemble des branches, le mouvement est structuré, avec des délégués élus par sites, qui se rassemblent régulièrement pour décider de leur mouvement.

La détermination et le dynamisme de cette grève sont l’œuvre des grévistes eux-mêmes. Mais ils sont aidés par des militants syndicaux (de la CGT d’abord qui déjà en 2008 avaient pris l’initiative d’un premier mouvement, de SUD et de la FSU, et le soutien de la CFDT et de l’UNSA) et par des militants associatifs (RESF, Cimade, Ligue des Droits de l’homme et d’autres). C’est l’acte II d’un mouvement qui a fait son entrée fracassante en 2008 par une première vague de grèves de ces travailleurs de l’ombre : qui vivent souvent depuis des années en France, avec des bulletins de salaires, des feuilles d’impôts, mais pourtant aucun statut légal, aucune possibilité de soins, toujours traqués par la police et à la merci d’une expulsion du territoire. Sans parler de ceux qui travaillent carrément au noir, ce qui est le cas entre autres de nombreuses femmes assurant des tâches d’aide à la personne.

Ces travailleurs se sont rebiffés et pour un deuxième round, ils recourent à l’arme de la grève. Le mouvement de 2008 avait effectivement contraint le gouvernement à définir quelques critères de régularisation, mais flous, chiches, et appliqués selon les chicaneries des préfectures. Cela ne pouvait pas durer. D’où ce mouvement plus ample encore, de travailleurs parmi les plus exploités et vulnérables, un genre de première à cette échelle. Et qui n’a pas dit son dernier mot, malgré le lourd silence du monde politique, de ceux qui à droite sont à la botte de Sarkozy, à gauche à la traîne du PS.

Sarkozy a trouvé une minable parade : parler d’autre chose, de charters que d’un commun effort divers Etats d’Europe pourraient organiser pour renvoyer des clandestins chez eux. O pardon pas des « charters », des « voyages regroupés », que ces pseudo voyagistes de droite et de gauche, main dans la main, concocteraient de concert ! Comme les gouvernements anglais (de gauche) et français (de droite) viennent de le faire pour renvoyer une trentaine d’Afghans de Londres à Kaboul, avec escale à Roissy pour en embarquer trois.

Tandis que Sarkozy finasse et élude, le monde patronal s’inquiète : la grève paralyse des chantiers du bâtiment, des sites de restauration et de nettoyage et l’intérim qui n’a jamais connu pareille grève. D’où le recours à des escouades de policiers qui évacuent des sites occupés. Chaque jour, entre 2 et 5 expulsions ont lieu. Ce qui n’entame pas l’efficacité de la grève ni le dynamisme des grévistes qui trouvent le moyen de se loger ailleurs ! Le gouvernement devra bien céder.

La lutte des travailleurs sans papiers mérite notre soutien. Il faut que leur grève gagne, qu’ils soient régularisés – comme tous les sans papiers qui de fait appartiennent au monde du travail. En luttant pour que le patronat ne puisse pas impunément utiliser leur situation pour tirer vers le bas les conditions de salaire et de travail, ces travailleurs agissent dans l’intérêt de toute leur classe.

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