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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 117, janvier-février 2018 > Livres

Milot l’incorrigible – Parcours carcéral d’un jeune insoumis à la Belle Époque

Collectif l’Escapade

8 février 2018 Convergences Culture

Milot l’incorrigible – Parcours carcéral d’un jeune insoumis à la Belle Époque

Collectif l’Escapade

Niet ! Éditions, 2016, 8 euros


Émile Delagrange, alias Milot, est un jeune des quartiers populaires. Il est né en 1884 dans le faubourg de Charonne, à Paris, un quartier encore marqué par la Commune et la répression qui a suivi. C’est un petit délinquant, un Apache, selon le terme désignant à l’époque les bandes de jeunes, façon de les traiter de « sauvages ». Le livre trace son parcours dans les méandres du système carcéral. Il se lit comme un roman, mais c’est une histoire vraie. Les auteurs ont retrouvé sa trace dans les archives pénitentiaires et les rapports de police. En reconstituant son histoire, ils racontent celle d’un système judiciaire visant à briser une jeunesse ouvrière révoltée.

Milot commence à la Petite Roquette. Il a 13 ans. Dans cette prison « moderne », les enfants sont soumis au silence et à l’isolement. Les seuls rapports humains autorisés sont les coups des gardiens et les sermons des curés. Après un second vol, il échappe à la prison… mais pas à la maison de correction. Fin XIXe-début XXe, la mode est à la « rééducation » par le travail, principalement dans des colonies agricoles. Pour Milot, ce sera l’usine. À Bologne, en Haute-Marne, un patron a trouvé le filon pour contourner l’interdiction du travail des enfants : il ouvre une colonie industrielle accueillant plusieurs dizaines de mineurs soumis au travail forcé. Une œuvre « philanthropique » auprès des « enfants désœuvrés », selon les panneaux disposés aujourd’hui dans l’usine. Dans ce « bagne d’enfants », Milot lutte contre l’enfermement, la violence des gardiens, les conditions de vie… et les nombreux accidents du travail. Il organise même une prise de parole s’adressant aux ouvriers de la forge, ce qui lui vaut 30 jours de cachot. Durant l’hiver 1902-1903, il est l’un des meneurs d’une révolte, qui a presque tourné à l’insurrection. Dénoncé par un mouchard, il est transféré en colonie correctionnelle, où les conditions sont pires encore.

Sa dernière étape sera le bagne de Guyane, qui finira par le briser. Fidèle à lui-même, il est régulièrement sanctionné pour « manque de volonté au travail » et détention d’un jeu de cartes (!).

L’histoire de ce jeune révolté est celle d’une fraction de la jeunesse ouvrière de la Belle Époque. Une histoire qui résonne avec aujourd’hui, quand nombre de réactionnaires réclament l’enfermement de la jeunesse révoltée, quand les centres éducatifs fermés et les établissements pénitentiaires pour mineurs se multiplient.

À signaler : en annexe, on trouvera le récit d’une mutinerie qui a eu lieu en 1882 dans cette même colonie de Haute-Marne, à Bologne. Un véritable mouvement de grève contre les sanctions disciplinaires ! À vouloir embastiller la jeunesse…

Maurice SPIRZ

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