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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 128, septembre-octobre 2019 > DOSSIER : Crise écologique, leurs solutions et les nôtres

DOSSIER : Crise écologique, leurs solutions et les nôtres

Marx écologiste

Mis en ligne le 17 septembre 2019 Convergences Société

En 1875, Marx livre une critique argumentée du programme de fondation du jeune parti social-démocrate allemand. Premier point du programme : « Le travail est la source de toute richesse et de toute culture ». Réponse :

« Le travail n’est pas la source de toute richesse. La nature est tout autant la source des valeurs d’usage (qui sont bien, tout de même, la richesse réelle !) que le travail, qui n’est lui-même que l’expression d’une force naturelle, la force de travail de l’homme. Cette phrase rebattue se trouve dans tous les abécédaires, et elle n’est vraie qu’à condition de sous-entendre que le travail est antérieur, avec tous les objets et procédés qui l’accompagnent. Mais un programme socialiste ne saurait permettre à cette phraséologie bourgeoise de passer sous silence les conditions qui, seules, peuvent lui donner un sens. Et ce n’est qu’autant que l’homme, dès l’abord, agit en propriétaire à l’égard de la nature, cette source première de tous les moyens et matériaux de travail, ce n’est que s’il la traite comme un objet lui appartenant que son travail devient la source des valeurs d’usage, partant de la richesse. Les bourgeois ont d’excellentes raisons pour attribuer au travail cette surnaturelle puissance de création : car, du fait que le travail est dans la dépendance de la nature, il s’ensuit que l’homme qui ne possède rien d’autre que sa force de travail sera forcément, en tout état de société et de civilisation, l’esclave d’autres hommes qui se seront érigés en détenteurs des conditions objectives du travail. Il ne peut travailler, et vivre par conséquent, qu’avec la permission de ces derniers. »

Karl Marx, Critique du programme de Gotha, 1875


Marx écologiste avant la lettre ?

Oui, répond John Bellamy Foster [1] dans son livre.

L’auteur cite et discute différents passages de l’œuvre de Marx sur les relations entre la production, la société capitaliste et la nature. Il rappelle que Marx reprend la dénonciation par le chimiste et agronome allemand Justus Liebig de la « rupture métabolique » opérée par l’agriculture capitaliste anglaise : l’antagonisme entre la ville et la campagne caractéristique du capitalisme rompt le cycle des nutriments et mine la fertilité des sols. Marx généralise cette notion : le capitalisme a rompu de façon « irréparable » l’« interaction métabolique » entre les êtres humains et la terre, c’est-à-dire la condition de la production.

« Tout progrès de l’agriculture capitaliste est non seulement un progrès dans l’art de piller le travailleur, mais aussi dans l’art de piller le sol ; tout progrès dans l’accroissement de sa fertilité pour un laps de temps donné est en même temps un progrès de la ruine des sources durables de cette fertilité. […] Si bien que la production capitaliste ne développe la technique et la combinaison du procès de production social qu’en ruinant dans le même temps les sources vives de toute richesse : la terre et le travailleur » (Le Capital, livre I).

« La seule liberté possible est que l’homme social, les producteurs associés, règlent rationnellement leurs échanges avec la nature, qu’ils la contrôlent ensemble au lieu d’être dominés par sa puissance aveugle et qu’ils accomplissent ces échanges en dépensant le minimum de force et dans les conditions les plus dignes et les plus conformes à leur nature humaine » (Le Capital, livre III).

« Du point de vue d’une organisation économique supérieure de la société, le droit de propriété de certains individus sur des parties du globe paraîtra tout aussi absurde que le droit de propriété d’un individu sur son prochain. Une société entière, une nation et même toutes les sociétés contemporaines réunies ne sont pas propriétaires de la terre. Elles n’en sont que les possesseurs, elles n’en ont que la jouissance et doivent la léguer aux générations futures après l’avoir améliorée en boni patres familias. » (Le Capital, livre III).


Marx écologiste, John Bellamy Foster,

Traduction française aux Éditions Amsterdam, 13 €.


[1Universitaire américain, éditeur de la Monthly Review, publication au marxisme assumé, qui se définit comme « socialiste indépendant ».

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