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Les Déracinés, de Catherine Bardon : une saga familiale entre Europe, République dominicaine, Israël et les États-Unis

6 avril 2021 Article Culture

Cette série de romans écrits par Catherine Bardon est sortie entre 2018 et 2021 : les trois premiers – Les Déracinés ; L’Américaine et Et la vie reprit son cours – sont déjà disponibles en poche (éditions Pocket). Le dernier, Un invincible été (Escales), sort le 8 avril 2021. L’autrice est photographe et a écrit des guides de voyage ; elle a aussi vécu en République dominicaine où elle a découvert cette histoire qui l’a inspirée.

Originalité dès le premier tome

Un jeune couple de Juifs viennois émigre en République dominicaine en mars 1940 pour y construire une colonie juive, Sosua. Alors qu’explosent les demandes de visas de Juifs allemands et autrichiens persécutés par le régime nazi, c’est lors d’une conférence organisée à Évian en juillet 1938 à l’initiative du président américain Roosevelt pour traiter du sort de ces réfugiés politiques (le mot juif n’est pas prononcé !), que tous les pays, y compris les États-Unis qui refusent d’augmenter leurs quotas d’émigration, se défaussent… À l’exception de la République dominicaine qui propose 100 000 visas.

Avec l’aide du Joint ou JDC (American Jewish Joint Distribution Committee : la plus grande organisation humanitaire juive, créée en 1914 pour venir en aide aux Juifs d’Europe victimes de la famine et de persécutions et aux Juifs de Palestine), le gouvernement dominicain met en place le projet. Il vend les terres d’une ancienne plantation de bananes au Joint qui se charge de sélectionner les candidats en Europe pour y créer une colonie agricole. Le dictateur dominicain, Trujillo, y voit l’occasion de redorer son image (il avait fait massacrer des milliers d’Haïtiens), de développer son pays, mais aussi de le blanchir ! Pour le Joint, le projet est un test : montrer la viabilité de communautés rurales juives, à l’instar des kibboutz de Palestine.

Rien ne prédestinait Wilhem Rosenheck, jeune journaliste, fils d’un imprimeur et Almah Kahn, étudiante dentiste, fille d’un professeur de médecine, à une telle aventure.Tous deux faisaient partie de cette jeunesse dorée juive de la Vienne cosmopolite et brillante de l’entre-deux-guerres qui allait voir tous ses espoirs et illusions s’effondrer face à la crise et à la montée puis l’arrivée au pouvoir des nazis. Almah, Will et leur jeune garçon, coincés dans un camp de réfugiés en Suisse, virent là l’occasion de quitter l’Europe et de se rapprocher des États-Unis, et ils se portèrent donc volontaires pour le projet bien qu’ils n’aient aucune expérience agricole… à l’instar des autres volontaires, ainsi présentés par Will dans ses carnets (le roman alterne récit extérieur et des extraits de carnets intimes de Will) : « une sacrée troupe de bras cassés, voilà ce que Trone a recruté […] Seuls points communs entre nous, l’allemand que nous parlons et notre âge, en dessous de trente-cinq ans. Pour le reste, nous serions certainement plus à même d’animer un camp de vacances ou de monter un spectacle que de défricher une jungle tropicale pour y construire un kibboutz ! » En effet, on trouve dans le groupe une chapelière, une violoniste, un acteur, un boucher, un typographe et un chauffeur de taxi !

Après un voyage long et éprouvant, c’est l’arrivée à Sosua où il n’y a rien, et tout à construire, et le début d’une vie en collectivité, à l’opposé du mode de vie confortable et petit-bourgeois auquel les personnages étaient habitués. Ils vont aménager peu à peu cette vie, refusant que les enfants soient complètement retirés aux parents par exemple. D’autres volontaires rejoignent le premier groupe, tels Svenja, jeune psychologue d’origine polonaise, et Mirawek, son frère, sioniste convaincu. La colonie se développe, avec ses succès et ses échecs.

Dans le deuxième tome, d’autres personnages et voyages

Ruth, fille d’Almah et Will, la première enfant née à Sosua, devient le personnage principal. Sa quête d’identité la fait voyager entre les États-Unis et Israël où lors d’un séjour dans un kibboutz, elle se lie d’amitié avec un certain… Bernie Sanders ! Très engagé politiquement, pour la lutte des droits civiques des Noirs et contre la guerre du Vietnam…

La grande histoire croise ainsi celle des personnages, tout au long du récit, mais elle ne sert que de toile de fond aux errances et errements des figures principales. Il n’est que peu question dans ces récits des Dominicains d’origine, un peu plus de l’histoire politique du pays soumis à l’impérialisme américain qui ne cesse d’y intervenir contre la volonté de la population. De même, il n’est pas question des Arabes palestiniens quand le récit arrive en Israël.

Impossible de ne pas le noter, ce qui n’empêche pas d’être pris par la lecture…

Liliane Lafargue

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