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Russie : Poutine de capitalisme !

Le système Poutine

Mis en ligne le 22 janvier 2012 Convergences Monde

En mars 2000, Vladimir Vladimirovitch Poutine est élu président de la Fédération de Russie. Un quasi inconnu jusque-là. Avec l’effondrement de l’URSS, ce petit commandant du KGB va devenir l’homme fort de la Russie. En poste en Allemagne de l’Est lorsque le mur de Berlin s’effondre, il rentre alors à Saint-Pétersbourg où le nouveau maire le nomme maire-adjoint en charge des privatisations. Poutine traite directement avec les oligarques pétersbourgeois mais aussi avec les capitalistes européens qui commencent à investir en Russie.

C’est lui encore qui organise la mise en coupe réglée du port de Saint-Pétersbourg par une clique mafieuse, et qui distribue les anciens monopoles d’État à ses amis. Ces bons services le font appeler à Moscou début 1996 pour s’occuper, là encore, des biens d’État.

Avec l’appui des oligarques de l’entourage d’Eltsine (dont les Berezovski, ou Khodorkovski qu’il trouvera trop envahissants par la suite), il devient le candidat à la succession d’Eltsine qui ne peut effectuer un troisième mandat. Son premier acte de premier ministre, en 1999, est de donner à Eltsine et à ses proches, accusés de malversations, une immunité judiciaire totale. Son second, de profiter des attentats de 1999 à Bouynaksk (Daguestan), Volgodonsk (région de Rostov) et Moscou [1] pour accuser les indépendantistes tchétchènes : « Ces gens ne sont pas des êtres humains. Ce sont des animaux, des animaux enragés. (…) Nous poursuivrons les terroristes jusque dans les toilettes. On les butera dans les chiottes, la question est close ! »

L’inconnu Poutine sortait de l’ombre. La seconde guerre en Tchétchénie est lancée le 1er octobre 1999. Sanglante entrée en campagne pour l’élection présidentielle de mars 2000 [2]. Le 26 mars 2000, Poutine est élu dès le premier tour avec 52 % des voix.

Une « verticale du pouvoir » au service des capitalistes

Les deux mandats de Poutine à la présidence de la Fédération de Russie (de 2000 à 2008) sont une période de redressement de la situation économique (voir notre article « Poutine et la verticale du capitalisme »), de recentralisation autoritaire du pouvoir autour du Kremlin, au plus grand profit de la bourgeoisie russe. Après les années Eltsine de pillage pressé et désordonné, il était temps de mettre quelques règles pour permettre aux pillards de faire fructifier leurs nouveaux biens.

Poutine égratigne quelques gêneurs, dont les magnats qui détiennent télévisions et journaux : Boris Berezovski et Vladimir Goussinski sont contraints à l’exil en 2000 et partent avec leurs sous. Le PDG du trust pétrolier Ioukos, Khodorkovski, première fortune de Russie, est envoyé en 2003 dans une colonie pénitentiaire en Sibérie. Avertissement. Il va falloir payer à l’État ses impôts.

La « démocrature » poutinienne

Le système poutinien fusionne ainsi l’appareil répressif (aux mains des siloviki, ces affidés de Poutine, anciens membres du KGB) et le monde des affaires, au sein d’un appareil d’État fortement centralisé. De 2000 à 2011, tous les rendez-vous électoraux ont été truqués ou falsifiés, l’opposition réprimée ou contrôlée de près, la presse critique muselée. Les assassinats politiques se sont multipliés et les deux mandats présidentiels de Poutine ont été marqués par l’assassinat de 22 journalistes, dont Anna Politkovskaïa (les commanditaires du meurtre courent toujours).

Fin 2007, la question du pouvoir se trouve à nouveau posée : Poutine ne peut pas, sauf à modifier la Constitution, briguer un second mandat. Son premier ministre et dauphin désigné, Dimitri Medvedev, prend sa place à la présidence et Poutine prend la tête du gouvernement pour quatre ans. Il est prévu de retourner la bascule en 2012. C’est l’invention de la « tandemocratie ». Derrière la façade se jouent alors sans doute des rapports de force complexes entre diverses factions des élites dirigeantes, mais ceux qui espéraient que l’élection de Medvedev contribuerait à une ouverture du régime en sont pour leurs frais.

Le régime de Poutine semble avoir bénéficié un temps d’un véritable soutien d’une partie de la population. L’effet conjugué de l’expansion économique des années 2000 (qui a aussi profité à la petite bourgeoisie) et du discours nationaliste flattant l’ego patriote russe peut l’expliquer. Surtout en comparaison de l’inflation galopante, du chaos et de l’insécurité qui régnaient dans les années Eltsine. Mais nul démagogue bourgeois n’est à l’abri de l’usure au pouvoir, surtout sous effets de la crise de 2008…

L’annonce, en septembre 2011, d’une inversion des rôles entre Medvedev et Poutine, ce dernier souhaitant reprendre son poste de Président de la Fédération de Russie en mars 2012, a fait l’effet d’une douche froide. Et les fraudes massives aux élections législatives de décembre 2011 ont mis le feu aux poudres.

S.C.


[1Plusieurs attentats ont lieu en août et septembre 1999 dans ces villes. À Moscou deux immeubles sont détruits et un autre très endommagé par des bombes les 4, 9 et 13 septembre, faisant 359 morts et des centaines de blessés. Les autorités accusent les Tchétchènes, mais des pistes mèneraient vers les services secrets russes, qui auraient pu organiser les attentats.

[2Les deux guerres déclenchées par la Russie en Tchétchénie ont fait environ 160 000 morts.

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