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Jeux Olympiques de Tokyo

Le sexisme et le voyeurisme médailles d’or

6 août 2021 Article Société

(Photo : équipe féminine norvégienne de handball de plage)

« Ras-le-bol des voyeurs et des tenues sexy ». C’est, en résumé, le message que veulent faire passer un certain nombre d’athlètes féminines qui participent aux Jeux olympiques.

En fait la fronde avait commencé dès la mi-juillet, lors du championnat d’Europe de beach handball. L’équipe féminine norvégienne avait fait parler d’elle en refusant de porter le maillot deux pièces réglementaires avec bikini « ajusté et échancré » comme le prévoyait le règlement. Lors de leur rencontre face aux Espagnoles, les sportives scandinaves étaient apparues en short, comme leurs homologues masculins. À l’issue de la compétition, les Norvégiennes s’étaient vu infliger une amende de 1 500 euros par la Fédération européenne. À la même époque, le 18 juillet, la double championne du monde paralympique, Olivia Breen, avait été accusée par un officiel d’avoir porté un slip « trop court et inapproprié » lors de l’épreuve du saut en longueur des championnats d’Angleterre. Quant à la nageuse olympique Alice Dearing, qui est noire, elle s’était vue, de son côté, opposer une interdiction de porter un bonnet de bain pour ses cheveux noirs naturels [1].

À noter que ce genre d’interdictions et de remarques ne concerne que les femmes. Leurs collègues masculins n’ont jamais été soumis à de telles contraintes ou à de telles critiques.

Une réaction des sportives

Pour réagir, à Tokyo, dès le début des compétitions, les gymnastes allemandes –Élisabeth Seitz, Sarah Voss et Kim Bui – ont remplacé le justaucorps par la combinaison rouge et blanche longue (ce qu’elles avaient déjà fait lors des derniers championnats d’Europe) en déclarant : « Chaque femme, chaque personne, devrait décider de ce qu’elle porte » [2].

« Nous, les femmes, voulons toutes nous sentir bien dans notre peau. Dans notre sport, cela devient de plus en plus difficile au fur et à mesure que l’on sort de son corps d’enfant », déclarait Sarah Voss, en avril. « Quand j’étais petite, je ne voyais pas les tenues de gymnastique serrées comme un gros problème. Mais quand la puberté a commencé, quand mes règles sont arrivées, j’ai commencé à me sentir de plus en plus mal à l’aise », ajoutait-elle. Un propos qu’appuyait sa coéquipière, Elisabeth Seitz, sur le site internet de la SWR, la radio-télévision du Sud-Ouest de l’Allemagne. Cette dernière estimait que le justaucorps court exposait les jeunes gymnastes, filles ou femmes, notamment sur Internet où leurs photos circulaient et « attiraient beaucoup de monde... et pas seulement les amateurs de sport » [3].

Un voyeurisme qui rapporte

« Ce qui est clair, c’est que c’est en grande partie commercial », estime Janice Forsyth, ancienne directrice du Centre international d’études olympiques de l’université de Western en Ontario (Canda), contactée par France 24. « Les fédérations internationales essaient de faire appel à ce qu’elles pensent être un public masculin hétérosexuel, elles essaient de les titiller pour qu’ils regardent les sports féminins, en arguant que cela augmente l’intérêt et rend ainsi le sport plus lucratif en attirant potentiellement des sponsors et des contrats de télévision ou même des parrainages d’entreprises pour les athlètes ».

En 2008, une étude corroborait déjà cette vision sexiste du sport féminin. Réalisée à partir des images filmées lors des matchs de beach-volley des Jeux olympiques de 2004, à Athènes, elle révélait que 37% des plans étaient centrés sur la poitrine ou les fesses des joueuses. La même année le président de la Fédération internationale de football, Sepp Blatter, avait souhaité, pour mieux valoriser le football féminin, que les joueuses portent des tenues « plus sexy, des shorts moulants par exemple ».

Bref une conception purement sexiste et commerciale du sport. C’est beau l’idéal olympique.

J.L.


[1France 24.com, 27 juillet 2001

[2Le Monde, 27 juillet 2021

[3Madame Le Figaro, 27 juillet 2021

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