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DOSSIER : Les retraites en question : faux problèmes, vraies arnaques

Le gros mensonge du « choc démographique »

Mis en ligne le 19 janvier 2003 Convergences Politique

L’argument choc de tous ceux qui prétendent réformer les retraites pour les sauver, c’est la démographie. Le baby-boom de l’après-guerre va se transformer en papy-boom, un nombre croissant de salariés vont bientôt partir à la retraite, remplacés par de nouvelles générations d’actifs moins nombreuses. Si le taux de natalité actuelle reste constant, et l’espérance de vie continue de croître au même rythme, il y aurait donc en 2040, 21,6 millions de personnes de plus de 60 ans (contre 12,1 millions en 2000) et seulement 29,6 millions de personnes de 20 à 59 ans (contre 31,6 millions en 2000). Le rapport Charpin, commandé par Jospin en 1999, estime ainsi qu’il y avait 3 cotisants pour un retraité en 1970 mais qu’il devrait y en avoir moins de deux dès 2010 et 1,6 en 2040. La charge des retraités pour les actifs deviendrait deux fois plus lourde, et l’augmentation des cotisations sur les salaires serait alors insupportable.

Il faudrait donc allonger la durée de cotisation et reculer l’âge de départ à la retraite, diminuer les pensions (leur « taux de remplacement ») ou encore développer une forme alternative de retraite : les fonds de pension.

Des chiffres en trompe-l’œil

Comme bien souvent, ces chiffres ne parlent que sous la torture.

D’abord il vaudrait mieux calculer le ratio inactifs/actifs plutôt que le ratio plus de 60 ans/20-59 ans, qui est systématiquement mis en avant. Car il faut tenir compte du fait que les salariés doivent en quelque sorte entretenir non seulement les retraités, mais aussi les jeunes, qui ne travaillent pas encore. Or le nombre des jeunes, pour les mêmes raisons démographiques, aura tendance à diminuer. On passerait de 1,27 inactifs (retraités, moins de 20 ans, mais aussi jeunes de plus de 20 ans de plus en plus nombreux à entrer tardivement dans la vie active), pour un actif en 2000, à 1,5 pour 1 en 2040. Ce n’est plus un doublement mais une simple augmentation de 18%.

Et puis tous les actifs ne travaillent pas, puisqu’on compte dans cette catégorie les chômeurs, qui sont bien contre leur gré dans l’impossibilité de cotiser. Le véritable ratio pertinent pour prédire l’avenir financier des retraites serait donc le ratio inoccupés/occupés (c’est-à-dire les inactifs, jeunes et vieux, et les chômeurs). A cause d’un chômage massif, ce rapport était de 1,59 en 1995. En 2040, si toute la population active était au contraire occupée, le ratio serait de 1,50, soit un rapport… plus favorable que celui d’aujourd’hui. Et même si le taux de chômage restait de 5% en moyenne entre 2010 et 2040, il serait de 1,63. Soit 2,5% seulement de plus qu’aujourd’hui. Où serait alors le problème ?

En réalité, l’argument du « choc démographique » ne tient pas debout, et la menace qui pèserait sur les retraites par répartition ne repose que sur une hypothèse, que retiennent tous les rapports commandés par les gouvernements : le maintien d’un chômage massif, de 9 % en moyenne !

Qu’est-ce à dire d’autre que le combat pour la défense des retraites est inséparable de celui pour mettre fin au chômage ?

Un problème non démographique, mais financier

Charpin prédisait que la part des retraites dans le PIB devrait augmenter de 11,6% en 1999 à 15,7% ou 16,6% en 2040 selon les hypothèses retenues. Mais si la productivité progresse pendant cette période de 1,7%, soit moins vite que depuis le début du XXe siècle (2 % par an en moyenne), le PIB français aura quand même doublé. Alors si sur 100 F de richesses produites en 1999, 11,6 F ont servi aux pensions, en 2040 sur 200 F de richesses produites par le même nombre de travailleurs, 33,2 F iraient aux retraités, mais 164,8 F iraient aux actifs contre 88,4 F aujourd’hui ! Où serait le drame ?

Le fond de l’affaire, c’est justement que le patronat, soutenu en cela par les dirigeants de la droite et du parti socialiste, compte bien se réserver l’exclusivité des gains de productivité. Depuis 20 ans, la part des salaires dans la valeur ajoutée des entreprises est passée de 70 % à 60 %, celle des profits montant de 30 à 40 %. C’est cette évolution qui déséquilibre vraiment le financement des retraites et que les patrons espèrent prolonger.

Cette campagne de mensonges et de manipulations des chiffres n’a pour objectif que de convaincre les travailleurs d’une faillite inévitable des retraites s’ils n’acceptent pas de nouveaux sacrifices.

Bernard RUDELLI

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