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Accueil > Les articles du site > L’émancipation des femmes, un combat révolutionnaire…

La révolution russe de 1917, réalisations et idéaux d’avant-garde

Mis en ligne le 11 mars 2021 Article Monde

La révolution russe nous a légué un héritage précieux en matière d’avancées dans le combat des femmes. C’est pourquoi nous, communistes révolutionnaires, considérons qu’aujourd’hui encore elle est d’actualité pour l’émancipation totale des femmes.

Les femmes, détonateur de la révolution

La révolution commence le 8 mars 1917 (à l’époque, du fait d’un autre calendrier, c’étaient des journées « de février »), avec une grève d’ouvrières du textile de Saint-Pétersbourg qui s’adressent aux autres ouvriers, ce qui déclenche le rapide développement du mouvement révolutionnaire. Mais pas seulement : à tous les moments de la période révolutionnaire, des femmes prennent en main leur destinée et participent aux grèves, aux soviets, à l’armée rouge. Elles organisent des cuisines roulantes, des détachements sanitaires et des centres de soin, elles mènent des campagnes d’agitation. Elles combattent au front, creusent des tranchées. Des milliers d’ouvrières luttent au sein des sections de mitrailleurs, des services de renseignement et d’espionnage dont elles sont parfois responsables. Elles gardent les barrages routiers, s’occupent des protections en fil barbelé et empêchent la fuite des déserteurs. Sans la participation active des femmes, ouvrières et paysannes, la défense de la révolution aurait été impossible. Ce rôle, c’est elles qui l’ont imposé à tous les échelons, et elles se sont bien passées de l’avis de leurs camarades masculins dont la majorité ne voyait pas forcément d’un bon œil un tel engagement. Elles ne les ont pas attendus, et ont fait elles-mêmes leur place.

Le gouvernement révolutionnaire mis en place pulvérise l’édifice économique bourgeois, qui est fondé sur l’existence de cellules familiales privées éclatées, sur l’oppression et la non-émancipation des femmes.

Est mis en place un gouvernement où, pour la première fois au monde, siègent des femmes : Alexandra Kollontaï, bolchevik qui devient commissaire du peuple à l’Assistance sociale, comme Konkordia Samoïlova ou Nadejda Kroupskaïa. D’autres militantes s’investissent dans la direction du Parti bolchévique et dans les provinces aussi, de nombreuses femmes sont commissaires à des tâches d’importance. Elles éditent leur propre journal, L’ouvrière.

Que fait ce gouvernement ? Il proclame :

  • l’abolition du mariage religieux (le mariage est remplacé par une formalité civile) ;
  • la reconnaissance des enfants nés hors mariage ;
  • la totale dépénalisation de l’homosexualité et de l’adultère ;
  • la facilitation du divorce, la fin de l’autorité du chef de famille et un nouveau code de la famille qui promeut l’égalité absolue entre mari et femme. Cette dernière devient complètement indépendante de son mari, c’est-à-dire qu’elle possède son livret de travail personnel et sa propre carte de ravitaillement ;
  • légalisation de l’avortement en 1920 – le pouvoir soviétique est le premier État à le faire. La même année en France, une loi très répressive punit d’emprisonnement ou d’amende le fait d’avorter, de faire avorter, de défendre l’avortement ;
  • abolition du mariage forcé et de la polygamie.
  • protection de la maternité : les sections féminines du Parti bolchévique élaborent une réglementation assurant la protection de la santé et de la force de travail de la femme, en particulier des congés maternité ;
  • le salaire, fixé par les travailleurs eux-mêmes, dépend de la tâche effectuée, quel que soit le sexe.

Passer de l’égalité en droit à l’égalité dans les faits

Il ne suffit pas de proclamer la libération de la femme pour qu’elle soit effective. Dans cette société russe qui sort à peine du tsarisme, les préjugés sur le rôle de la femme et son statut mineur dans la société sont profondément enracinés, et comme le constatent les militants, la conscience sur ces questions ne va pas aussi vite que la révolution. Parmi elles et eux, la question essentielle est posée : comment faire pour que la libération soit réelle et non seulement « abstraite » ? Comment anéantir à la racine les conditions qui asservissent la femme ?

Pas si simple ! Trotski posait bien le problème :

« Établir l’égalité politique de la femme et de l’homme dans l’État soviétique – c’est un des problèmes, le plus simple. Établir l’égalité économique du travailleur et de la travailleuse dans la fabrique, à l’usine, au syndicat – c’est déjà beaucoup plus difficile. Mais établir l’égalité effective de l’homme et de la femme dans la famille – voilà qui est incomparablement plus compliqué et qui exige des efforts immenses pour révolutionner tout notre mode de vie. Et cependant, il est évident que tant que l’égalité de l’homme et de la femme ne sera pas établie dans la famille, on ne pourra pas parler sérieusement de leur égalité dans la production ni même de leur égalité politique, car si une femme est asservie à sa famille, à la cuisine, à la lessive et à la couture, ses possibilités d’agir dans la vie sociale et dans la vie de l’État sont réduites à l’extrême. » (1923, Les questions de mode de vie)

Ce ne sont pas les réformes sur le papier qui à elles seules changent la vie ! D’où la nécessité d’aller plus loin pour modifier le rôle de la femme dans la société, l’État et la famille.

Dès les premières années de son existence, le pouvoir soviétique tente de créer les conditions nécessaires pour libérer la femme des tâches domestiques. Comment ? En jetant les bases d’un mode de vie collectif. En remplaçant l’économie domestique familiale individuelle par une planification sociale de l’économie et une consommation collective. Alexandra Kollontaï parle d’une économie domestique communautaire. Qu’est-ce que ça signifie concrètement ? Qu’une des tâches du nouveau pouvoir ouvrier consiste à développer tout un réseau d’équipements collectifs : autant de services qui devaient alléger le poids des tâches maternelles et ménagères portées individuellement par toutes les mères de famille.

Le soin et l’éducation des enfants ne sont plus des tâches privées et familiales, elles sont prises en charge par la société. Exemples :

  • Les cantines municipales et les repas gratuits pour les enfants et les adolescents. La travailleuse commence à se rendre compte du temps qu’elle économise grâce aux repas tout prêts de la cantine.
  • Maisons de repos, blanchisseries, dispensaires.

Il s’agit de réorganiser le quotidien dans l’intérêt des travailleuses, non pas « par en haut » mais par l’énergie des femmes elles-mêmes. Toujours selon Trotski : « Nous n’avons donc rien d’autre à faire que de soutenir leur esprit d’initiative et d’ouvrir un champ suffisamment vaste à son application. […] Une telle évolution serait extrêmement avantageuse pour l’ensemble de la population. »

Mais les femmes n’ont pas à prendre en charge les seules questions de la vie quotidienne. S’y ajoutent les responsabilités à prendre dans les secteurs de la production ! Une base solide pour la future libération de la femme : libérée du poids de la famille, elle peut participer à la vie sociale et politique et prendre toute sa place dans la construction de la nouvelle société.

La dure limite des conditions matérielles

Mais… mais… pour mettre en place ce réseau d’équipements collectifs, le pouvoir soviétique se heurte à une difficulté de taille : la pauvreté. Au sortir d’une guerre mondiale qui s’est suivie d’une guerre civile pour défendre l’État ouvrier contre les bourgeoisies du monde entier qui encerclaient militairement la Russie, dans l’attente d’une révolution qui gagnerait d’autres pays, et tout particulièrement l’Allemagne, le pays est exsangue. Les infrastructures sont dans un état catastrophique, on manque de tout : d’industries, de transports, d’électricité… La nourriture manque, le bois de chauffage aussi : impossible d’importer à cause du blocus mis en place par les puissances impérialistes… il faut vraiment se représenter un état de pénurie généralisée qui freine l’État ouvrier dans ses avancées.

Les restaurants collectifs servent de maigres repas dont la qualité laisse à désirer. Dans les blanchisseries, le linge est volé. Il n’y a pas de chauffage dans les crèches… Autant de raisons qui contraignent les familles à compenser ces manques au sein du foyer, et empêchent la femme de se libérer des corvées ménagères.

Pour autant, les fondements étaient là !

Avec ces mesures la révolution russe a indiqué la voie à suivre pour construire une société complétement différente, qui révolutionnerait les rapports entre les sexes. Une société dans laquelle le statut de la femme n’est pas déterminé par son mariage ou sa maternité. Vision extrêmement moderne d’ailleurs : la maternité ne consiste pas à laver soi-même les couches de son enfant, à le baigner, à le changer et à être clouée à son berceau. La vision du couple change, de même que celle de la famille, des relations amoureuses…

Parole de révolutionnaire : « Le système économique socialiste s’élaborant actuellement sous la dictature du prolétariat et soutenu par la participation active de toute la population à la production, conduira à un changement inconnu jusque-là dans l’histoire de l’humanité : l’émancipation de la femme dans la société. »

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