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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 132, septembre-octobre 2020 > Éducation nationale

La grande improvisation de l’Éducation nationale

1er octobre 2020 Convergences Politique

Comme on pouvait s’y attendre, la gestion de la crise sanitaire dans les établissements scolaires ressemble bien plus à du bricolage qu’à un véritable plan permettant aux élèves et aux personnels de travailler en toute sécurité. Il faut dire que le protocole sanitaire présenté fin août – long de six pages seulement ! – laisse beaucoup de place à la gestion locale et à l’improvisation, et il apparaît bien en-deçà de celui mis en place en mai et juin derniers.

Quelle distanciation en cas de sureffectifs ?

Alors que, à l’époque, le maître mot restait la distanciation physique, elle est désormais facultative et soumise à la possibilité d’accueillir tous les élèves. Et ce dans tous les lieux clos : salles de cours, ateliers, bibliothèques, réfectoires, internats. On retrouve alors les classes surchargées dénoncées par les enseignants, bien avant la crise sanitaire, avec des effectifs autour de 30 élèves dans les collèges et 35 et plus dans les lycées, parfois entassés dans des salles ayant une capacité d’accueil inférieure.

Des effectifs aussi importants qui ne permettent absolument pas de limiter le « brassage des élèves » comme l’annonçait Blanquer dans les médias. Surtout si le seul aménagement pour l’éviter consiste à quelques flèches de peinture indiquant le sens de circulation à l’entrée des établissements et qu’aucune modification d’horaires ou d’emploi du temps n’a été mise en œuvre pour éviter que les classes ne se croisent. Le ministère ne s’est résolu à aucune embauche ou aucune ouverture de locaux supplémentaires, qui auraient permis de limiter les contacts entre élèves et/ou personnels et ainsi de contenir la propagation du virus.

Quid des gestes barrières ?

Et ceux qui ont pu espérer que les efforts se reportent sur le nettoyage des salles ou la fourniture d’équipements ont là aussi dû se rendre à l’évidence.

D’un côté le protocole ne fait que présenter comme exceptionnelles des mesures déjà prises en temps normal mais pas toujours effectives pour cause de sous-effectif chronique d’agents comme le « nettoyage des sols et des grandes surfaces […] au minimum une fois par jour » ou encore que « les tables du réfectoire sont nettoyées et désinfectées après chaque service »… La notion de service étant floue : après chaque passage d’élèves ou à la fin de la période ?

D’un autre côté, si l’on insiste sur la nécessité de se laver les mains et sur le port du masque, les sanitaires sont souvent déjà depuis longtemps dans un état scandaleux et rien n’est fourni aux élèves de manière systématique : pas de gel hydro-alcoolique et les quelques masques mis à disposition pour les plus nécessiteux le sont le plus souvent à l’initiative de collectivités territoriales ou de chefs d’établissement bienveillants. Une situation similaire du côté des professeurs : malgré la « mise à disposition de ses agents (par le ministère) […] des masques dits « grand public », à raison de deux masques par jour de présence »,  la plupart du temps, ils n’ont reçu en tout et pour tout que 2 masques en tissus (déconseillés par l’Association française de normalisation, l’Afnor), nettoyables, pour toute l’année… et fournis par les collectivités territoriales. Malgré la crise sanitaire et ses propres recommandations, le ministère de l’Éducation nationale maintient sa volonté de ne pas dépenser un centime supplémentaire alors qu’il suffirait d’une petite fraction des centaines de milliards offerts au patronat pour accueillir les élèves et les personnels en toute sécurité.

Le protocole sanitaire : communiquer plutôt que protéger

Dans ce contexte, rien d’étonnant à ce que le nombre de cas dans les établissements scolaires ne fasse qu’augmenter, quoi qu’en dise le ministère. Et, là encore, leur gestion restait soumise à décision locale. Jusqu’à ce que le nombre de fermetures devienne trop important. Dans ce cas, c’est bien le ministère qui reprend la main et Blanquer s’est en effet félicité ce vendredi 25 septembre que « nous rouvrons plus de classes que nous en fermons », annonçant une baisse des fermetures à 600 classes et une soixantaine d’établissements sur le territoire. Alors que les chiffres officiels les portaient à respectivement 2 100 classes et 90 établissements scolaires moins de 24 heures auparavant [1]. Mais il suffisait pour cela de modifier le protocole sanitaire, allégé donc depuis le 21 septembre pour permettre un sacré tour de passe-passe statistique : désormais les autres élèves d’une classe dans laquelle un élève a été testé positif ne sont plus systématiquement considérés comme cas-contacts et ne sont donc plus soumis à l’isolement. Cela permet ainsi de maintenir les classes ouvertes malgré les risques.

Finies les incohérences dans la gestion par les ARS et les directions d’établissement : il n’y a plus de danger, silence dans les rangs ! Olivier Véran l’annonçait clairement en présentant les modifications : « Les enfants doivent aller à l’école et il n’y a pas lieu de renvoyer les élèves chez eux, voire de fermer des établissement entiers à la première alerte. » Alors que le protocole est censé s’adapter à l’évolution de la propagation, qui est en hausse, le gouvernement ne se cache absolument pas de le modifier pour transformer les établissements en garderie à grande échelle pour que les parents puissent aller au travail. La « priorité c’est que les parents puissent continuer à travailler » comme le disait Élisabeth Borne sur FranceInfo début septembre...

27 Septembre 2020, Adrian Lansalot


[1Blanquer et le ministère font à ce propos des déclarations qui varient à un rythme plus rapide que l’expansion du virus... comme l’a relevé le site de Franceinfo le 27 septembre : le plus probable est que le ministère n’en sait en réalité rien mais se sent obligé d’avoir l’air de contrôler la situation !

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