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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 57, mai-juin 2008

La SNCF déclare la guerre aux conducteurs

Mis en ligne le 13 mai 2008 Convergences Entreprises

Le Plan fret, qui poursuit le démantèlement de la SNCF et prépare la privatisation de nombreuses activités, constitue une attaque sans précédent contre les conditions de travail des conducteurs. Par delà les conducteurs, ce projet vise tous les cheminots.

Les conditions de travail des cheminots, en particulier des conducteurs, sont fixées par un ensemble de règlements assez complexes, résultat des innombrables négociations qui se succèdent depuis des années. Si complexes que les cheminots et les syndicalistes eux-mêmes ont parfois du mal à s’y retrouver ! En dépit de leurs limites, les règlements en vigueur, et notamment le « RH0077 » qui établit la durée maximum des journées de travail et des repos entre deux services et prévoit des compensations pour le travail de nuit, représentent une relative protection. Après avoir imposé l’allongement de la durée de cotisation retraite, c’est maintenant à ce dispositif que s’attaque la SNCF. Cette offensive patronale s’inscrit dans le cadre du Plan fret, qui va scinder la SNCF en deux : d’un côté le fret (le transport de marchandises) qui emploie environ 20 000 salariés, dont un quart de roulants, de l’autre le transport de voyageurs qui en emploie 145 000. Des cheminots qui travaillaient côte à côte vont se retrouver dans deux entreprises différentes, avec des administrations, des comités d’entreprise, des délégués, etc., différents ! Et aussi des règlements et des conditions de travail différents. Une division qui, de toute évidence, prépare la privatisation du fret, après un « dégraissage » qui supprimerait 6000 emplois. La nomination récente de Pierre Blayau à la tête du fret est symbolique : c’est l’ancien licencieur de Moulinex !

Une augmentation considérable de la durée du travail

Objectif déclaré de la SNCF : augmenter la productivité du fret de 30 % pour résister à la concurrence des nombreuses entreprises privées désormais présentes sur ce marché. Actuellement, à raison de 35 heures de travail par semaine, et compte tenu des diverses compensations, un conducteur fret effectue en moyenne 1568 heures de travail par an. La direction entend obtenir 1568 heures de conduite effective. Les modifications du RH007 portent donc à la fois sur les compensations du travail nocturne, sur l’amplitude des journées de travail et sur le temps de trajet nécessaire pour prendre son poste.

Aujourd’hui, un conducteur prend son poste dans une gare précise. Avec la réforme, il pourra le prendre dans n’importe quelle gare de sa ligne – et les lignes, dans le cadre du Plan fret, seront si étendues qu’un conducteur devra parfois effectuer 100 ou 150 kilomètres pour se rendre au travail ! Généreusement la SNCF se propose de lui rembourser son essence… Aujourd’hui, quand un conducteur a travaillé de nuit, même une courte période, entre 0 heure 30 et 4 heure 30, sa journée de travail est limitée à 7 heure. Avec la réforme, il faudra travailler au moins 1 h 30 dans cette même période pour que la journée soit limitée… à 8 heures.

Tout est à l’avenant, notamment la diminution brutale des repos de deux jours consécutifs qui passerait de 52 par an à 40 et la définition de ces repos. « Aujourd’hui, quand j’ai terminé mon travail le vendredi à 19 heure avant un repos double , explique un conducteur de Villeneuve (dépôt proche de la Gare de Lyon à Paris) , je prends mon travail le lundi au plus tôt à 6 heure. Avec la réforme, le patron pourra m’obliger à prendre mon service à 0 heure 1 minute du matin, et n’importe où sur la ligne ! »

En ce moment, les services de la SNCF ont déjà en compte la nouvelle réglementation pour élaborer les « roulements » (horaires) qui prendront effet en décembre (en fonction de la nouvelle réglementation).

Des miettes pour faire passer la pilule

La SNCF vient d’annoncer une série de contreparties financières : augmentation de la prime de traction (16 % mais en tenant compte du gain de productivité), rachat des repos non accordés au tarif forfaitaire de 50 €, indemnisation des jours de fête travaillés (100 à 126 € selon l’échelon) etc. Le patron espère ainsi opposer notamment les jeunes récemment embauchés, aux plus anciens qui supportent plus difficilement cette aggravation des conditions de travail. Au-delà de la pénibilité, ces réformes représentent un danger considérable pour la sécurité, alors que les incidents et accidents se multiplient depuis plusieurs années, telle la série de collisions qui se sont produites en mars à Villeneuve. Seule réponse de la direction : placarder des affiches incitant les cheminots à la vigilance !

Colère

Elle gronde chez les conducteurs du fret, mais aussi chez la plupart des autres conducteurs, et même chez les sédentaires. Car si la modification du règlement ne concerne pour l’heure que les premiers, il est clair que la volonté de la direction est de l’étendre aux autres catégories de cheminots. Une riposte réunissant non seulement les cheminots SNCF, toutes catégories confondues, mais aussi les cheminots du privé, est à l’ordre du jour. Ceux du privé ont d’ailleurs montré qu’ils n’étaient pas prêts à tout accepter : en mars, les cheminots d’Euro Cargo Rail du dépôt de Bourg-en-Bresse se sont mis en grève pour exiger le paiement de leurs heures supplémentaires et une programmation de leurs horaires permettant de gérer leur vie personnelle. L’unité de tous les cheminots est indispensable pour imposer l’alignement par le haut de la protection sociale et mettre un frein à ces attaques. Mais, cette fois, s’ils veulent se donner les chances de gagner, les cheminots ne devront pas laisser la direction de leur lutte à des syndicats qui ont montré lors de la grève pour la défense des retraites que leur objectif était davantage d’accompagner les réformes par des négociations bidon que d’affronter la SNCF et l’État.

25 avril 2008

Georges RIVIERE

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