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Menaces sur l’emploi dans l’industrie automobile

États-Unis 

General Motors : 49 000 ouvriers en grève, contre les fermetures de sites, pour l’augmentation des salaires… et pour l’embauche des intérimaires !

Mis en ligne le 29 octobre 2019 Convergences Monde

49 000 salariés de General Motors entament ces prochains jours leur cinquième semaine de grève. Elle a commencé le 16 septembre dernier dans les 31 usines du groupe. La production est à l’arrêt aux États-Unis, des usines canadiennes et mexicaines sont touchées, le groupe a déjà perdu un milliard de dollars. Les revendications sont celles de tous les travailleurs de l’automobile partout dans le monde : augmentations de salaire, maintien en activité de toutes les usines, l’embauche des intérimaires.

Une grève massive qui a reçu le soutien de la population

Des piquets de grève ont fleuri devant l’entrée de toutes les usines du groupe, des témoignages de soutien et actions de solidarité se sont multipliés : klaxons des automobilistes, boissons et nourriture apportés sur les piquets de grève, soutien des syndicats d’autres branches (syndicat unifié de la logistique, l’union nationale des infirmières, celui des ouvriers d’American Postal, etc.), les camionneurs se sont engagés à ne pas assurer le transport des pièces. Comme pour les enseignants il y a quelques mois, le mouvement a reçu le soutien croissant de toute une partie de la population.

2018 : annonce de la suppression de 15 000 emplois

Les prétextes sont allés bon train ces derniers mois : investissements massifs à débourser dans la voiture sans conducteur, les moteurs électriques, le retournement supposé de la conjoncture automobile et la bien connue « concurrence mondiale ». Sur quoi General Motors annonçait en novembre 2018 la réduction de 15 % de ses employés, soit près de 15 000 emplois et la fermeture de sept usines : quatre aux États-Unis (dont celles de Lordstown dans l’Ohio et de Détroit Hamtramck dans le Michigan), une au Canada (le site d’assemblage d’Oshawa, en Ontario) et deux autres en dehors de l’Amérique du Nord.

GM a fait près de 10 milliards de dollars de bénéfice net l’année dernière, 35 milliards de dollars au cours des trois dernières années.

GM sauvé de la faillite sur les fonds publics avec la complicité du syndicat UAW massivement corrompu

Au bord de la faillite en 2008 au commencement de la crise, GM a presque eu le statut de « société nationalisée », tant elle a été renflouée par les contribuables à hauteur de 50 milliards de dollars rien qu’en 2009. Il s’agissait alors d’imposer tous les sacrifices aux ouvriers, les restructurations, changements de statuts, gels des salaires et suppressions de postes, avec la complicité active du syndicat UAW, lequel pleurniche aujourd’hui : « Nous avons été aux côtés de General Motors quand elle avait le plus besoin de nous. »

Et pour cause, c’est le syndicat UAW qui dès 2007 avait négocié la création de niveaux de salaires différenciés où des embauchés sont payés la moitié de ce que gagnent les plus anciens. Ensuite, l’emploi de travailleurs temporaires sans garantie. Enfin le syndicat avait concédé le recours à des sous-traitants.

De 2007 à 2015, il concède encore un demi-salaire et pas de pensions de retraite pour les nouveaux employés, de nouvelles « tranches » de salaires, pas de paiement des heures supplémentaires en cas de dépassement de la durée quotidienne de travail de huit heures. En 2018, alors que la direction menaçait tous azimuts, la direction de l’UAW avait accepté l’embauche de salariés à un « niveau inférieur » par la filiale GM Subsystems à Lordstown dans l’Ohio. Ce qui n’avait pas empêché la direction de fermer l’usine quand même.

C’est de notoriété publique : l’UAW est corrompu jusqu’à la moelle. Aujourd’hui, l’UAW négocie secrètement dans le dos des milliers de grévistes de la base et dans les strictes limites du budget imposé par l’état-major de GM.

Première revendication de la grève : en finir avec la division entre embauchés, sous-traitants et travailleurs temporaires

Mais le gros de la crispation des grévistes tourne autour du statut de ces salariés temporaires. Un employé de Ford, solidaire de la grève de GM est allé jusqu’à distribuer des T-shirts avec le message « la vie des travailleurs temporaires compte » (« Temps lives matter »). Comme l’écrit Jane Slaughter, dans un article publié le 2 octobre sur le site Labor Notes, « Sur les piquets de grève, […] la demande prioritaire qui s’exprime est “l’embauche des travailleurs temporaires” pour qu’ils deviennent travailleurs permanents. »

Jane Slaughter explique ainsi la solidarité spontanée entre embauchés, prestataires et intérimaires : chez GM, Ford et Chrysler, la direction des entreprises accorde depuis longtemps la préférence à l’embauche aux membres d’une même famille, « cette politique apparemment bienveillante est en train de se retourner contre elle. […] GM a divisé les travailleurs avec des salaires différents au sein des familles ; les familles s’unissent pour se battre pour les plus jeunes d’entre elles. »

Trump, ou le « protectionnisme solidaire »… de GM contre les grévistes

Cette solidarité et la force de la grève a entraîné le blocage de la production de toutes les usines de General Motors sur le territoire des États-Unis et donc l’arrêt de la production des usines de GM au Canada et au Mexique, où la direction s’est empressée de mettre 8 000 ouvriers au chômage technique (avec des pertes de salaires qui dépasse parfois les 50 %). Comme à son habitude, Donald Trump n’a pas tardé à tweeter : « Ce pays a fait beaucoup pour General Motors. Ils ont intérêt à retourner en Ohio et vite… », sous-entendant que les fermetures de sites sont dues à de prétendues délocalisations en Chine ou au Mexique, plus qu’aux gains de productivité que la direction comptait pourtant bien imposer aux travailleurs américains. L’UAW joue actuellement sur le même registre de « l’Amérique d’abord ». Contrairement à ce que prétendent Trump et l’UAW, les emplois ne sont pas partis en Chine (les 3,6 millions de véhicules produits y sont écoulés sur place).

Même si de nombreux grévistes du syndicat UAW ont voté Trump aux dernières élections, il n’est pas si sûr qu’ils se laissent entraîner si facilement dans les voies de garages nationalistes. À l’heure où nous écrivons, l’UAW croit avoir trouvé un accord négocié secrètement avec la direction de GM. Mais celui-ci doit obligatoirement être ratifié par les grévistes. Le syndicat n’a qu’une hantise : comme en 2015 à Chrysler, que les ouvriers de GM votent « non » et que le syndicat soit contraint de retourner à la table de négociation sous leur pression.

Le 20 octobre 2019, L.B.

Pour en savoir plus, voir les articles de Diane Feeley, Jane Slaughter et Chris Brooks publiés par Labor Notes (média de militants syndicaux aux États-Unis) sur le site https://www.labornotes.org. Articles traduits en français et restitués sur le site http://www.npa-auto-critique.org.

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Numéro 129, novembre 2019