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Dassault, Safran, Thales… Profiteurs de guerre et mauvais payeurs !

4 avril 2022 Article Entreprises

(Photo : rassemblement de salariés de Thalès à La Défense en mars 2022)

Des luttes bousculent ces temps-ci les sites de production des producteurs français d’armement. Leurs profits sont mirobolants et leurs indices boursiers s’envolent alors que continue le conflit en Ukraine : l’avenir des marchands de mort semble prometteur. Celui des travailleuses et des travailleurs ? Beaucoup moins. Partout les augmentations qu’ont lâchées les capitalistes de l’aéronautique militaire sont bien en dessous des besoins, alors que l’inflation n’est pas près de s’arrêter. Une situation révoltante dans une industrie où le business est florissant, les carnets de commandes pleins mais où les salaires, eux, ne décollent pas. Chez les trois gros constructeurs d’engins de mort, Dassault, Thales et Safran, le mot d’ordre de 200 euros d’augmentation pour toutes et tous semble s’imposer auprès des grévistes. Dans les usines de ces entreprises, la lutte continue pour obtenir de réelles augmentations qui pourraient compenser les deux dernières années de stagnation et l’inflation.

Chez Dassault

Mérignac, Martignas, Poitiers, Biarritz, Argonay sont des sites où les piquets de grève se sont multipliés et continuent. La direction a bien lâché du lest, d’abord une hausse de 3,5 % pour les ouvriers et 3,75 % pour les cadres, une distinction qui n’a fait qu’attiser la colère. La direction a ensuite annoncé 140 euros brut, 60 de moins que ce que demandait la CGT qui avait déjà revu ses exigences à la baisse, réclamant non plus 200 euros net mais brut. Trappier, le PDG de Dassault, espérait voir cette aumône acceptée, et la lutte cesser, sous la contrainte, par un chantage révoltant : ou bien accepter les 140 euros, ou bien retourner aux 3,5 % annoncés auparavant. Peine perdue, les travailleuses et les travailleurs comptent bien continuer tant que le compte n’y est pas, certains exigent même, et on les comprend, 200 ou 300 euros net.

Chez Thales

L’humeur est aussi combattive, à Cannes, Toulouse, Élancourt, Cholet et ailleurs. La direction refuse de négocier des hausses de salaire supérieures à 3,5 %, ce qui paraît largement insuffisant aux grévistes alors qu’on annonce que l’inflation pourrait atteindre les 4 %. La lutte s’organise donc, dirigée par une intersyndicale. C’est plus d’un millier de personnes qui se sont réunies pour manifester devant le siège de Paris, exigeant que les bénéfices faramineux profitent d’abord à celles et ceux qui ont produit ces richesses. En représailles face aux actions des grévistes, Thalès a déjà commencé à assigner en justice certains d’entre eux, comme à Méru ou à Élancourt où les représentants syndicaux sont attaqués pour avoir organisé des barrages filtrants afin de discuter de la lutte avec les collègues qui continuent le travail. [1] Quant aux représailles envers Thales comme envers Safran, après que l’ONG Disclose a révélé le commerce illégal d’équipements militaires avec la Russie, on peut toujours rêver.

Chez Safran

Un accord avait été signé en octobre. Une augmentation de seulement 1,5 % pour les ouvriers avait été octroyée, avec la même logique de division entre ouvriers et cadres au détriment des premiers, une augmentation loin d’être à la hauteur de l’inflation et de l’enrichissement indécent du groupe. De nouvelles négociations doivent avoir lieu le 9 mai mais la direction a déjà fait savoir qu’elle ne comptait pas augmenter les salaires, tout juste est-elle prête à négocier les primes d’intéressement [2]. Bien sûr, à arguer pour ne pas satisfaire les revendications de ses difficultés à venir : son partenariat avec la Russie dans la production des Superjet est maintenant à l’arrêt. Mais il faut rappeler les 22 % de bénéfices de la seule branche hélicoptère du groupe, les milliards de profits accumulés ces dernières années sur le dos des travailleuses et des travailleurs au chômage partiel et des intérimaires foutus dehors. Des débrayages ont eu lieu en janvier et février à Bordes, Corbeil, Villaroche, Châtellerault ou encore à Chauray. Un rassemblement d’ouvriers, dont une partie venait de Saint-Quentin dans les Yvelines, a même eu lieu le 17 février, réunissant 600 personnes devant l’usine de Corbeil. Dans l’ensemble de l’aéronautique militaire, les constats sont les mêmes : un refus de la part des directions de payer décemment les travailleuses et les travailleurs qui font leur fortune, avec des tentatives de division et des concessions aussi semblables que ridicules. Cela dit, du côté des ouvrières et ouvriers, des revendications communes, des intérêts, une lutte commune. Il est du domaine du possible que les travailleuses et travailleurs de ces fleurons de l’armement unissent leurs forces pour faire plier ces profiteurs de guerre. Une lutte qui pourrait inspirer l’ensemble du monde du travail qui subit partout la même exploitation.

Bien sûr, cette lutte de salariés de l’industrie d’armement est complexe, à l’heure d’une hypertrophie sans commune mesure des budgets militaires, d’une augmentation de la production et des profits des marchands de canons – un secteur capitaliste des plus nuisibles pour l’ensemble de la société. Pas de raison, bien évidemment, que les travailleurs et travailleuses en fassent les frais. Mais voilà une lutte qui a précisément de quoi donner des idées sur les perspectives qui pourraient s’ouvrir par l’expropriation des profiteurs de guerre. Leur capital accumulé pourrait être mis au service de toutes et tous, les compétences des ouvriers, techniciens et ingénieurs pourraient être facilement et rapidement recyclées pour la production de biens utiles. La manne serait largement suffisante aussi pour financer l’accueil de tous les réfugiés, qui pour beaucoup ont été jetés sur les routes par les guerres.

Marinette Wren

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