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DOSSIER : Douce pour les profits, salée pour la population : le scandale de l’eau

Chère eau...

Mis en ligne le 10 novembre 2005 Convergences Société

Au forum de La Haye, en 2000, la Commission mondiale sur l’eau prétendait que « pour fournir une eau saine à la population le secteur privé doit prendre la direction des opérations d’approvissionnement car celles-ci nécessitent des sommes d’argent considérables » tout en prônant l’adoption d’une « facturation réaliste », sous prétexte de... stopper le gaspillage. Le tout résumé par cette maxime : « L’usager doit payer ».

En France les chiffres sont éloquents. Entre 1990 et 1999, le prix moyen a ainsi doublé, passant de 9F/m3 à 17F/m3, et les disparités se sont creusées, le tarif pouvant varier du simple au double d’une région à l’autre [1]. En janvier 1997, le rapport de la Cour des comptes estimait que « la hausse du prix est bien à mettre en relation avec la délégation des services de l’eau ». En ce moment même, la hausse moyenne est de 3,6 % par an, soit deux fois l’inflation. Et de nouvelles hausses sont annoncées prétendument à cause de la nécessaire rénovation des dizaines de milliers de kilomètres de canalisations vieillissantes. Petit hic : les usagers ont déjà payé une somme de 3 milliards d’euros pour ces mêmes travaux qui n’ont jamais été réalisés comme prévu...

Chez nos voisins de Grande-Bretagne, la privatisation en 1989 a entraîné une hausse des prix de 106 % entre 1989 et 1995. Corrélativement, le nombre d’abonnés victimes de coupures pour ne pas avoir pu faire face à leur facture a connu une hausse de 50 %.

Surtout pour les plus pauvres

Mais dans les pays pauvres, là où les trusts ont pris le contrôle de la gestion de l’eau, les hausses de prix s’avèrent encore bien plus douloureuses. Par exemple, aux Philippines, lorsque les trusts français Suez et américain Bechtel se sont partagés la distribution de l’eau de la ville de Manille, ils ont imposé des hausses de tarifs de 500 % et 700 % respectivement entre 1997 et 2003.

Factures insupportables, puis coupure d’eau, tel est le sort réservé aux populations pauvres, avec des conséquences carrément dramatiques. Ainsi, lorsqu’en 1996, certaines municipalités d’Afrique du Sud ont livré la distribution d’eau à Suez et Vivendi, les pauvres des quartiers se sont vu supprimer la colonne d’eau publique qui les alimentait et en ont été réduits à consommer l’eau de rivières polluées. Conséquence : une épidémie de choléra qui a fait 270 morts. « Si nous pouvions avoir de l’eau, alors nous serions vraiment libres » dirent alors ces anciennes victimes du régime d’apartheid. À Abidjan aussi, la privatisation de l’eau a été directement responsable de nombreux cas de choléra chez les plus pauvres : pour accéder à l’eau qui leur était refusée, ils avaient creusé eux-mêmes des puits, lesquels se sont avérés communiquer avec des fosses septiques...

Simone CANETTI


Ils nous mettent au goutte à goutte...

En France, la sécheresse de cet été a été l’occasion médiatique de relancer une campagne contre la « chasse au gaspi ». La hausse des tarifs aidant, les réducteurs de débit en tout genre et les systèmes individuels de récupération des eaux pluviales font recette.

Les pouvoirs publics ne sont pas les derniers à encourager cette tendance. Entrée en vigueur cet automne 2005 à Paris, la loi dite de « Solidarité et renouvellement urbain » incite les usagers à installer des compteurs individuels. Officiellement, il s’agit de permettre à chacun de contrôler sa consommation, voire de « responsabiliser » des usagers dépensiers. Mais le quotidien le Parisien relevait que les frais d’installation d’un compteur s’élèvent à 150 €, à quoi il faut ajouter un surcoût de redevance annuel qui s’élève à 50 € en option location et à 37 € si on choisit de devenir propriétaire du compteur. Pour une facture d’eau annuelle moyenne de 277 €, le coût du compteur entraînerait donc une hausse de 18 %. Merci pour la leçon d’économie !

Ces offres, transmises par la mairie, nous viennent bien entendu des délégataires privés comme Veolia et Suez. Eux au moins y trouvent leur compte.

S.C.


[1M. Laimé, « Le Dossier de l’Eau : Pénurie, Pollution, Corruption », Editions du Seuil, mars 2003.

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