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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 1, janvier-février 1999 > DOSSIER : Loi Aubry, le piège

DOSSIER : Loi Aubry, le piège

Air France : un accord « gauche plurielle »

Mis en ligne le 1er février 1999 Convergences Entreprises

Air France vient de signer un accord « exemplaire », selon les dires de la Direction, du gouvernement et... de l’Humanité.

La Compagnie est en phase de développement (elle prévoit une croissance moyenne de 5% par an dans les années à venir), et de privatisation (l’ouverture du capital est prévue ce printemps).

Comme tous les bons gestionnaires capitalistes, les dirigeants d’Air France (et le Ministère des Transports) veulent que cette expansion serve à augmenter les capacités d’autofinancement et à assurer des profits financiers attractifs pour les futurs actionnaires. La méthode est simple : éviter une augmentation de la masse salariale par le blocage des salaires et une flexibilité maximale permettant que l’augmentation d’activité se fasse avec le minimum d’embauches. Au total Spinetta, le PDG socialiste d’Air France, a prévu, avec l’aval de son ministre communiste, d’arriver à 3 milliards de francs d’économie par an.

La Direction a passé ces dernières semaines un accord avec les pilotes qui prévoit un blocage des salaires pendant sept ans, et d’acheter la paix sociale dans les cockpits en proposant aux navigants d’acheter un gros paquet d’actions à des tarifs intéressants. Le principal syndicat de pilotes a signé cet accord.

Maintenant, la Direction s’appuie sur les négociations de la loi Aubry pour obtenir un même pacte de paix sociale pour le personnel au sol.

Un accord de paix sociale pour mieux privatiser

Elle a mis sur pied un accord global sur trois ans. Cet accord fait miroiter la création de 4000 emplois dans cette période et la presse a largement relayé cette information. Mais en fait ces créations (seulement promises) correspondront au minimum indispensable dans les secteurs les premiers touchés par l’augmentation d’activité.. De même, elle s’engage à ce que le passage à 35h se fasse sans baisse de salaire. Mais cet affichage exemplaire cache d’autres réalités :

  • la Direction ne veut créer aucun emploi dans les secteurs du fret, de la maintenance, de nombreux secteurs administratifs ;
  • de même, elle compte bien déduire du temps de travail effectif le maximum de pauses payées et affirme déjà que par exemple dans la maintenance industrielle le temps de travail « constaté » est de moins de 36h pour 39h payées !
  • mieux encore, elle ne s’engage à appliquer une réduction du temps de travail de 10% qu’en échange de l’annualisation, notamment pour les 2000 ouvriers et techniciens travaillant en continu (3x8, 7/7) et ayant donc, conformément au Code du Travail, un horaire de 35h hebdo pour compenser la pénibilité ;
  • elle compte instituer partout annualisation et flexibilité ;
  • aucun engagement à la diminution de la précarité (CDD, temps partiels) ni du passage croissant d’activité à la sous-traitance ;
  • quant aux salaires, aucune augmentation générale prévue dans les trois prochaines années, alors qu’il y a eu au total 1% d’augmentation générale depuis janvier 93 ! Pis, elle remet en cause la majoration de 100% des heures de nuit, dimanche et fêtes !

En conclusion, la Direction s’applique essentiellement à préparer le passage légal à 35h au 1er janvier 2000 et à permettre de faire faire autant de travail, ou même plus, en aggravant les conditions de travail du personnel au sol. Dans ce cadre, l’engagement au maintien du salaire et la promesse des embauches (« si les hypothèses économiques se confirment ») n’ont rien d’un cadeau ! L’objectif de la Direction est bien la diminution de la part des salaires pour financer sur le dos des salariés l’achat d’avions nouveaux et la rémunération des actionnaires.

A Air France, comme ailleurs, ce n’est pas à une réduction du temps de travail avec amélioration des conditions de travail et embauches correspondantes qu’on a à faire.

Spinetta et Gayssot ont obtenu l’aval de FO, CFDT et CGC pour l’accord global et compte faire signer des accords secteur par secteur avec les aides de l’Etat là où le développement de l’activité imposerait de toutes les façons des embauches.

C’est bien un accord en trompe l’œil qui promet en fait 4 heures de moins (au mieux) pour faire 15% de boulot en plus... et avec le même salaire !

Mais le jour même de la signature, les mécaniciens de la maintenance Roissy partait en grève, bloquant pendant plus d’une heure le Concorde Paris New York. Lundi 11, le mouvement s’étendait à la maintenance Orly, et de nombreux vols étaient supprimés ou retardés par le blocage des pistes.

Au cœur de ce mouvement, le refus de la perte de rémunération des heures majorées, le refus de la flexibilité maximum, l’exigence d’une réelle réduction du temps de travail avec des embauches.

La CGT, Sud Aérien et le SNMSAC (mécaniciens au sol), non signataires de l’accord, soutiennent ce mouvement, même si la CGT est visiblement l’objet de lourdes pressions. Visiblement les dirigeants de la CGT et du PCF ne comprennent pas qu’à Air France non seulement la CGT n’ait pas signé l’accord, mais qu’en plus elle soutienne une grève contre celui-ci ! Dimanche 17 janvier le mouvement de grève continuait...

17 janvier 1999.

Laurent CARASSO

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