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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 46, juillet-août 2006 > DOSSIER : Afghanistan, Irak, Iran, Somalie… l’islamisme face à l’impérialisme (...)

DOSSIER : Afghanistan, Irak, Iran, Somalie… l’islamisme face à l’impérialisme : ennemis irréductibles ou futurs partenaires ?

Afghanistan, Irak, Iran, Somalie... l’islamisme face à l’impérialisme : ennemis irréductibles ou futurs partenaires ?

Mis en ligne le 28 juin 2006 Convergences Monde

Les invasions éclairs de l’Afghanistan et de l’Irak semblaient démontrer qu’aucun régime - que ce soit celui de Saddam ou celui des Talibans, dictature nationaliste ou islamiste - n’était susceptible de résister à la puissance des États-Unis. Trois ou quatre ans plus tard, les occupants semblent s’enliser chaque jour un peu plus. Les régimes pro-américains mis en place sont contestés par des oppositions armées qui tiennent des bonnes parties de chacun de ces pays. Le gouvernement afghan de Karzaï n’a d’autorité que sur Kaboul, et encore ! Il a fallu des mois pour réussir à former un gouvernement irakien après l’élection d’un parlement qui devait marquer le triomphe définitif de la démocratie !

Tous les jours tombent des soldats américains (plus de 2 500 morts depuis leur entrée à Bagdad) et sans doute dix fois plus d’Irakiens, civils ou combattants. Saddam a été capturé, cela n’a rien changé. Zarkaoui, le leader de la branche irakienne d’Al Qaida a été tué. Cela ne changera certainement rien non plus. Le simple fait que le Mollah Omar et Ben Laden sont toujours insaisissables tandis que les résistances anti-US sont toujours plus actives suffit sans doute à démolir aux yeux des peuples du Moyen-Orient, ou musulmans en général, le mythe d’invulnérabilité que souhaitait réimposer l’Amérique de Bush.

Et il n’y a pas qu’en matière militaire que l’autorité américaine est battue en brèche, sa diplomatie aussi. Ainsi sur la question palestinienne : loin de parvenir à désamorcer le conflit et imposer enfin un modus vivendi, Bush a été amené à cautionner et soutenir la politique de Sharon et de son successeur Olmert, leur refus de toute négociation avec les Palestiniens et l’enfermement encore plus sévère de ceux-ci. Une politique qui a amené la victoire du Hamas, incontestable échec pour les États-Unis. Certes, le succès des islamistes libère encore un peu plus, dans un premier temps tout au moins, les dirigeants israéliens des contraintes que les États-Unis ou leurs alliés faisaient mine de vouloir leur imposer (sans aucun succès). Mais, même si l’élection qui a donné la victoire au Hamas a été essentiellement motivée par des raisons intérieures (corruption d’une Autorité palestinienne anti-démocratique, qui détourne même les aides humanitaires, et divisions du Fatah), elle a surtout été un désaveu de la politique de conciliation avec Israël à laquelle l’impérialisme américain poussait cette Autorité palestinienne.

Tous ces conflits amènent les peuples de la région à considérer que les Américains, comme les régimes qu’ils soutiennent, peuvent être combattus, voire tenus en échec. Mais aussi, et surtout, que les seuls aujourd’hui à proposer et mener ce combat sont les courants islamistes. Un sentiment conforté par les discours de Bush comme de ses partisans néo-conservateurs et intégristes chrétiens qui ne perdent pas une occasion pour appeler à la croisade contre le terrorisme islamiste sinon contre l’islam.

Les populations du Moyen-Orient ont certes rarement l’occasion d’exprimer librement leur opinion, encore moins leur volonté. Les indices sont pourtant assez nombreux pour qu’il n’y ait guère de doute du côté où elle penche aujourd’hui. La Palestine n’est pas un cas à part, où le Hamas, qui refuse les accords d’Oslo comme la reconnaissance à l’État d’Israël et affirme dans sa charte que « le Coran est notre constitution », a gagné les élections législatives en janvier 2006. On peut égrener les succès électoraux (dans des élections généralement sous le contrôle de leurs adversaires) obtenus ces deux dernières années par des courants islamistes. En Égypte, cédant à la douce pression américaine, Moubarak a permis des élections un peu plus ouvertes ; résultat : aux législatives de novembre 2005, les Frères musulmans sont devenus la première force d’opposition, avec 88 sièges sur 444 à l’Assemblée, alors qu’ils n’ont pu présenter des candidats que dans un tiers des circonscriptions. Peu après, aux élections législatives irakiennes de décembre 2005, c’est un courant fondamentaliste chiite favorable à l’instauration de la charia qui l’a emporté. Déjà, début 2005, une tendance des plus rigoristes du fondamentalisme wahhabite avait connu un succès aux élections municipales d’Arabie saoudite ; en mai 2005, en Iran, c’est un des plus conservateurs des dirigeants du fondamentalisme chiite, Mahmoud Ahmadinejad, qui a été élu président ; dans l’été 2005, le Hezbollah devenait la première force politique au Parlement parmi les chiites du Liban. En fait, partout les islamistes radicaux semblent gagner en poids politique : au Koweit, en Syrie, au Maroc, en Jordanie, dans les Émirats, etc.

La tâche est certes facile pour eux en l’absence de tout courant important laïque ou de gauche, pour ne pas parler de courant révolutionnaire, et devant le discrédit des régimes en place, tous des dictatures féroces d’abord pour leur peuple. Mais, incontestablement, ce sont eux qui apparaissent aux yeux des peuples de la région comme les premiers, sinon les seuls, opposants à l’impérialisme occidental.

Le sont-ils vraiment ? Jusqu’à quel point ?

24 juin 2006

Robert PARIS

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