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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 87, mai 2013 > DOSSIER : Le symptôme Cahuzac

DOSSIER : Le symptôme Cahuzac

À la classe ouvrière d’occuper la scène politique

Mis en ligne le 30 avril 2013 Convergences Politique

Indignations bien calculées, discours pompeux à l’Assemblée, larmes de colère feinte au journal télé, propositions de lois fantaisistes, appels à la démission du gouvernement, à un remaniement ou à une dissolution... Tous les politiciens bourgeois et les éditorialistes mondains jouent des coudes et proposent leur petite recette. Beaucoup de bruit pour rien... ou plus exactement pour masquer le fond de l’affaire dans un brouhaha général.

Le fond de l’affaire

Car, à l’heure de l’austérité, des licenciements et des chantages sur le coût du travail, c’est l’étalage de richesses dans la poche de ceux qui veulent nous les faire qui fait tache. C’est sur cet axe que la classe ouvrière aurait tout intérêt à s’exprimer, elle aussi, sur le terrain politique, pour ne pas le laisser aux seules pitreries de l’opinion bourgeoise.

600 milliards d’avoirs français placés sur des comptes offshore... cela donne une petite idée de tout le reste, de quoi relativiser les discours pleurnichards des grands patrons sur la crise ! L’évasion fiscale à elle seule représente un manque à gagner de 40 à 60 milliards pour l’État. Environ le budget de l’Éducation nationale, entre trois et quatre fois le prétendu trou de la sécu.

Un argument qui conduit une partie de la gauche et du mouvement syndical à se transformer en conseilleurs pour une bonne gestion du Trésor public. Pourtant, même si l’État se décidait par miracle à récupérer l’argent des impôts dans les poches pleines de la bourgeoisie, ce serait pour en faire quoi ? Le redistribuer en subventions à d’autres riches ? Le dépenser en grands projets inutiles sauf au portefeuille de quelques multinationales ?

Le scandale n’est pas que cet argent ait été bien caché, qu’il ait transité par des paradis fiscaux ou que bourgeois et politiciens aient géré leurs fortunes à la limite de la légalité. Ces sommes gigantesques ne proviennent pas de la corruption en elle-même, mais bel et bien de l’exploitation capitaliste, encore accrue au prétexte de la crise. C’est en fermant des usines, en accroissant l’exploitation dans d’autres, en comprimant les salaires, que la bourgeoisie s’enrichit de manière indécente. À ne plus savoir où placer son argent !

Pas d’état d’âme à l’Assemblée pour la légalisation du chantage patronal à l’emploi

Le 9 avril, une Assemblée chahutée par l’affaire Cahuzac votait dans l’indifférence la loi transposant l’Accord national interprofessionnel, dit de « compétitivité-emploi » qui légalise le chantage patronal. Chez Renault, chez Peugeot, dans toutes les entreprises du privé comme du public, les travailleurs devraient se serrer la ceinture, accepter des baisses de salaires et des suppressions d’emplois.

Pourtant si l’affaire Cahuzac montre quelque chose, c’est que les surprofits tirés de l’aggravation accélérée de notre exploitation s’accumulent sur les innombrables comptes en banque et portefeuilles d’actions de la grande bourgeoisie, même en temps de crise. Le mensonge le plus grave des politiciens bourgeois est bien de tirer prétexte de la faillite de l’État, qu’ils organisent eux-mêmes, pour imposer l’austérité. Même mensonge exactement de la famille Peugeot, qui annonce des milliards de pertes fictives pour justifier les suppressions d’emplois, ou du financier Gary Klesch qui dépose le bilan de Kem One après en avoir siphonné la trésorerie. [1]

Il n’est plus question d’accepter les sacrifices. Au contraire, si une crise politique s’ouvre à la suite de l’affaire Cahuzac, il sera vital que la classe ouvrière intervienne sur la scène politique et saisisse toutes les occasions pour avancer ses revendications : interdiction des licenciements, augmentation générale des salaires et des minima sociaux, embauches massives dans les services publics. Quitte à prendre la rue pour cela.

Faire de la politique notre affaire, pas leurs affaires !

Prendre leur place dans l’arène politique, c’est ce qu’ont amorcé les grévistes de PSA le samedi 13 avril en envahissant le Conseil national du PS. En pleine tempête Cahuzac, ils ont réaffirmé que le gouvernement était le complice actif de la famille Peugeot. Bien obligé de commenter, le ministre des Finances, Moscovici, s’est offusqué de la « politisation » des ouvriers d’Aulnay. Horreur, les médecins, professeurs d’université, patrons et hauts fonctionnaires ne seraient pas les seuls à faire de la politique !

Puisqu’il n’y a rien à attendre de ce gouvernement socialiste à part des mauvais coups, c’est à la classe ouvrière elle-même, avec ses propres méthodes, d’occuper le terrain politique. Non pas pour prendre position dans leurs vaines querelles, mais pour affirmer ses propres revendications et prendre ses affaires en mains.

Notre exercice de la transparence

Dans le cadre d’une lutte générale contre le capital, les travailleurs seraient collectivement capables de pister l’argent de la bourgeoisie. Car toutes les magouilles, tous les transferts d’argent propre ou sale, sont traités par petits bouts et bien malgré eux par des salariés des services de comptabilité, de la banque, de la finance, de l’informatique, du trésor public. Mettre en commun ces informations, les rendre publiques, serait la première étape d’un contrôle sur l’économie privée et les finances de l’État, d’une véritable transparence.

Les travailleurs n’ont pas besoin d’une nouvelle loi, d’un prétendu nouveau gouvernement ou d’un changement du numéro de la République. Mais de prendre confiance dans leur force collective, de mettre en commun leurs connaissances, leurs luttes et leurs revendications. Un tel sursaut politique ne dépend certes pas seulement de la bonne volonté des organisations d’extrême gauche. Ce qui dépend d’elles par contre, c’est de proposer une politique pour la classe ouvrière, sans s’aligner sur le Front de gauche qui, derrière des effets de manche faussement radicaux, défend l’ordre bourgeois. C’est en proposant de telles perspectives ouvertement et sans détours que les organisations révolutionnaires œuvreront à la construction du parti ouvrier qu’elles appellent, à juste titre, de leurs vœux.

19 avril 2013, Raphaël PRESTON


[1Cf. dans ce numéro l’article l’article « L’opération casse sociale s’accélère chez Kem One » et « La petite entreprise connaît-elle la crise ? Une question « d’épréciation » chez PSA… », Convergences révolutionnaires n°86, mars-avril 2013.

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