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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 60, novembre-décembre 2008 > DOSSIER : Leur crise... et nos moyens de sauvegarde

DOSSIER : Leur crise... et nos moyens de sauvegarde

1944-2008 : le parcours chaotique du capital

Mis en ligne le 2 décembre 2008 Convergences

En guise de remède, Sarkozy nous a promis un nouveau Bretton Woods . Avant lui, Hollande l’avait prôné lors de l’université d’été du PS. Qu’est-ce qu’il y a là de si miraculeux ?

Ces accords de Bretton Woods, datant de juillet 1944, visaient à stabiliser le système financier en garantissant les diverses monnaies sur le dollar, la seule officiellement convertible en or.

Les peu glorieuses 30 glorieuses

Après les destructions de la Deuxième Guerre mondiale, les grands pays d’Europe occidentale, toujours riches néanmoins et maîtres de l’exploitation d’une bonne partie des ressources du Tiers-monde, offraient de belles perspectives de développement. Comme en Asie, le Japon. La relance s’est faite à coup de crédits. Ceux du plan Marshall en particulier, qui finançaient les exportations américaines vers l’Europe en produits et équipements.

Les capitalistes (surtout des pays en reconstruction) comptèrent sur leurs États respectifs pour relancer leurs affaires. Au privé les secteurs rentables en pleine expansion : automobile, construction, etc. Aux États la charge de l’infrastructure : chemins de fer, routes, électricité… et aussi de la paix sociale. Quitte à acheter, par quelques postes de ministres ou de présidence de caisses d’organismes sociaux, les services du Parti communiste ou des appareils syndicaux, pour qu’au nom de la relance de l’économie ils baptisent la grève « arme des trusts ». Quitte à faire aux travailleurs quelques concessions, Sécurité sociale et retraites financées par leurs propres cotisations, ou constructions de logements sociaux, à partir de la fin des années 1950 tout au moins (car en France, tant pour le logement que pour les salaires, les 10 premières années de l’après-guerre ont été pour les travailleurs des années de vaches maigres).

Cette période d’expansion (jusqu’en 1973) a été, il est vrai, quelque peu exceptionnelle par sa longueur. Mais elle a été aussi marquée par d’incessantes guerres coloniales qui, à leur façon, ont aussi boosté l’industrie, notamment les guerres de Corée et du Vietnam pour lesquelles les commandes américaines ont contribué au développement de l’industrie allemande et au décollage de la Corée du Sud. On nous présente, à gauche, cette période comme celle du capitalisme bien régulé, à laquelle on devrait revenir. Pour relancer l’économie, on pourrait faire de meilleurs rêves !

Années 1980 : la fin du plein emploi

Le système de Bretton Woods n’a pas été abandonné par la volonté de quelques ultra-libéraux fanatiques. Il s’est effondré au début des années 1970 quand son socle, le dollar, en a pris un coup. L’expansion américaine et, entre autres, sa guerre du Vietnam se sont financées à coups de dollars. Face à cette inflation monétaire, le gouvernement américain a dû, en 1971, abandonner la convertibilité du dollar en or, et faire voler en éclats les taux de change fixes entre les monnaies.

Par ailleurs, le marché solvable des pays riches a commencé à être saturé tandis que les taux de profits fléchissaient. La hausse brutale du prix du pétrole brut, en 1973, n’a fait qu’aggraver une crise qui s’amorçait déjà. La récession des années 1973-1975 a mis fin au plein emploi. Le chômage n’a cessé de s’accroître depuis

Comment faire cracher le Tiers-monde

Mais les capitaux laissés en surnombre par une croissance désormais plus faible ont tout de même trouvé où se placer. En crédits pour vendre des équipements et aussi quantité d’armements made in France ou in USA. Pour les banquiers, les États du Tiers-monde (du moins ceux d’entre eux qui avaient déjà un début de développement industriel) semblaient solvables. Ils l’étaient dans la mesure où ils pourraient, en cas de faillite, faire payer leurs peuples.

C’est ainsi que la crise de la dette a marqué les années 1980 lorsque, pour ces États, le service de la dette a commencé à dévorer l’essentiel des recettes d’exportation (le Mexique a été le premier en 1982). Leurs prêteurs les ont décrétés en faillite. Le Fonds Monétaire International se chargea de leur faire cracher les remboursements sur le dos des peuples. Au nom de la dette, les plans imposés par le FMI ont inclus des privatisations à grande échelle, pour le plus grand bonheur des trusts mondiaux qui ont acheté ! Les huissiers passaient se servir sur les entreprises d’État ou les ressources minières. Comme ils passent en ce moment aux USA pour saisir les maisons.

Expansion mondiale et offensive anti-ouvrière

La dérégulation financière des années 1980 ? qui a débuté en Grande-Bretagne et aux USA, suivis par la France « socialiste » avec un temps de retard ? allait de pair avec une politique de privatisations et une offensive générale contre les travailleurs : grève des contrôleurs aériens brisée par Reagan en 1981, grève des mineurs anglais brisée par Thatcher en 1984 notamment.

Il fallait rétablir le taux de profit. Il fallait aussi et surtout relancer la machine en offrant aux capitaux surabondants, dans une période de croissance qui restait lente (tout au moins dans les métropoles impérialistes), de nouveaux secteurs de placement, de nouvelles façons de prospérer. En permettant aussi aux grands capitaux de drainer à eux toute l’épargne disponible, celle qu’on vous conseille de déposer sur une Sicav ou une assurance-vie, ou, dans un pays comme les USA en particulier, celle que vous êtes bien forcés de mettre dans un fonds de pension si vous espérez une retraite.

Dans les métropoles impérialistes mêmes, les infrastructures collectives ? électricité, chemins de fer, téléphone et autres ? laissées à charge des États dans l’expansion de l’après-guerre, pouvaient devenir nouveaux lieux d’investissements et sources de profits. Et il y avait le vaste monde, dont on pillait depuis longtemps toutes les richesses, mais où l’on avait jusque-là relativement peu investi.

Au programme de la déréglementation financière : la suppression des mesures de contrôle des changes et de celles réglementant les exportations de capitaux. En 20 ans, de 1980 à 2000, le montant total des investissements à l’étranger sur la planète ont été multipliés par dix.

La plus grande part de cette mondialisation des investissements se fait d’un pays riche à un autre. Mais elle s’est aussi étendue dans le Tiers-monde. Elle a trouvé de nouveaux champs d’exploitation en Europe de l’Est et en Chine à partir de 1990. Les grands trusts s’y sont taillés aussi de nouveaux marchés, les constructeurs d’automobiles notamment. Quelques pourcents de privilégiés en Inde ou en Chine suffisent à faire un sérieux marché.

Cette nouvelle relance, peu affectée par les crises successives — boursière de 1987 (la plus sérieuse de toutes), celle de 1997-1998 (qu’ont payées les populations d’Asie du Sud-Est et de Russie) ou la bulle internet de 2001 —, n’a en rien réduit, y compris dans les métropoles impérialistes, le chômage et la chute du niveau de vie, même si l’exploitation de l’Asie a permis de saturer la consommation de produits à bon marché.

Et, comme ces marchandises, les capitaux retournent vers les pays riches : les bénéfices des trusts bien sûr, mais aussi les dollars du surplus de la balance commerciale chinoise qui, tels ceux des pays pétroliers, reviennent vers les banques occidentales ou les bons du Trésor américain. Nouveau gonflement de la finance.

Bourse en folie et concentration du capital

Jamais les riches n’ont été si riches, la Bourse aussi euphorique. Jamais la spéculation n’a été aussi « scientifique ».

Car l’envolée de la Bourse bien au-delà de la croissance de l’économie réelle n’est pas simple folie qu’il suffirait de mieux réguler, ni simple jeu de casino ou un bourgeois en plume un autre avant de dessoûler le lendemain.

On investit sur des richesses bien matérielles que vos actions, c’est-à-dire vos droits de propriété, vous permettent de vous approprier ou contrôler. On spécule sur les matières premières pour s’accaparer tel ou tel produit en créant la pénurie qui en fera monter le prix (quitte à créer des famines en Afrique ou en Asie). En ne spéculant même que sur une dette, les emprunts de l’État russe par exemple, les investisseurs occidentaux se sont fait rembourser capital et intérêts (à taux prohibitifs) juste avant la dévaluation du rouble en 1998, grâce à l’intervention de la Banque mondiale et sur le dos des salaires impayés puis dévalués des ouvriers russes.

La multiplication des « produits » financiers de plus en plus complexes permet aux grands capitaux de limiter leurs risques de pertes en les faisant supporter par d’autres, et de décupler la rentabilité de leurs placements propres dans la production en empruntant l’argent des dépôts bancaires, épargnes ou cotisations retraites.

Si les cours du CAC 40 ou du Dow Jones peuvent grimper soudain bien plus vite que la valeur réelle des entreprises, c’est entre autres que la concurrence est grande pour s’arracher le contrôle d’une entreprise jugée rentable, voire d’entreprises concurrentes pour gagner en parts de marchés ou en réductions d’effectifs.

Depuis les années 1980, on a assisté à un vaste jeu de monopoly, de fusions-acquisitions, d’OPA hostiles ou amicales, ou d’achat d’entreprises. Cette vaste concentration du capital, sous l’égide de la Bourse, puisque c’est essentiellement par là que se drainent aujourd’hui les capitaux, vise les gains d’échelle qui optimisent les profits du côté des patrons, licenciements du côté des travailleurs à la clef.

À ce jeu, quand le marché solvable se restreint, faute de salaires décents ou d’emplois, même si la consommation de la minorité de plus en plus riche grimpe de façon indécente, l’économie ne peut tôt ou tard que se gripper.

O. B.

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