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Le PCF dans la tourmente

jeudi 8 décembre 2016

Les adhérents du PCF ont été appelés fin novembre à trancher le désaccord qui avait divisé son conseil national quelques semaines plus tôt. La première option, défendue par le secrétaire général Pierre Laurent, consistait à se rallier dès à présent à la candidature de Mélenchon. La seconde à présenter un candidat du parti aux présidentielles avec une éventualité de se désister ultérieurement en faveur d’un autre candidat de la gauche plus ‘présentable’ à leurs yeux que Hollande ou Valls — Montebourg par exemple, du moins si le cas se posait encore après la primaire organisée par le PS. C’est finalement la proposition de Pierre Laurent qui l’a emporté d’une courte tête parmi les 40 000 adhérents qui ont voté.

Mais les objectifs des deux tendances de la direction du PCF ne sont pas vraiment opposés. Leur principale préoccupation consiste à trouver la formule qui ferait payer le moins cher au PCF le discrédit de la gauche, dont la présence au pouvoir a clairement montré qu’elle pouvait faire la même politique que la droite et même pire.

L’impasse de la politique « d’union de la gauche »

Ce qui détermine les choix des uns et des autres, ce n’est même pas la préservation de tous les élus du parti – ce qui paraît improbable vu le discrédit de la gauche – mais seulement la meilleure manière de limiter les dégâts. Pour les députés, cela passe par des accords avec le PS aux législatives, exactement comme lors des dernières municipales pour conserver des mairies. Si le PCF avait présenté son propre candidat, il aurait risqué de subir un revers comme avec Marie-Georges Buffet en 2007 (1,93 %) rendant plus difficile la négociation avec le PS. Mais en se rangeant derrière un candidat du PS – « frondeur » ou pas – il sera de toutes façons réduit à la portion congrue dans les marchandages sur le partage des postes. Et en faisant voter pour Mélenchon flanqué de son nouveau regroupement des « insoumis », auquel le PCF se refuse à participer, il n’a là encore aucune garantie quant à ce partage.

Le PCF, de longue date, a choisi d’être avant tout un parti institutionnel – et même autant que possible de gouvernement – plutôt qu’un parti de lutte. Les préoccupations électorales priment sur tout le reste. Ce que son secrétaire général justifie en avançant que les travailleurs ont besoin des députés et autres élus du PCF pour leur défense. Ces représentants pourraient certes être utiles à la marge, mais ils n’ont pas la moindre efficacité pour faire obstacle à l’offensive menée par le gouvernement et le patronat contre les travailleurs. Pour illustrer cette réalité ce ne sont pas les exemples qui manquent, la loi El Khomri n’étant que le plus récent.

Cette politique à la fois électoraliste et suiviste a donc un prix, et les adhérents et militants du PCF n’ont pas fini de le payer et de ravaler leur amertume. Les diverses moutures de « l’union de la gauche » prônée depuis plus de 50 ans par le PCF, l’ont conduit à soutenir des politiciens bourgeois, de Mitterrand à Mélenchon, à se ranger derrière eux au point d’en être complètement dépendant sous peine de disparaître. Non seulement une telle politique ne permet pas au parti de se maintenir sur le terrain électoral, mais elle s’est aussi accompagnée d’une sérieuse érosion de sa base ouvrière et militante au fil des dernières décennies.

Le résistible déclin de la base ouvrière

Ce qui a fait la force du PCF dans le passé, ce ne sont pas ses succès électoraux qui n’étaient que le reflet de son implantation en milieu ouvrier et populaire. Implantation principalement dans les usines et les lieux de travail, avec, à une époque désormais lointaine, une base de salariés organisés dans pratiquement chaque grande entreprise. Même si peu à peu cette intervention et cette organisation ont fini par se limiter essentiellement au terrain syndical. Même si, de par les choix politiques du parti, balançant entre la défense des intérêts de la bureaucratie de l’URSS et celle des intérêts nationaux français, le PCF restait de toutes façons au mieux sur le terrain du réformisme et ne menait que les combats qui ne risquaient pas de conduire à une généralisation des luttes. Même si dans différentes circonstances historiques, lors de la grève générale de juin 36 ou celle de mai 68, le parti avait joué ouvertement le rôle que la bourgeoisie attendait de lui, celui de frein, plutôt que d’accélérateur de la lutte de classe.

Aujourd’hui, et maintenant depuis pas mal d’années, ce sont davantage, et de loin, les cellules locales que les cellules d’entreprises qui fournissent les principaux bataillons du parti. Il n’empêche que le parti dispose encore d’un contingent de sympathisants ouvriers, souvent militants CGT, supérieur à celui que les groupes de l’extrême gauche – même réunis – peuvent aligner.

Un certain nombre d’entre eux ont récemment retrouvé des couleurs (rouges !) dans le mouvement contre la loi travail : en entraînant leurs collègues dans ce combat sur un terrain de classe, ils ont enfin pu dire clairement ce qu’ils pensaient de cette gauche de gouvernement à laquelle les dirigeants de leur parti sont si liés. Ils l’ont fait le plus souvent sans chercher à aller plus loin que la politique bien limitée de l’intersyndicale, mais en marquant une nette préférence pour les actions les plus déterminées. Laisseront-ils le PCF terminer sa lente mutation en petit appareil électoral satellite de la gauche ? Ou certains tenteront-ils de redresser la barre ? Si ces militants existent au sein du PCF, ils n’ont pas été représentés dans la récente consultation. Pour aller au bout d’une telle démarche, ils devront rompre avec une tradition de collaboration de classe et d’esprit patriotard, cultivée pendant des décennies par leur direction, en dépit de l’étiquette communiste conservée.

Ce n’est pas nous qui pouvons répondre à ces questions. Mais des militants du PCF eux-mêmes.

27 novembre 2016, Louis GUILBERT

Mots-clés Elections , Jean-Luc Mélenchon , PCF , Politique