Aller au contenu de la page

Attention : Votre navigateur web est trop ancien pour afficher correctement ce site internet.

Nous vous recommandons une mise à niveau ou d'utiliser un autre navigateur.

Accueil > Éditos de bulletins > 2002 > septembre > 9

Douce France ?

Des milliers de personnes dans le cortège parisien du samedi 7 septembre, de nombreuses manifestations en province : le mouvement des sans-papiers prend de l’ampleur. Depuis l’occupation de la basilique de Saint-Denis à la mi-août, de plus en plus de travailleurs clandestins sortent de l’ombre et s’inscrivent pour une régularisation. Environ 20 000 ont été enregistrés à Saint-Denis, puis 4 000 à la Bourse du travail à Paris, et des milliers d’autres… C’est l’espoir et la colère qui s’expriment dans ces files d’attente de plusieurs heures. C’est le ras-le-bol d’une vie cachée, dans l’angoisse perpétuelle d’un contrôle de police et éventuellement d’une reconduite de force dans le pays d’origine, où certains risquent la prison, la mort, ou de toute façon la misère.

Le nouveau ministre de l’Intérieur, Sarkozy, dit qu’il veut aborder le problème « avec pragmatisme et humanité ». Cela n’a rien de rassurant. En 1996, son collègue Jean-Louis Debré avait quasiment le même slogan, « avec humanité et avec cœur ». Ce qui ne l’a pas empêché de faire enfoncer à la hache le portail de l’église Saint-Bernard pour en expulser les sans-papiers qui faisaient la grève de la faim ! Depuis, les sans-papiers n’ont obtenu que des mauvais coups - à droite comme à gauche ! - des différents gouvernements. Après l’affaire de Saint-Bernard, Jospin avait parlé d’une régularisation générale. Arrivé au pouvoir en 1997, il s’est assis sur cette promesse comme sur bien d’autres, et la loi Chevènement a confirmé les lois Pasqua-Debré. La gauche a continué à faire du cas par cas. Aujourd’hui, c’est près de 400 000 personnes qui vivraient en France sans autorisation. Des illégaux, des clandestins, qui ne sont pourtant pas sans attaches : une conjointe ou conjoint français, des enfants nés en France, un travail, parfois depuis 5 ou 10 ans ! Et pourtant l’Etat leur refuse leurs papiers. Sarkozy reprend le misérable refrain de Rocard sur la France qui ne pourrait pas accueillir tous les immigrés du monde !

Sacrées bassesse et hypocrisie. Passons sur le fait que pas un politicien ne résiste au charme de la petite musique sécuritaire. Mais la vérité, c’est que les centaines de milliers de travailleurs immigrés clandestins en France sont tout sauf une « misère » pour les exploiteurs. Ils représentent au contraire une formidable aubaine. Ils fournissent une main-d’œuvre payée moins cher, condamnée aux tâches les plus pénibles. Les toute jeunes chinoises des ateliers de confection, les diplômés algériens embauchés dans le bâtiment, et tous les autres, dans l’ensemble très jeunes, sont les plus précaires parmi les précaires. Et pas seulement au service de petits patrons turcs, portugais ou chinois. Que non ! Tous les grands sigles de l’industrie française les emploient, les Bouygues, les Renault, les griffes du textile…même si c’est souvent par le biais de sous-marques, sous-traitants, intérimaires. Ni vu, ni connu, j’t’exploite ! Le Stade de France lui-même a été construit grâce à eux ! Et cette situation permet à l’ensemble du grand patronat bien français de peser sur les conditions de travail et les salaires de nous tous.

C’est pour cela que la cause des sans-papiers est la nôtre, celle de tous les travailleurs. Français ou immigrés, de première, deuxième ou énième génération, nous avons tous les mêmes exploiteurs et le même combat à mener contre eux.

Sur fond d’intolérable bruit de bottes de Bush contre l’Irak (face auquel Chirac agite un bouclier en carton pâte), on voit se préciser les attaques anti-ouvrières du gouvernement Raffarin contre les travailleurs. Augmentation du contingent d’heures supplémentaires pour « assouplir les 35 heures », suppression de milliers de postes dans l’Education nationale, nouvelles baisses des charges patronales… Les raisons de nous défendre, tous ensemble, ne manquent pas.

Parmi elles, et mise à l’ordre du jour par la lutte entamée, la régularisation de tous les sans-papiers.

Imprimer Imprimer cet article