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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 100, juin-juillet-août 2015

SNCF : pendant les négociations, les attaques continuent

Mis en ligne le 27 juin 2015 Convergences

« Des gains de productivité énormes sont possibles. » Voilà la petite phrase qui ponctue désormais tous les discours de Guillaume Pépy, président de la SNCF.

Mais de quelle SNCF parle-t-on ? Depuis le 1er janvier 2015 et l’entrée en application de la réforme ferroviaire, l’entreprise est coupée en deux : SNCF Réseau regroupe tous les cheminots de l’« Infra », ceux chargés d’exploiter et d’entretenir le réseau (l’aiguillage et les différents métiers de l’équipement auxquels il faut ajouter les quelques centaines de salariés de RFF). Les conducteurs, contrôleurs, vendeurs de billets, agents de départ et bien d’autres métiers (tous ceux qui « exploitent » des trains) font désormais partie de SNCF Mobilités. L’objectif à long terme de cette séparation est de créer deux catégories de cheminots, avec deux réglementations du travail différentes, des primes spécifiques et bientôt des accords d’entreprise pour chacune d’entre elles. En clair, la direction poursuit en l’amplifiant la politique qu’elle mène depuis maintenant plusieurs années : diviser pour mieux régner.

Et la productivité dans tout ça ? Elle va bien, au détriment du confort et de la sécurité pour les usagers, des conditions de travail pour les cheminots. L’accident survenu le 21 avril près de la gare de Nangis (en Seine-et-Marne) en est un dramatique exemple : un train de voyageurs a percuté un convoi routier bloqué sur un passage à niveau. Le chauffeur du camion en panne s’était pourtant précipité en gare pour alerter des cheminots, mais il n’a trouvé personne : le poste d’agent circulation qui aurait pu prendre les mesures d’urgence avait été supprimé depuis le 1er janvier 2015. Bilan : une trentaine de blessés.

Il y a quelques mois, dans la presse interne de la SNCF, Pépy annonçait encore une fois des gains de productivité possibles en revoyant les procédures de départ des trains. Quelques semaines après, la direction annonce des suppressions de postes d’agents de départ chargés des procédures de sécurité ferroviaire en gare, en commençant par Nantes ou Paris-Est pour les trains courts. Sachant que depuis quelques années, la direction instaure peu à peu les « équipements à agent seul », trains dans lesquels le conducteur est chargé, grâce à des caméras, de toutes les procédures de sécurité qui reposaient jusque-là sur les contrôleurs, on s’oriente vers des circulations ferroviaires qui seraient de A à Z supervisées par un seul et unique cheminot ! En supprimant ainsi des postes essentiels pour la sécurité des circulations, la direction prépare de nouveaux Brétigny et aggrave les conditions de travail de tous les cheminots.

Ces fameux gains de productivité passent aussi par l’abrogation au 1er juillet 2016 de la réglementation du travail en vigueur à la SNCF et son remplacement par une convention collective, évidemment encore plus défavorable pour les cheminots, qui devrait être négociée d’ici là.

Une convention collective pas si collective que ça

Les négociations au sommet entre l’UTP (patronat du ferroviaire) et les organisations syndicales ont débuté il y a plusieurs mois déjà avec pour premier volet le périmètre de la future convention collective nationale. L’UTP le veut le plus réduit possible et l’accord adopté, signé le 20 mai par la CFDT, l’UNSA et la CFTC, exclut d’ores et déjà le nettoyage en gare et dans les trains, les services en gare, la réparation du matériel roulant et les travaux sur les voies. Les salariés de ces secteurs dépendraient d’autres conventions collectives (celle de la métallurgie pour les ateliers de réparation). La direction va réussir le tour de force d’imposer une convention « collective » dont le champ d’application est plus restreint que celui de l’actuelle réglementation SNCF ! Et à terme, pourquoi ne pas rattacher les cheminots de l’Équipement à la convention collective du BTP, et ceux de la vente à celle du commerce ? Le calcul est de créer autant de régimes de travail qu’il y a d’activités à la SNCF, espérant ainsi rendre les réactions collectives plus difficiles.

Marchande ou crève ?

Les organisations syndicales qui ont signé cet accord justifient leur compromission en expliquant que si une convention collective n’était pas négociée d’ici là, les cheminots seraient soumis à l’application pure et simple du code du travail au 1er juillet 2016. Façon de reprendre le chantage patronal à leur compte : cheminots, acceptez tous les reculs imposés par le patronat du ferroviaire, dont la direction de la SNCF, sinon ce sera pire encore ! En voilà de bons « négociateurs » !

Parmi les syndicats qui n’ont pas signé cet accord, seules les fédérations Sud-Rail, FO et CFE-CGC l’ont dénoncé ; la CGT (majoritaire) ne s’est pas jointe à eux et laisse donc passer l’accord (il aurait fallu l’opposition de 50 % des organisations syndicales représentatives à la SNCF pour l’empêcher). Pitoyable spectacle : toutes les fédérations syndicales ont accepté de participer à ces « négociations », donc de se caler sur le calendrier des rencontres fixé par la direction, qui fait passer ce qu’elle veut et se paye le luxe de souligner la « cacophonie » dans le camp syndical !

Rien de bon ne pourra sortir de ces négociations, pour les cheminots de la SNCF ou du privé. C’est sur un autre terrain qu’ils doivent se faire entendre, celui des mobilisations pour mettre un coup d’arrêt aux attaques. Et sans attendre : la direction, de son côté, accélère les restructurations, les suppressions de postes et programme la disparition de services et de métiers pendant que les discussions continuent dans ses salons.

Les agents de départ de la gare de Nantes qui ont débrayé plusieurs fois contre la suppression des autorisations de départ des trains, tout en ayant la préoccupation de s’adresser à d’autres catégories de cheminots, montrent la voie à suivre pour la période à venir.

10 juin 2015, Lucien ASTIER


Trains Corail : les patrons de la SNCF commandent, les parlementaires écrivent !

Une commission parlementaire hypocritement intitulée « TET d’avenir », TET pour « Trains d’équilibre du territoire », plus connus sous le nom de trains Intercités ou Corail, vient de rendre publiques ses préconisations. Il est question de supprimer purement et simplement cinq tronçons de ligne sur lesquels il existe déjà des dessertes TGV ou TER, d’en transférer d’autres à des autocars (merci la loi Macron), et de réduire les dessertes sur les lignes restantes.

En cause, un déficit de 330 millions d’euros dû à un « taux de remplissage » (expression utilisée par ceux qui réfléchissent en termes de profits et non de confort pour les voyageurs) trop faible sur ces trains. Si des usagers se sont peu à peu détournés de ces trains-là, les gouvernements successifs et la direction de la SNCF en sont seuls responsables. La politique de non investissements pendant des décennies sur le réseau classique a conduit à des situations insupportables : les temps de parcours ont augmenté à cause de l’état des voies, les travaux réalisés pour combler le retard engendrent des retards, et ne parlons pas des remplacements par des bus sur certains tronçons. Le matériel roulant, quant à lui, date des années 1980. Dans ces conditions, on comprend que les « taux de remplissage » ne soient pas bons. Après avoir laissé à l’abandon les trains Corail, parlementaires et direction de la SNCF proposent de les supprimer : quand on veut tuer son chien… D’autant que supprimer des lignes, c’est supprimer des correspondances. Et donc faire baisser le fameux « taux de remplissage » des lignes restantes… Qui, à leur tour, seront désignées comme « non rentables » dans quelques années !

Les préconisations de ce rapport ne sont une surprise pour personne tant elles collent à la politique que mène la SNCF : supprimer les trains qu’elle juge les moins rentables même s’ils sont utiles à la population. Et tant pis pour les usagers qui devront voyager en bus et verront leur temps de parcours s’allonger, tant pis aussi pour ceux qui n’auront d’autre choix que de prendre des TGV aux tarifs exorbitants. Tant pis pour les cheminots qui verront de nouveaux postes supprimés. Tant pis, enfin, pour la planète, dont notre gouvernement fait mine de se préoccuper ces temps-ci, les bus étant bien plus polluants que les trains.

L. A.

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