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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 94, juin-juillet-août 2014

Couloir de la Chimie lyonnaise : Les travailleurs de Solvay-Rhodia Saint-Fons ont relevé la tête

Mis en ligne le 14 juin 2014 Convergences Entreprises

Une certaine morosité régnait depuis le début de l’année dans cette usine chimique de la banlieue lyonnaise [1]. Lettres d’avertissements et convocations diverses instauraient un climat répressif alors que les petits chefs s’essayaient à l’arrogance. La direction, de son côté, revenait sur de petits avantages, comme la possibilité de se faire rembourser des courses d’épicerie pour agrémenter les pauses, ou instaurait la baisse de primes. Une accumulation de petites défaites qui agacent mais qui ne semblaient pas valoir la peine d’une vraie lutte.

Point culminant de cette triste ambiance, la direction accusait de sabotage un salarié de vingt ans d’ancienneté et le licenciait pour faute lourde. Ne disposant pas de preuves tangibles, la direction se contentera de soupçons. Mais les tentatives pour défendre ce salarié auront du mal à s’imposer face à une hiérarchie totalement mobilisée pour ruiner son image dans l’usine.

Trop c’est trop !

La suppression de la part groupe [2] de la prime d’intéressement, soit une perte de rémunération de 1 500 euros par salarié, a mis le feu aux poudres. C’est particulièrement choquant lorsqu’on connaît les profits faramineux de Solvay, qui s’élèvent à 1 663 millions d’euros en 2013.

À partir du 24 avril, les travailleurs de l’usine de Saint-Fons se sont donc mis en grève, revendiquant une compensation de cette perte par une augmentation du salaire de base, et l’embauche des intérimaires. Sur deux des trois ateliers de l’usine, les travailleurs ont organisé des réunions pour discuter des revendications. À l’issue de l’une d’entre elles, ils sont allés déposer un cahier de revendications à la direction, pour le moins désagréablement surprise de voir débarquer dans ses bureaux une vingtaine de travailleurs dont les têtes n’étaient pas seulement celles des syndicalistes habituels.

La contre-attaque de la direction

La direction a inauguré dans cette usine une tactique agressive pour casser la grève : la menace de lock-out et de suspendre le contrat de travail des salariés. Or le lock-out est illégal si le prétexte en est la grève. La direction a donc invoqué des risques de sécurité, le site étant soumis aux normes Seveso II. Pourtant, les travailleurs veillaient à ce que les installations soient sécurisées pendant la grève.

Loin de vouloir arrêter les installations, la direction voulait surtout que la production reprenne. Du coup, au bout de six jours de grève, les travailleurs ont repris le travail sans avoir obtenu gain de cause. La dernière journée de grève a pourtant mobilisé des travailleurs sur d’autres sites (notamment à La Rochelle et sur l’usine de Belle-Étoile située à Saint-Fons également), qui ont arrêté le travail le 30 avril pour des augmentations de salaires à l’appel de la coordination CGT Solvay/Rhodia.

À quand la nouvelle grève ?

Suite à la grève, la CGT du site de Saint-Fons a appelé les travailleurs à une assemblée générale le 15 mai. 40 travailleurs étaient présents, sur les 150 grévistes, ce qui est positif. Se réunir, discuter des suites à donner à la grève, n’est pas une habitude sur cette usine. Il est cependant clair que les travailleurs sont fiers de s’être sentis investis dans ce mouvement. Ils ont pris la décision d’aller ensemble, une fois de plus, déposer leurs revendications à la direction : 150 euros de plus sur le salaire de base et l’embauche des intérimaires.

Pour le moment, la direction a concédé l’embauche de quelques intérimaires, et elle est revenue sur sa décision de baisser la prime de « dérangement ». Lorsqu’un travailleur est appelé pour occuper un poste non prévu dans son planning, il touchera à nouveau 75 euros de prime.

Au-delà de ça, les travailleurs, en faisant peur à la direction par la grève, ont gagné un changement d’attitude de la part des chefaillons qui se croyaient tout permis. Si la revendication principale sur le salaire n’a pas été satisfaite, la lutte n’est pas terminée.

28 mai 2014, Annick HAUSSMANN


Extraits du bulletin L’Étincelle de Solvay, du 5 mai 2014

Nous avons relevé la tête

[…] nous avons eu raison de ne pas nous asseoir sur 1 500 euros alors que les actionnaires sont arrosés à millions. Que la direction ne l’oublie pas : revendiquer sur les salaires reste d’actualité.

30 grévistes... selon la police ?

C’est le petit refrain chanté par la direction : nous n’étions que 30 grévistes. Mais bien sûr… Pour compter leurs sous, ils savent être plus exacts.

On s’est fait respecter

Les grévistes de l’atelier HEVA ont fait forte impression en envahissant le CE pour déposer un cahier de revendications. À cette occasion, tout le monde a pu constater qu’en face d’une vingtaine de grévistes déterminés, la direction se montrait tout à coup beaucoup moins arrogante. Une attitude qui tranche avec les menaces proférées au même endroit lors de la grand-messe anti-grève quelques heures plus tôt ! Reste que les revendications de ce cahier, à savoir 150 € pour tous et l’embauche des intérimaires, sont toujours sur la table.


[1Filiale du groupe Solvay depuis septembre 2011, Rhodia est un groupe de l’industrie chimique, qui emploie à Saint-Fons environ 300 personnes, plus une centaine de sous-traitants. Avec le rachat de Rhodia, Solvay est devenu le plus grand groupe chimiste de France, où il emploie plus de 7 000 personnes réparties sur une vingtaine de sites. L’usine de Saint-Fons fabrique des produits et intermédiaires organiques à usages pharmaceutique (Aspirine, Glycéril…), photographique (hydroquinone) ou de production d’arômes (vanilline).

[2La prime d’intéressement est fixée par la direction en fonction d’objectifs de production. À Solvay, elle est divisée en deux parties : la part site et la part groupe. Les ouvriers de Saint-Fons ont touché à peu près 1 200 euros de part site, en fonction des objectifs de production fixés pour celui de Saint-Fons.

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