SNCM : C’EST TOUS ENSEMBLE QU’ON PEUT GAGNER !
17 octobre 2005 Éditorial des bulletins L’Étincelle
Les marins de la SNCM ont repris le travail après trois semaines de grève. Mais Villepin et consorts auraient bien tort de se réjouir trop vite ! Certes, les grévistes n’ont pas gagné, mais la détermination qu’ils ont montrée dans leur lutte, leur refus de se laisser jeter sur le carreau comme des malpropres, leurs démentis face aux mensonges déversés sur leur combat, sont un encouragement pour nous tous.
Oui, ils ont eu raison, ces travailleurs, de se lever contre les 400 licenciements prévus dans le plan de privatisation de leur compagnie. De dire qu’ils n’étaient ni trop nombreux, ni trop payés, qu’ils ne faisaient pas trop grève, comme la propagande patronale le prétendait. En face, que nous montre-t-on en exemple ? La Corsica Ferries, la compagnie concurrente ? Elle emploie des marins sous-payés, rogne sur la sécurité et empoche, au titre d’une « aide sociale », 10,2 millions d’euros de deniers publics, contre 3,5 millions à la SNCM, et tout cela sans aucune obligation de service public. Bel exemple en effet de ce que la privatisation peut apporter aux salariés et aux passagers !
Non, ce n’est pas pour améliorer le service rendu aux usagers que le gouvernement veut privatiser les services publics, la SNCM, EDF, SNCF, autoroutes ! Certainement pas. Il s’agit à chaque fois de faire des cadeaux aux capitalistes. L’exemple de la SNCM est à ce titre exemplaire : le patron du fonds de pension Butler Capital Partners, repreneur de la compagnie maritime, est un ami personnel de Villepin. Cet individu est surtout connu pour racheter les entreprises, licencier du personnel, et les revendre avec profit. « Nous restons en moyenne cinq ans dans le capital et visons à retirer trois fois le capital investi » déclare-t-il avec cynisme. Qu’à cela ne tienne : le gouvernement était prêt à lui céder la SNCM, d’une valeur estimée à 450 millions d’euros, pour la modique somme de 35 millions d’euros, tout en versant 113 millions pour apurer les dettes et prenant en charge les frais de licenciement ! Royal cadeau de coquins à copains !
Les grévistes de la SNCM ont tenu un moment le gouvernement en échec : après l’assaut d’un navire par le GIGN, l’émotion était si forte parmi les travailleurs qu’il a dû libérer les marins emprisonnés. Villepin, après avoir affirmé que la privatisation serait effectuée à 100 % a dû garder pour l’Etat une part du capital. Sans que cela n’offre aucune garantie d’ailleurs pour l’avenir. Le gouvernement a fait repousser l’annonce de la privatisation d’EDF ne voulant surtout pas d’une grève dans cette entreprise en même temps qu’à la SNCM et ailleurs à Marseille.
Il savait que ce conflit pouvait constituer un point d’appui au développement des luttes pour l’interdiction des licenciements et la défense des services publics. Mais à aucun moment les syndicats n’ont fait appel aux autres travailleurs qui ont aujourd’hui les mêmes problèmes, pour rejoindre les grévistes dans la lutte. Pas même à EDF, pas même à la SNCF, pourtant les prochains sur la liste.
Les dirigeants des syndicats se contentent au mieux de soutenir ou accompagner des conflits bien circonscrits. Ils réclament des tables rondes avec les patrons et le gouvernement qui ne peuvent aboutir à rien tant qu’un nouveau rapport de forces ne sera pas établi au travers de la lutte. Même des journées d’action par-ci par-là, si elles ne devaient pas déboucher sur un mouvement d’ensemble jusqu’à satisfaction, ne serviraient à rien. Quelle que soit en effet la détermination des travailleurs d’un secteur, s’ils restent isolés il leur est très difficile de gagner. C’est une lutte d’ensemble, aussi résolue que celle des marins de la SNCM, qui est nécessaire aujourd’hui.
Les derniers évènements montrent malheureusement qu’il serait illusoire d’attendre des confédérations syndicales qu’elles l’organisent. Même après la journée réussie du 4 octobre, dont nous attendons toujours les suites. C’est donc à nous travailleurs puisque l’ensemble du monde du travail a les mêmes revendications et les mêmes objectifs, qu’il appartient non seulement de prendre en main nos propres luttes mais de pousser à l’extension la plus large possible de chacun de nos combats.