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Vive la révolte des Palestiniens

1er décembre 2000

La répression israélienne est largement connue et sa politique de terreur est aujourd’hui exposée y compris dans la presse israélienne. Le quotidien de Tel-Aviv Haaretz a publié le lundi 20 novembre un entretien avec un tireur d’élite de Tsahal, l’armée israélienne. Ce soldat expose très simplement les consignes de ses supérieurs. « Quand on dit à un sniper de tirer, son intention sera de toucher la tête. S’il tire, c’est pour tuer. Très rarement on nous demande de viser les jambes ». Quant à la définition de l’enfance Tsahal innove puisque, toujours selon cet entretien, « Vous ne tirez pas sur un enfant qui a douze ans ou moins. Au-dessus de douze ans c’est autorisé. C’est ce qu’ils nous disent ». Ce qu’ils ne disent pas, semble-t-il, c’est comment distinguer l’âge d’un enfant dans une émeute.

Le 20 novembre le gouvernement israélien, dirigé par le travailliste Ehud Barak, a franchi un cran supplémentaire dans la répression. Le bombardement de Gaza, pendant près de deux heures, à une heure d’affluence, par une opération combinée aéronavale, a fait des dizaines de blessés et un nombre de morts inconnu précisément à ce jour. Il ne s’agit plus d’interventions dans le cadre de sanglantes opérations anti-émeutes mais bel et bien d’une opération de guerre en vue de terroriser les populations civiles. Le 26 novembre, le nombre de victimes depuis deux mois s’élevait à 278, des Palestiniens dans leur écrasante majorité, bien que les morts israéliens soient aussi de plus en plus nombreux.

En apparence le monde entier est ému et se penche sur la question. L’ONU, l’Union européenne, tous les Etats de la planète. Pas une chancellerie qui n’ait, d’une manière ou d’une autre, appelé au dialogue, à la négociation, à la paix. On a même sollicité l’aide du démocrate bien connu, un dénommé Poutine, que d’ordinaire pourtant les autres grands démocrates, Clinton, Chirac, Schröder ou autre Blair n’aiment pas voir se mêler des affaires extérieures à la Russie. Que ne sont-ils prêts à accepter pour calmer la révolte du peuple palestinien !

Car tous ces gens qui brandissent le rameau d’olivier n’ont que cette idée en tête. Leur succès, ce n’est pas quand la répression s’arrête, c’est quand pour la première fois depuis trois semaines Barak et Arafat rediscutent au téléphone pour éteindre la colère du peuple palestinien. Car l’Autorité Palestinienne de Yasser Arafat est bien sur la même longueur d’onde. Alors que tombent tous les jours des insurgés, elle cherche à négocier, non pas pour obtenir le droit légitime des Palestiniens à l’autodétermination mais la possibilité pour la bourgeoisie palestinienne de gouverner des ghettos. Comme le sont tous les dirigeants des Etats arabes voisins, qui meurent de peur que leurs populations prennent exemple sur ce peuple spolié mais aujourd’hui dressé contre l’oppression.

Pourtant la révolte qui dure malgré les centaines de morts et le prestige de plus en plus entamé de Arafat et même de l’OLP montrent qu’une bonne partie des Palestiniens sait qu’il n’y a que la lutte, aussi dure soit-elle, qui fera reculer Israël et les grandes puissances qui sont derrière. N’est-ce pas la première Intifada qui a forcé Israël à négocier des accords d’Oslo ? Et encore plus récemment la guérilla à quitter sans gloire le Sud Liban occupé depuis presque vingt ans ?

C’est même cette lutte qui pourrait être le moyen d’entraîner à leurs côtés, non seulement les autres peuples arabes exploités et opprimés par tous les régimes arabes mais aussi les opprimés israéliens. C’est elle qui a, il y a quelque temps, entraîné un fort mouvement pacifiste en Israël, c’est elle qui aujourd’hui entraîne déjà la révolte des Arabes israéliens. Car la société israélienne est aussi traversée par la lutte de classe. Et les travailleurs israéliens, juifs comme arabes, ne sont pas à jamais enchaînés au sionisme, dont ils ne retirent en fait de bénéfice que la possibilité d’être exploités au nom d’un prétendu intérêt commun avec les bourgeois israéliens et de devoir risquer leur vie et vivre dans un état de guerre permanent pour défendre les intérêts de ces mêmes bourgeois.

A condition bien sûr que les opprimés palestiniens sachent, tout en menant la guerre contre l’Etat israélien, s’adresser à ces opprimés israéliens. Et pour cela s’opposer aux nationalistes et intégristes qui eux tous sans exception (y compris ceux qui à un moment ou un autre peuvent apparaître radicaux : nous avons l’exemple d’Arafat) sont toujours prêts à passer accord avec l’Etat israélien, jamais à en appeler aux travailleurs d’Israël.

Ce mercredi en France une partie de la gauche appelle à manifester en solidarité avec les Palestiniens. C’est bien le moins en effet que tous ceux que la répression de l’Intifada indigne le manifestent. Et certainement l’extrême gauche et les révolutionnaires seront de ces manifestations. Mais pas pour réclamer, comme le fait toute cette gauche bien pensante, et bien gouvernementale, la paix par le dialogue entre Barak et Arafat sous la supervision de Clinton ou Chirac. Pour affirmer sa solidarité avec la lutte et la révolte des opprimés... Ce qui est d’ailleurs la seule voie pour avoir un jour la paix.

Tristan KATZ

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