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UNEDIC : faux coup de théâtre et vrais comédiens

27 octobre 2000

Après sept mois de négociations, le projet de réforme de l’UNEDIC initié par le MEDEF, comprenant le trop célèbre PARE, est sur le point d’être agréé par le gouvernement. C’est ce que Seillière, Notat, Jospin ont annoncé la semaine dernière.

Le gouvernement, qui avait refusé d’agréer un première version, puis semblait chipoter sur une deuxième, faisait durer un faux suspens depuis le 24 juillet. Son principal problème était clairement le refus de signer ce plan de la part de deux des principales centrales syndicales, la CGT et FO. évidemment, le PARE constitue un telle attaque contre les chômeurs et, au-delà, de l’ensemble du monde du travail, que ces deux confédérations syndicales ne pouvaient pas s’y rallier sans avoir fait mine de protester sérieusement d’abord, pour ne pas se mettre sérieusement en porte-à-faux vis-à-vis de leurs bases. Même la CGC avait dû provisoirement retirer sa signature en juin, après avoir subi la grogne de ses syndiqués ! Mis en demeure de signer un accord ne rassemblant, avec les organisations patronales, que la CFDT et la CFTC, le gouvernement n’avait donc pas voulu assumer la responsabilité d’un texte qui risquait d’être si impopulaire.

C’est la méthode Jospin : profiter au maximum des amitiés de la gauche plurielle dans le monde syndical pour les mettre au sale boulot de faire passer les mesures anti-ouvrières, quitte à leur permettre d’affirmer d’abord leur opposition à une proposition initiale assez outrancière pour être légèrement, très légèrement, édulcorée au final. Fin juillet, Aubry avait donc appelé tout le monde à revenir autour du tapis vert. Et la CGT et FO, ne demandant que ça, avaient fait connaître les modifications mineures qu’elles voulaient voir apporter au texte pour pouvoir le considérer comme acceptable : essentiellement rendre le PARE facultatif et diminuer les allégements de cotisations patronales.

De PARE en PARE...

Mais l’intransigeance des signataires de la première version du texte a été telle qu’ils n’ont alors rien donné à moudre à la CGT et FO, qui se sont à nouveau tournés vers le gouvernement pour lui demander de régler le problème par décret, en ignorant le texte signé. Pour débloquer la situation en ménageant tout ce beau monde, Jospin s’est finalement décidé, au contraire, à agréer le projet de réforme, en déclarant tout à-coup que l’accord dans sa deuxième version, avec encore un léger amendement, deuxième version bis en quelque sorte, présentait « un changement total de philosophie » par rapport aux précédentes, saluant au passage les signataires (« La CFDT a joué un rôle très positif ») comme les non-signataires (« qui par leurs remarques [...] ont contribué à faire avancer les choses »).

Il n’y a pourtant pas grand-chose de nouveau. Alors que les excédents prévus de l’UNEDIC d’ici à 2003 représentent la bagatelle de 75 milliards de francs, le texte ne prévoit toujours pas d’amélioration des indemnisations alors que 40 % des chômeurs indemnisés touchent moins de la moitié du SMIC... et que 58 % des chômeurs sont tout simplement exclus des indemnisations ASSEDIC. Le dispositif du PARE est toujours obligatoire et donc le principe révoltant des sanctions pour les chômeurs pas assez dociles maintenu - même si le problème de savoir qui les appliquera est reporté à de nouvelles négociations... La seule évolution concerne la répartition des excédents : alors que le patronat voulait initialement en consacrer 71 milliards (sur 75 !) aux baisses de charges, il se contentera de 43 milliards - mais l’Etat en récupère 20 au passage...

Pas télépathes... mais complaisants

Dans cette affaire, FO et la CGT n’ont jamais proposé de compter sur autre chose que... le gouvernement. La CGT était même allé jusqu’à parler de « victoire de la démocratie » en juillet quand Aubry et Fabius avaient repoussé le premier texte. Ils feignent donc maintenant d’être « très surpris » (Thibault). Et Kessler, le numéro 2 du MEDEF, de rentrer dans leur jeu en insistant : « Les non-signataires se sont fait des illusions sur le soutien du gouvernement ».

Ce à quoi l’Humanité répond sans rire : « Le père Denis aurait raison si les non-signataires avaient pu, grâce au don de télépathie, déchiffrer les intentions réelles du gouvernement ». A d’autres ! Si Blondel et Thibault se sont ainsi laissés mener en bateau, c’est bien moins un problème de télépathie que de désir constant de ne pas gêner la gauche plurielle au pouvoir, ni ses partenaires, fussent-ils patronaux. Thibault affirme maintenant que « le dossier n’est pas clos », et propose... une nouvelle réunion à Jospin ! C’est pourtant clair : s’il y a encore des chances de parer cette attaque contre le monde du travail, « c’est pas à Matignon, c’est pas dans les salons »... comme bon nombre de militants CGT eux- mêmes l’ont bien souvent crier dans la rue.

Benoît MARCHAND

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