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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 32, mars-avril 2004 > DOSSIER : Après Jospin, Raffarin. De mal en pis, Bilan du gouvernement

DOSSIER : Après Jospin, Raffarin. De mal en pis, Bilan du gouvernement

Salaires : gelés dans le public, bloqués dans le privé

Mis en ligne le 6 mars 2004 Convergences Politique

Un chiffre résume de façon frappante l’aggravation de l’exploitation : en vingt ans, la part des salaires dans la valeur ajoutée est passée de 69 % à moins de 59 %. Ces 10 points volés aux travailleurs sont le résultat d’une lutte de classes constante menée par les patrons avec le soutien de tous les gouvernements, dont l’actuel.

Faux coup de pouce au Smic

Le 1er juillet dernier, Fillon donnait un « coup de pouce » au SMIC de 5,27 %. La première année, en juillet 2002, il n’avait rien accordé, seulement le réajustement obligatoire correspondant à l’inflation.

En fait, il y avait de l’arnaque, issu de la loi Aubry. Les différentes dates de passage aux 35 heures ont en effet créé 5 Smic différents. L’augmentation de 5,27 % ne concernait que les salariés encore aux 39 heures, soit 615 000 smicards sur les 2,7 millions que compte le pays. Pour les autres, l’augmentation n’était que de 3,22 % ou 1,6 %. Soit rien ou moins que rien, puisque l’inflation en 2003 est de 2,2 % selon l’Insee. Sans parler des hausses réelles : 2,75 % en moyenne pour les loyer HLM en Ile-de-France, 3 % pour EDF, 4,1 % pour les transports de la région parisienne, pour ne citer que des prix dépendant directement de l’Etat.

Notons que ces augmentations du Smic n’ont rien coûté aux patrons, puisque le dispositif Fillon a prévu de nouveaux allègements de charges sur les salaires inférieurs à 1,5 fois le Smic : au total, le coût global des salaires (cotisations comprises) a en fait baissé. Et il ne faut pas s’attendre avant longtemps à de meilleurs « coups de pouce ». Le gouvernement prend prétexte de l’harmonisation des Smic pour bloquer le plus élevé en attendant que les autres le rejoignent poussivement en juillet 2005 !

La fonction publique au pain sec

Entre 2000 et 2002, sous Jospin, les salaires de la fonction publique avaient augmenté de 2,9 %, loin derrière l’inflation qui était alors de 4,1 % selon l’Insee. Avec Raffarin, c’est 0 % d’augmentation des salaires de la fonction publique en 2003 ; en 2004 ce sera 0,5 %, c’est-à-dire quatre ou cinq fois moins que l’inflation prévue.

Les autres travailleurs du secteur public ne sont pas mieux servis. A la SNCF, les accords comprenaient un volet de gel des salaires sur trois ans. A EDF, la RTT devait être financée pour un tiers par la « modération salariale ». Ils n’ont, ensuite, pas été mieux servis que les fonctionnaires à la fin du blocage : 0 % en 2003 et deux fois 0,5 % en 2004.

Le privé à la loi Aubry

Dans le privé, le blocage des salaires a été surtout le fait des trois années précédentes, contenu dans les accords sur les « 35 heures ». Il y en a eu, certes, une multitude, puisqu’ils ont été négociés à tous les niveaux, dont celui de l’entreprise. Mais les dispositifs de blocage des salaires sur plusieurs années ont été leur principal trait commun. Et le délai passé, on s’est surtout contenté de ne pas rattraper les pertes de pouvoir d’achat causées.

La vraie baisse des salaires des années 2002-2003, c’est ce que les patrons ont continué à prélever sur la masse salariale, par les compressions d’effectifs, l’emploi de jeunes sous-payés, l’accroissement de la précarité, l’intensité des cadences.

Créer des smicards et des sous-smicards

Sous prétexte d’aide à l’embauche, les allègements de charges sociales sur les bas salaires sont une véritable trappe à bas salaires, tant ils baissent le coût de la main-d’œuvre embauchée au Smic ou proche du Smic. Pratiqué depuis 30 ans, ce système ne pouvait pas être méprisé par Raffarin.

Avec la loi Fillon du 17 janvier 2003, plus besoin d’un accord de réduction d’horaires pour bénéficier des allègements Aubry, sur les salaires entre 1 et 1,7 % du Smic. Et le taux de ces allègements est augmenté.

En pourcentage de la population active, les « bas salaires » (moins de 838 € par mois, alors que le Smic est à 1 090 €) sont passés de 11 % de la population en 1983 à 17 % en 2001. Parmi eux, les « très bas salaires » (moins de 629 € par mois), de 5 % à 9 %. En 2003, 3,4 millions de salariés, soit 1 sur 6, touchaient moins que ce prétendu minimum qu’est le Smic.

L’instauration du RMA (revenu minimum d’activité) décidée en novembre 2003, va en créer d’autres : il s’agit de remettre les RMIstes au travail pour un demi-Smic, puisqu’ils n’auront droit qu’à un mi-temps. Le patron, lui, n’aura à payer que la différence entre le montant du RMI et ce demi-Smic, soit 183 €. N’ayant pas de charges sociales à payer, pour le prix d’un travailleur à plein temps au Smic, il aura 7 travailleurs à mi-temps.

A l’autre bout de l’échelle, des patrons comme Owen-Jones (L’Oréal), Desmarets (Total), Riboud (Danone) ou Bouygues ont des revenus annuels évalués respectivement à 6 250 000 € (soit 445 fois le Smic annuel), 2 410 000 (171 Smic), 2 400 000 (170 Smic) et 1 994 000 € (137 Smic).

Le gouvernement se préoccupe même de catégories plus modestes : en août 2002, les ministres s’auto-augmentaient de 70 %. Radical, certes… mais ça donne des idées. Au moins celle de ne pas se gêner pour exiger 300 euros d’augmentation pour tous dès maintenant.

Benoît MARCHAND

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