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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 113, juin-juillet-août 2017 > Après la présidentielle

Quand Macron les siffle, ils accourent ?

Mardi 23 mai, les directions syndicales ont défilé dans le bureau d’Emmanuel Macron et ont remis ça lundi 29 avec Édouard Philippe. Il leur a suffi d’une invitation à une « visite de courtoisie » pour s’enthousiasmer pour un gouvernement qui serait ouvert au « dialogue social ». Pourtant, Macron ne démord pas de sa détermination à passer en force, par ordonnances, avec pour perspective d’aller encore plus loin que la loi El Khomri et laisser le champ libre au patronat pour supprimer des emplois, baisser les salaires et dégrader les conditions de travail. Macron s’est donc ouvertement payé la tête de ses interlocuteurs syndicaux qui peuvent bien se pousser du col pour faire croire qu’ils ont été entendus... L’important pour Macron était de constater que, quand il les sifflait, ils accouraient...

Rien d’étonnant du côté de Laurent Berger, chef de la CFDT, habitué à approuver les attaques patronales et qui balbutie quelques piètres avertissements sur la « méthode », si elle ne laissait pas assez de place au « dialogue social ». Dans une interview au journal Le Monde, il appelle à des groupes de travail pour préparer la réforme du Code du travail, mais il l’approuve déjà en souhaitant « élargir le champ des sujets négociés dans les entreprises et les branches ».

Le plus exalté reste Jean-Claude Mailly, secrétaire général de Force ouvrière, qui n’a cessé de s’extasier face au « bon profil » de la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, ancienne DRH de Danone et au conseil d’administration de plusieurs groupes publics. Dans la casse du Code du travail, Mailly veut avoir des « marges de manœuvre ». Mais que cela signifie-t-il si ce n’est des miettes pour prétendre avoir obtenu des « avancées » au milieu des nombreux reculs ?

Quant à Philippe Martinez, pour la CGT, il a lui aussi salué la « volonté de dialogue » de Macron. Ce même Macron qui s’est vanté – oubliant la présence des caméras – que les entrevues avec les responsables syndicaux s’étaient bien passées… car il ne leur avait rien dit. Plutôt un « monologue social » alors ! Martinez est allé conseiller à Macron de lire le « Code du travail simplifié avec droits collectifs renforcés » rédigé par des universitaires. Comme si le gouvernement se préoccupait réellement de simplification, quand ses motivations sont de laisser le patronat maître chez lui, de lui laisser toute liberté pour exploiter en divisant les travailleurs entreprise par entreprise.

Le mot d’ordre du gouvernement : « À l’attaque ! »

La révérence des directions syndicales face à Macron est d’autant plus malvenue que son gouvernement se prépare à l’offensive. Une offensive annoncée, prête à être menée tambour battant durant l’été, avec des ordonnances devant être ratifiées en septembre ou octobre.

Le contenu exact des ordonnances est encore imprécis, mais leur esprit doit suffire à mettre les travailleurs en alerte. Il s’agit principalement d’élargir à d’autres domaines l’inversion de la « hiérarchie des normes » (selon le jargon juridique) introduite par El Khomri à propos de la durée du travail, privilégiant les accords d’entreprise par rapport aux accords de branche et au code du travail.

En ligne de mire, ce sont d’abord les salaires, qui pourraient, avec un accord local, être inférieurs à ceux prévus dans les accords de branche. Cela signifierait la multiplication des chantages à la compétitivité et une plus grande mise en concurrence des salariés au sein des branches. Macron veut également s’en prendre aux retraites, avec une uniformisation par le bas. Il vise à réintroduire certaines dispositions supprimées de la loi Travail, comme le plafonnement des indemnités pour licenciement abusif. Il propose encore qu’un patron puisse organiser un référendum dans l’entreprise pour faire passer un accord qui n’aurait la signature que de syndicats minoritaires – alors que la loi Travail limitait l’initiative du référendum aux syndicats. Enfin, il a déjà annoncé une augmentation de la CSG de 1,7 point pour compenser une suppression des cotisations chômage et maladie : une TVA sociale nouvelle mouture qui pèserait en particulier sur les retraités.

La loi Travail 2 – ou plutôt l’ordonnance Travail – ne porterait donc pas tant sur la durée légale du travail : la loi El Khomri a déjà fait beaucoup en ce domaine. L’étape suivante serait de supprimer la « norme » des 35 heures, ce que Macron ne propose pas pour le moment. Mais cette norme n’en a déjà que le nom puisque, selon l’Insee, les salariés à temps plein travaillent déjà 39 heures hebdomadaires en moyenne. C’est donc du côté du patronat qu’il faudra s’attendre aux attaques, avec la mise en application de la loi Travail dans les entreprises. Et le gouvernement sera là pour l’aider. Édouard Philippe y est favorable, lui qui déclarait sur le plateau d’On n’est pas couché, en décembre 2014, quand il était encore juppéiste, qu’« on ne travaille pas assez dans la semaine, on ne travaille pas assez dans l’année, on ne travaille pas assez dans sa vie ».

Alors oui, c’est un mouvement d’ensemble du monde du travail qu’il faut préparer. Face à un gouvernement de combat, il n’y a pas de temps à perdre dans des négociations bidon. Il est temps de regrouper les forces contre les projets du gouvernement, que chaque lutte devienne un point de rassemblement pour les autres.

27 mai 2017, Maurice SPIRZ

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