Aller au contenu de la page

Attention : Votre navigateur web est trop ancien pour afficher correctement ce site internet.

Nous vous recommandons une mise à niveau ou d'utiliser un autre navigateur.

Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 61, janvier-février 2009

Premiers effets de la crise sur l’automobile allemande

Mis en ligne le 10 janvier 2009 Convergences Monde

La crise économique qui frappe l’automobile mondiale n’épargne pas l’Allemagne. Plus de 760 000 salariés travaillent dans le pays pour l’automobile (Daimler, BMW, Volkswagen, Audi, Opel-General Motors ou Porsche), et ses équipementiers. Du fait de la forte dépendance à l’exportation – en particulier aux États-Unis –, les ventes ont fortement chuté (Porsche : – 29 %, Daimler : – 24,5 % de septembre à octobre 2008 ; en moyenne de – 18 % en novembre). À ce jour la plupart des trusts de l’automobile n’accusent pourtant pas de pertes, seuls leurs gains fléchissent. Daimler n’a réalisé « que » 6 milliards de bénéfices en 2008, contre les 7 attendus.

Les effets du rétrécissement du marché se font d’abord durement sentir chez les équipementiers. À la différence des trusts de la branche, un nombre croissant est confronté à la banqueroute. 80 sur les quelque 500 sous-traitants sont déjà insolvables, faute de contrats.

La crise laisse aussi ses premières empreintes sur les effectifs salariés. Ce sont d’abord des intérimaires qui, depuis septembre 2008, ont été mis à la porte en masse : 5 000 chez BMW, 25 000 chez Volkswagen, 3 400 chez MAN, etc. Dans les diverses branches, c’est un total de 100 000 intérimaires, sur 800 000, qui ont été licenciés. Les embauchés, et pas seulement dans l’automobile, qui restent encore protégés des licenciements économiques par les contrats collectifs, ont, de leur côté, été mis pour des semaines en congé, un peu partout depuis octobre. Comités d’entreprise et IG Metall négocient avec les patrons des plans de chômage partiel pour les mois qui viennent. [1]

Aucune résistance des directions syndicales

C’est un des gros problèmes. Directions syndicales et délégués dans les entreprises ne cherchent d’aucune façon à empêcher que les travailleurs paient la facture de la crise. Ils n’organisent pas la moindre réaction. Ils restent souvent muets et abandonnent les travailleurs à la propagande du patronat. Parfois, ils s’échinent à inciter les travailleurs à accepter les reculs et sacrifices, sous prétexte que sauver l’entreprise serait synonyme de sauver les emplois. Ainsi, des délégués de Comités d’entreprise (dominés par l’IG Metall) de filiales Opel, se sont-ils sans discussion avec le personnel, déclarés prêts à accepter d’énor­mes concessions – tout particu­liè­re­ment à Bochum, où l’entreprise de plus de 5 000 salariés est menacée de fermeture. Le chef du Comité d’entreprise d’Opel Alle­­ma­gne, Klaus Franz, a assuré début décembre que : « Les salariés apporteront leur contribu­tion » . Ce qui se négocie, c’est l’abandon de l’équipe de nuit, 70 jours de chômage partiel ou la journée de 30 heures sans maintien du salaire, pour que le « coût du travail » baisse de 10 %. Pour les travailleurs, cela équivaut à une perte de 15 % du salaire.

Depuis des années, Opel à Bochum supprime des emplois et « économise », avec la complicité de l’IG Metall qui, déjà en 2004, avait étranglé un début de grève de cinq jours qu’elle ne contrôlait pas. À l’époque, les travailleurs gagnaient encore de 14 % à 17 % de plus que les salaires fixés par contrat dans l’automobile. Aujourd’hui, après tous les compromis consentis par les directions syndicales, le salaire est ramené à l’ordinaire. Et s’il n’en tient qu’au patronat et aux dirigeants syndicaux, il va bientôt passer sous la barre. Une partie des travailleurs d’Opel-Bochum rejettent cette logique du renoncement, mais sans pour autant avoir de perspectives de lutte sans soutien de l’IG Metall. Le syndicat de la métallurgie, pas plus que les autres à ce jour, n’est disposé à croiser le fer. Il plaide depuis des semaines pour la modération et la résignation, bien que la combativité des travailleurs de la métallurgie se soit exprimée.

À l’automne, la direction syndicale a appelé à agir pour 8 % d’augmentation de salaire, sur un mode combatif (600 000 travailleurs avaient participé à des grèves d’avertissement). Mais au début novembre, elle a soudain tout laissé en plan et s’est déclarée satisfaite d’une augmentation ridiculement faible. « Il n’y avait pas le choix (…) si ce n’est d’entrer dans une grève illimitée » , a expliqué alors le chef de l’IG Metall, Huber – qui voulait éviter à tout prix des grèves sérieuses. « Les négociations vont inévitablement se politiser si nous ne trouvons pas vite une solution. Les salariés vont payer tous les dégâts de la crise, pénalisation en tant que contribuables pour le sauvetage des banques, conséquences sur l’économie. Qu’ils soient encore taxés par une baisse du salaire, c’est un explosif social » , s’inquiétait le chef de la délégation syndicale Jörg Hofmann au début novembre.

De nombreux travailleurs, dans l’automobile comme partout, sont furieux de l’accord et ont en tête les gains records que les trusts ont réalisé cette année. Mais le chef de l’IG Metall n’a d’autre réponse que de dire : « Je ne vois pas qu’une lutte nous apporterait un résultat significativement meilleur » . La combativité, déclarée nulle et non avenue par les bureaucraties syndicales, pourrait pourtant donner le signal du refus du chômage technique et des licenciements.

31 décembre 2008

Pauline BAUM


[1En cas de chômage technique, l’État paie 60 à 67 % du salaire, qu’il puise dans les caisses d’assurance chômage.

Mots-clés : |

Imprimer Imprimer cet article

Abonnez-vous à Convergences révolutionnaires !