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Pourquoi le Parti socialiste mouille la chemise

23 novembre 2004

Qui a dit que le Parti socialiste n’était plus qu’une formation politique de notables, députés, sénateurs, maires, conseillers régionaux ou généraux, tous gérant paisiblement des institutions bourgeoises ou, quand ils sont exclus de cette gestion, attendant sans faire de vagues que le vent tourne à nouveau dans l’électorat ?

Gauchistes, qui avons couvert le PS de nos sarcasmes, il nous faut bien faire amende honorable ! Depuis trois mois il nous administre un cinglant démenti. Et qui ne vient pas des quelques syndicalistes de base qu’il pourrait avoir encore dans ses rangs, malheureux militants qui auraient pu s’égarer là à la recherche d’un débouché politique. Non, l’exemple vient de tout là-haut, des ex-ministres ou aspirants ministres, des anciens, actuels ou futurs secrétaires généraux. Ce sont les éléphants qui se sont mis en marche. Pas à s’étonner si la terre tremble !

Il est vrai que l’enjeu est de taille. Le PS va-t-il dire oui ou non au référendum sur le traité constitutionnel européen ? Un pré-oui ou un pré-non en quelque sorte. Il faut croire que le PS ne peut rester plus de six mois sans aller aux urnes : alors, comme six mois après que le référendum a été annoncé par Chirac nous n’en connaissons toujours pas précisément ni la question ni la date, le PS a organisé le sien.

Le temps de voir venir l’autre, le vrai, dans trois mois, dans six mois, dans un an ? Il paraît pourtant que l’Europe retient déjà son souffle dans l’attente des résultats de la consultation du 1er décembre, jour où les adhérents socialistes sont appelés à trancher pour leur parti. Il faut croire que l’Europe doit être drôlement plus politisée que la population française qui, même pour la seule minorité qui a vaguement prêté attention à l’affaire, en a que faire, sachant bien que le résultat ne changera ni son sort, ni celui de l’Europe. Ou plutôt, tous ces médias qui en ce moment nous parlent tant d’Europe n’auraient-ils pas tendance à limiter celle-ci à quelques dizaines de milliers de politiciens, oubliant… les 400 millions d’habitants ?

Il n’empêche ! Les Laurent, Jack, Dominique, François, Arnaud et autres Henri auront mouillé leur chemise. Réunions (privées, soit-disant privées ou publiques) sur réunions, argumentaires déversés à tire larigot, interviews à répétition sur toutes les chaînes de radio et de télévision, prêtant complaisamment leurs micros et leurs caméras. Le PS a même ouvert son portefeuille : 65 000 euros par-ci pour s’assurer que chaque membre du parti aura bien eu (sinon lu, à l’impossible nul n’est tenu !) le texte de la constitution, 15 000 par-là à chaque camp pour faire sa propagande, appels réitérés aux dons des sympathisants pour assurer cette pré-campagne.

Une chose est donc sûre. Le PS sait toujours faire campagne (on a pu découvrir qu’il peut même en faire deux à la fois, une pour le oui, une pour le non). S’il ne le fait pas pour des questions qui intéressent la vie quotidienne des travailleurs et de la population, conditions de vie et de travail, pouvoir d’achat et salaires, privatisation et dégradation des services publics, c’est donc qu’il ne le veut pas.

Que ceux qui s’inquiéteraient pourtant que tant d’efforts et d’énergie aient pu être gaspillés en vain se rassurent. Il y en a quelques-uns au moins pour qui ils importent bougrement.

A Fabius ou à Hollande (et sans doute à quelques autres encore) d’abord puisque du résultat du 1er décembre dépend qui dirigera désormais le PS et qui sera son candidat en 2007.

A Chirac ensuite. Car c’est un nouveau bon service que le PS vient de rendre au président de la république. Non seulement il se chamaille pour savoir de quel côté il va tomber dans le piège que lui a tendu Chirac, mais avec tout ce tapage il donne une importance à un référendum qui n’aurait mérité que d’être traité par le mépris tant le prétexte est bidon, puisque quel que soit son résultat ni l’Europe, ni la politique des gouvernements européens, celui de Chirac en premier, n’en seront changées.

Fabius, Hollande, Chirac, trois personnes vraiment intéressées seulement ? C’est un peu mince pour justifier le déplacement aux urnes de 30 millions d’électeurs. Il est vrai que ceux-ci ne se sont pas encore déplacés. C’est encore plus mince pour justifier qu’une grande partie de l’extrême gauche se soit précipitée pour faire de cette question du référendum une question essentielle pour la période qui vient et ait déjà ajouté sa campagne à celle du PS, quand elle ne l’a pas précédée.

Si elle voulait faire campagne, ce ne sont pourtant pas les sujets qui manquent, de ceux qui concernent réellement la classe ouvrière et la population.

Jacques MORAND

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