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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 35, septembre-octobre 2004

Politique de Schröder contre les travailleurs : Nein Danke !

Mis en ligne le 30 septembre 2004 Convergences Monde

A la mi-août, des dizaines de milliers de personnes ont commencé à descendre dans la rue tous les lundis dans l’ex-Allemagne de l’Est. Ces « manifestations du lundi » se rattachent à celles du mouvement citoyen de l’automne 1989 en RDA qui, toujours plus massives, avaient accompagné l’effondrement du pouvoir de la SED. « Nous sommes le peuple », slogan marquant, renvoie à la revendication démocratique des semaines autour de la chute du mur. La formule est aujourd’hui explicitement dirigée contre les attaques anti-ouvrières du gouvernement Schröder (coalition entre sociaux-démocrates et Verts).

Une sévère attaque de la protection sociale

A l’été 2002, le directeur des ressources humaines de Volkswagen, Peter Hartz, s’était vu confier la direction d’une commission gouvernementale sur une prétendue « réforme du marché du travail ». Ses propositions ont été adoptées par le gouvernement sous forme de « lois Hartz ». Les chômeurs à la recherche d’un emploi devraient à l’avenir accepter quasiment tout job, déménager dans toute ville qui leur serait proposée, pour un salaire qui pourrait tomber aux 60 % du salaire antérieur - ce qui était jusqu’ici illégal. Autre motif du mécontentement : la fusion de l’indemnité de fin de droits (493 euros à l’Ouest et 425 à l’Est, en moyenne) avec l’aide sociale, équivalent du RMI français (300 euros, plus le loyer jusqu’à un certain plafond). La nouvelle allocation commune serait désormais de 345 euros à l’Ouest, 331 euros à l’Est, plus le loyer. Mais assortie, comme le RMI en France, de diverses restrictions d’attribution. La dégringolade est énorme alors que le chômage touche 4 millions de travailleurs et leurs familles, 10 % dans le pays mais jusqu’à 20 % dans certains Länder de l’ex-Allemagne de l’Est.

Les mesures doivent entrer en vigueur le 1er janvier 2005, mais dès cet été, l’administration a expédié aux chômeurs concernés des formulaires où ils devaient préciser l’état de leur « fortune ». Si un enfant, mineur, a trop d’argent (selon les autorités !) sur son livret d’épargne, la famille doit d’abord épuiser ce pécule. L’enquête a été ressentie comme une attaque à la dignité, autant qu’au porte-monnaie. Les manifestations ont commencé quand les questionnaires sont arrivés à la maison, par la poste. Aussitôt 40 000 manifestants en ex-Allemagne de l’Est sont descendus dans la rue. Puis de 120 000 à 200 000 personnes, dans tout de pays, à la fin du mois d’août. Beaucoup moins cependant à l’Ouest qu’à l’Est, et dans moins de petites villes.

Contre le gouvernement, les grands partis... et les directions syndicales

Ce mouvement, parti d’un élan spontané, est organisé par des alliances d’associations locales, composées d’individus et organisations liées à la gauche et à quelques petits groupes d’extrême gauche. Bien des participants insistent sur leur indépendance à l’égard des partis.

Méfiance et amères critiques d’abord à l’endroit du SPD qui gouverne mais aussi de la CDU (droite), tous deux favorables aux lois Hartz. A propos des manifestations, le ministre de l’économie a évoqué : « la manière insupportable dont certains politiciens et associations engendrent l’hystérie chez le peuple ». Le gouvernement a réagi durement et tenté de discréditer le mouvement en affirmant qu’il aidait l’extrême droite, voire qu’il serait inspiré par elle.

En fait, des groupes néo-fascistes ont essayé, dans certaines localités, de se joindre aux cortèges, avant tout en Allemagne de l’Est. Leur présence est néanmoins restée insignifiante et mal perçue par les manifestants. Ce qui n’empêche pas leur influence politique de croître dans de nombreuses communes, avec l’aggravation des problèmes sociaux et le manque de perspectives, tout particulièrement pour les jeunes chômeurs. Les dernières élections régionales dans le Brandebourg et la Saxe, ont été marquées par les gains de l’extrême droite, respectivement 6,1 % et 9,2 %, soit dans ce dernier cas quasiment le même score que le SPD. Dans le Brandebourg, la DVU (Union populaire allemande) avait déjà 5 députés et en gagne 1. En Saxe, le NPD ou Parti national d’Allemagne, entre pour la première fois au parlement avec 12 députés. Tandis que les grands partis, SPD comme CDU, accusent tous deux des pertes sévères.

Le PDS, successeur du parti communiste au pouvoir dans l’ex-RDA, bien qu’il participe à une coalition gouvernementale à Berlin et en Poméranie occidentale, deux régions de l’Est où il participe aux sales coups contre les travailleurs, est partie prenante de la contestation et tire profit du mécontentement. Aux dernières élections régionales, il obtient 28 % des suffrages exprimés en Brandenburg, soit + 4,7 % (ce qui le place en deuxième position, derrière le SPD mais devant la CDU), et 23,6 % en Saxe (soit + 1,4 %, ce qui le place en deuxième position encore, mais derrière la CDU et devant le SPD).

Les directions syndicales de leur côté, qui avaient siégé aux commissions sur les lois Hartz, viennent de confirmer leur opposition au mouvement. Le leader de l’IG Metall, Jürgen Peters, comme celui du nouveau syndicat unifié des services publics Verdi, Frank Bsirske, sermonnés récemment par Schröder, précisent tous deux que leurs centrales n’appellent pas aux manifestations du lundi ni à celle du 2 octobre prochain à Berlin. Ils demandent quelques modifications aux mesures les plus dures des lois Hartz et un réexamen de la situation d’ici 6 ou 9 mois. Ils sont sans pudeur les voix de leur maître, après avoir laissé croire (certes à des syndicalistes d’entreprise crédules) qu’ils pourraient incarner une critique de gauche au SPD.

En cette mi-septembre, l’affluence aux manifestations décroît. Difficile de dire si le mouvement peut prendre un autre souffle avec la manifestation nationale prévue à Berlin le 2 octobre. Mais cette contestation nouvelle, qui existe non seulement sans les grands partis ou syndicats mais contre eux - comme la manifestation du 1er novembre 2003, où 100 000 personnes avaient protesté contre la politique du gouvernement - reste un gage pour l’avenir.

23 septembre 2004

Pauline BAUM


Chantage patronal, couardise syndicale

Le chantage patronal à l’allongement du temps de travail, jusqu’à 40 heures, sous peine de suppression d’emplois voire de licenciement et fermeture d’entreprise, est à la mode. L’exemple est donné par de grands trusts, dont Daimler-Benz, Opel (General Motors) et Volkswagen.

Chez Volkswagen, le plus gros producteur d’automobiles d’Europe - qui l’an dernier a fait 2,5 milliards d’euros de gains et augmenté cette année son chiffre d’affaires -, des négociations sont ouvertes pour un nouveau contrat concernant les sites d’Allemagne. Le PDG Pieschetsrieder voudrait que d’ici 2011, le coût salarial des 103 000 salariés baisse de 30 %. Sinon 30 000 emplois seraient supprimés (cela inclut Audi et les usines de l’ex-Allemagne de l’Est). Volkswagen prétend réaliser son économie par un blocage des salaires sur 2 ans. Par l’introduction de primes en fonction des performances. Par le non paiement de l’intégralité des pauses et des formations. Un tiers du salaire devrait être rendu variable, entendez éventuellement sucré. En outre, les « comptes d’épargne temps » liés aux formules d’annualisation, verraient leur marge de variation élargie à plus ou moins 400 heures dans l’année. Soit plus de 7 heures supplémentaires par semaine.

General Motors attaque de la même façon, sous prétexte d’une baisse des ventes sur le marché européen et d’une sous-utilisation des usines. Elle tente tout particulièrement de mettre en concurrence les sites d’Allemagne et de Suède. Chez Saab à Trollhättan, la direction a imposé l’assouplissement de la législation sur le licenciement et l’allongement du temps de travail. Chez Opel en Allemagne, GM envisage de poursuivre les suppressions d’emplois pour l’année 2004, alors que 10 000 déjà ont disparu en 10 ans. La direction veut économiser ainsi 80 millions d’euros cette année. L’attaque porte surtout sur l’usine de Rüsselsheim, où les travailleurs se voient imposer le blocage des salaires jusqu’à 2009, la suppression de primes et les 40 heures. Dans la même usine, elle essayait encore à la fin 2003 d’imposer la réduction du temps de travail, sans maintien du salaire.

Une fois de plus, la direction de l’IG Metall a renoncé à affronter vraiment ce grand patronat. Le N°1 de l’IG Metall de l’usine Volkswagen de Wolfsburg, Hartmut Meine, s’est déclaré prêt aux compromis, sous prétexte de priorité à la sécurité de l’emploi. Et il réfléchit à la grève, mais seulement « si au terme de quatre ou cinq séances de négociations, ne se profilait pas l’ombre d’un compromis ». Et on sait de quelles grèves, bien cadrées et limitées, les bonzes syndicaux sont orchestrateurs. Les travailleurs ne peuvent guère attendre non plus du dirigeant du comité d’entreprise (un représentant du personnel, généralement syndicaliste, car la structure n’est pas paritaire en Allemagne), avec la complicité duquel, en 1993, furent introduites des mesures spectaculaires de flexibilité et de renoncement à des avantages acquis. Ou encore, en 2001, les « 5 000 fois 5 000 » (l’embauche de 5 000 personnes pour 5 000 DM - soit environ 2 500 euros -, salaire qui peut paraître élevé par rapport à la France, mais représentait une baisse et s’accompagnait de sérieuses concessions dans le sens de la flexibilité). Volkswagen se flatte d’avoir réalisé ainsi 20 % d’économies, sur le dos des 5 000 embauchés. De son côté, le responsable du comité d’entreprise d’Opel a accepté, pour les années 2002 et 2003, la suppression de 2 500 emplois et le renoncement à la prime de Noël.

Les grandes entreprises ont engagé le combat contre les conditions de travail, les salaires et les emplois. Cela n’empêche pas les directions syndicales de se faire leurs vassales. Pas question d’une réaction à la taille de l’attaque. Mais même pas question d’une dénonciation de cette logique du profit.

P.B.

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