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Pas d’accord LO-LCR ?

23 juin 2000

Il n’y aura donc pas de listes communes aux prochaines élections municipales. C’est la décision prise par le Comité Central de Lutte Ouvrière à la suite de la résolution adoptée, à une écrasante majorité et toutes tendances confondues, lors du récent congrès de la Ligue Communiste Révolutionnaire.

Cette résolution réaffirmait la volonté de la LCR d’appeler à voter pour les listes de la gauche gouvernementale au deuxième tour, voire de fusionner les éventuelles listes LO-LCR avec celles-là, comme les règles du scrutin en donnent la possibilité sous certaines conditions. Par là, la LCR montrait ses réticences et ses hésitations, c’est le moins qu’on puisse dire, à rompre avec une politique qui l’a amenée par le passé à rechercher des alliances avec la gauche réformiste et gouvernementale plutôt qu’avec d’autres courants révolutionnaires comme LO.

Il nous semble indispensable que les révolutionnaires dans ces élections, après quatre ans (au moment où elles auront lieu) de gouvernement Jospin soutenu par la gauche plurielle, se présentent en opposition claire et cohérente à ce gouvernement et à tous ses partis. Cohérente, c’est-à-dire excluant au second tour toute palinodie qui pourrait faire apparaître un soutien quelconque à ceux contre qui on se sera présenté et qu’on aura critiqué sans merci huit jours plus tôt.

Notre organisation a raison de ne pas transiger sur ce point. Et si, après ces 3 ans de gouvernement Jospin... et 20 ans où la gauche a été constamment, deux années exceptées, soit à la présidence soit au gouvernement soit la plupart du temps aux deux, l’extrême gauche toute entière n’est pas capable de tenir une telle attitude, il est capital qu’au moins un courant le fasse. Et, dans ce cas, il est juste que Lutte Ouvrière envisage de se présenter sans la LCR.

Il nous semble moins juste en revanche de refuser que la profession de foi puisse comprendre une partie locale, ce qu’a fait pratiquement LO. Ou d’exprimer une telle méfiance ou une telle crainte vis-à-vis des militants ou des groupes qui pourraient se proposer d’être sur les listes communes que cela en revient à les repousser a priori (voir l’échange de lettres entre les deux organisations publié dans Lutte de Classe n° 51). Peut-on sérieusement soutenir que si une petite partie de la profession de foi abordait des problèmes locaux, cela nuirait à la plus grande part de cette profession qui serait nationale ? Que cela effacerait l’apparition d’un courant et d’un programme national ? La réponse à tous ceux qui pourraient proposer de s’ajouter sur les listes (ou que la LCR proposerait d’ajouter) ne devrait-elle pas être, non de les écarter dédaigneusement, mais de leur poser simplement les conditions à remplir : accord avec le programme et la politique que l’on se propose de développer dans cette campagne, y compris au deuxième tour ? (Ce que LO s’apprête à faire, évidemment, pour ses propres listes pour lesquelles elle a déjà annoncé qu’elles « seront ouvertes à tous les militants qui se retrouvent dans le programme que nous défendons » ?)

En adoptant l’attitude inverse et en posant des conditions guère pertinentes, au premier tour, pour la constitution des listes avec la LCR, notre organisation ne fait que suggérer que c’est a priori qu’elle a choisi de se présenter en concurrence avec la LCR et qu’elle a renoncé à gagner et à convaincre celle-ci et ses militants, et en conséquence jeter le doute sur la volonté qu’elle a jamais pu avoir de parvenir à un accord, même sur des bases correctes.

Bon. Ce n’est pas la première fois dans l’histoire, hélas, que deux organisations trotskystes se séparent avec, à côté des bons, de mauvais arguments des deux côtés. Ce n’est grave que lorsque cela les empêche de retrouver les bons lorsque l’accord est de nouveau possible.

Et surtout cette séparation n’est qu’à propos d’élections. Certes, celles-ci sont hautement symboliques dans la vie politique aujourd’hui de ce pays. Et elles prennent parfois pour les organisations révolutionnaires une importance déjà trop grande et encore accrue par le fait que c’est à leur propos que les médias nous accordent place et attention.

Ce n’est pourtant pas le terrain essentiel de l’action des révolutionnaires. Aujourd’hui leurs préoccupations, plutôt que sur ces élections qui auront lieu dans neuf ou dix mois et dont de toute façon personne n’attend de changements décisifs pour les classes populaires, devraient plutôt se porter sur l’offensive capitaliste et patronale qui redouble en ce moment même, menée par le MEDEF avec le gouvernement en appui.

Il y a un an la Fraction L’Etincelle de LO, avec les camarades de la tendance Révolution ! de la LCR, proposait aux deux organisations, qui sortaient d’une campagne électorale commune sur les thèmes du Plan d’urgence contre le chômage et de la nécessité d’un mouvement d’ensemble, de s’engager ensemble dans une campagne sur ces mêmes thèmes. Ni la LCR ni LO n’ont alors jugé bon de reprendre la proposition.

Depuis un an la loi Aubry a permis aux patrons de redoubler l’exploitation, ne diminuant un peu le chômage qu’en augmentant la précarité. Et aujourd’hui le MEDEF vient compléter l’oeuvre commencée par le gouvernement pour maintenir le plus grand nombre de chômeurs ou de précaires à la disposition des patrons.

N’est-ce pas plutôt ce sujet-là - comment les révolutionnaires pourraient aider à la contre-offensive ouvrière nécessaire et y participer - qui doit être le centre des discussions, des interventions et des actions communes LO-LCR ?

Jacques MORAND

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