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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 50, mars-avril 2007

Nouvelles saignées dans l’enseignement

Mis en ligne le 23 mars 2007 Convergences Politique

5 500 postes d’enseignants en moins en septembre 2007 dans les lycées et collèges. 27 000 supprimés depuis 2003. Dans le même temps, 62 000 postes d’emplois-jeunes ont été remplacés par seulement 45 000 « emplois vie scolaire » [1]. Une hémorragie.

Trop de profs pour moins d’élèves ?

C’est la thèse défendue par Gilles de Robien, ministre de l’Éducation nationale. Une baisse du nombre d’élèves en collège et lycée étant attendue à la rentrée prochaine, il serait normal de diminuer en conséquence les effectifs enseignants. Dans le 1er degré qui devrait accueillir 24 000 à 40 000 élèves supplémentaires, n’a-t-il pas prévu d’augmenter le nombre d’enseignants ? Ne serait-ce pas limpide ? Sauf qu’en proportion de l’évolution des effectifs d’élèves, le ministère diminue plus le nombre d’enseignants du secondaire, et augmente moins le nombre d’enseignants du primaire.

Chasse au gaspillage ?

D’autre part, de Robien prévoit qu’une bonne partie des suppressions de postes sera réalisée en s’attaquant aux « décharges horaires » (qui seraient un énorme gâchis à l’en croire). Il s’agit d’heures dites de laboratoire qui permettent l’entretien du matériel pédagogique dans certaines disciplines (sciences physiques, sciences de la vie et de la terre, histoire-géographie, etc.). Ou encore des heures « de première chaire », accordées aux professeurs de lycée en charge de classes à examen qui ont plus de copies à corriger et un temps de préparation plus important. C’est l’occasion de supprimer plus de 3 000 postes !

Tout pour l’« éducation prioritaire » ?

Aux effectifs qu’il prétend « pléthoriques », le ministère dit préférer une meilleure répartition des moyens, afin de les « mettre où c’est nécessaire ». Ce serait le sens de la réforme des ZEP (Zone d’Éducation Prioritaire), mise en place depuis la rentrée 2006. Des collèges ont reçu le label « Ambition réussite », mais ils sont 249 très défavorisés qui se voient mieux dotés… sur quelque 1 100 établissements classés ZEP. Cette réforme se réduit à un simple reclassement des ZEP en 3 catégories : EP 1 (les « Ambition réussite »), EP 2 et EP 3. Les EP 2 fonctionneront à moyens constants, pendant que les EP 3 seront exclus du dispositif ZEP au bout de deux ans et perdront ainsi les moyens supplémentaires dont ils bénéficiaient jusqu’à présent. Quant aux EP 1, ils ne seront qu’un peu mieux lotis que les autres. Pour chaque « réseau » (un collège et les écoles associées), ils auront droit à 4 professeurs « référents » qui enseigneront à mi-temps et coordonneront le travail de leurs collègues, quelques « assistants pédagogiques » recrutés parmi des étudiants qui seront chargés de cours de soutien, et une infirmière scolaire à plein temps. Rien de royal.

Les « Ambition réussite » sont une arnaque qui permet de réduire considérablement le nombre de ZEP, avec comme conséquence une dégradation inévitable des conditions d’enseignement dans les quartiers populaires.

Enseignement allégé… dans classes surchargées

Les moyens supplémentaires attribués aux ZEP, pour limités qu’ils soient, ne résultent pas d’une augmentation du budget de l’Éducation nationale. Les heures d’enseignement attribuées aux professeurs « référents » sont financées par la diminution d’une demi-heure de l’horaire hebdomadaire de cours de l’ensemble des élèves de 5e et de 4e. Supprimées aussi, de nombreuses options, les heures de chorale ou d’UNSS (Union nationale du sport scolaire), heures hors temps scolaire encadrées par les professeurs d’éducation physique, qui permettent aux jeunes de pratiquer régulièrement un sport sans s’inscrire dans un club privé.

Et ce n’est qu’un début : des audits commandés par le ministère délégué au budget ont récemment jugé les horaires de cours des élèves trop lourds. Il serait par exemple question de plafonner l’horaire annuel en seconde, aujourd’hui de 1 044 heures, à 900. Ce qui permettrait de « dégager des marges de manœuvre budgétaire », en clair d’économiser plus de 17 500 postes… Horaires amputés, enseignements de moins en moins diversifiés… À force de gratter, c’est donc une éducation au rabais qui se profile. Dispensée, qui plus est, dans des classes aux effectifs de plus en plus lourds. Dans un grand nombre de lycées notamment, les classes comptant déjà entre 30 et 35 élèves passeront à un effectif supérieur, de nombreux dédoublements indispensables en langues ou en sciences, disparaîtront. Des conditions rêvées pour acquérir la « maîtrise de la langue française », priorité du gouvernement paraît-il ?

Conditions de travail dégradées

Ces économies massives entraîneront une aggravation des conditions de travail des enseignants, dont beaucoup paieront la suppression de leur heure de première chaire ou de laboratoire d’un allongement de leur temps de travail ou d’une perte de salaire annuelle de 1 500 €. Et ce, au moment où une étude vient de montrer que le pouvoir d’achat des profs a baissé de 20 % en 25 ans.

Ce n’est pas tout : désormais un prof pourra être affecté sur deux ou trois établissements de communes non limitrophes et être obligé de compléter son service dans une autre discipline que la sienne. De moins en moins nombreux, les profs devront donc être polyvalents, mobiles et travailler plus longtemps. Au détriment de la qualité de l’enseignement évidemment.

Riposter

En décembre 2006 et février 2007, deux journées de grève ont été organisées par les syndicats enseignants. Avec un certain succès : plus de 50 % de grévistes. Ce qui les a décidés à appeler à une nouvelle journée de grève le 20 mars. L’occasion de relancer la riposte ? Oui, mais à condition que cette journée ne reste pas sans lendemain et soit le début d’une large mobilisation, y compris au-delà des enseignants. Dans un contexte d’attaques tous azimuts contre les services publics, on ne pourra faire l’économie d’un mouvement d’ensemble.

14 mars 2007

Agathe MALET


Temps et plus…

18 heures pour un professeur certifié, 15 pour un agrégé… Un privilège à déboulonner, selon le gros de la classe politique. Droite comme gauche sont sur la même longueur d’onde : il faudrait augmenter le temps de travail des profs. Jusqu’à 23 heures pour Luc Ferry, ancien ministre de l’Éducation nationale partisan de Nicolas Sarkozy… voire 35 heures pour la socialiste Ségolène Royal ! Plus prudent, Gilles de Robien (lui est en poste) a entamé ce qu’il appelle un « toilettage » du décret de 1950, se contentant de rogner sur les heures de première chaire ou de laboratoire… Ce décret avait pourtant établi les horaires en prévoyant qu’un enseignant travaille une heure et demie chez lui pour une heure devant les élèves afin de préparer ses cours, d’évaluer les élèves, d’actualiser ses connaissances dans sa discipline, etc. Soit 45 heures effectives hebdomadaires. Une évaluation que confirment de récentes études, tant syndicales que ministérielles… Et effectivement, ça suffit !


[1Contrat créé en 2005, encore plus précaire que celui d’assistant d’éducation qui avait déjà remplacé le statut de surveillant : 6 à 24 mois, 20 ou 26 heures par semaine, pour 600 à 700 €.

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