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Loi Sarkozy sur la régulation de l’immigration : le modéré roule en excès de vitesse et à l’extrême-droite !

2 décembre 2003

Très bon, Sarko ! Après l’émission télévisée « Cent minutes pour convaincre » il n’a eu que des louanges. Il est vrai que face à des adversaires du style Tariq Ramadan (l’intégriste musulman qui pousse le libéralisme jusqu’à demander un moratoire - oui, un moratoire, pas l’arrêt, on a bien entendu ! - sur la lapidation des femmes) ou Le Pen (le vieux beauf d’extrême droite, milliardaire se posant en défenseur de ces concitoyens pauvres) il a eu la partie facile. Même sur le problème de l’immigration, brûlant paraît-il… en tout cas sur lequel les semblables de Sarkozy, de gauche comme de droite, ont généralement eu très peur de se brûler auprès de leurs électeurs.

Lui n’a pas peur de se mouiller. Il est vrai que c’est pour présenter un visage soigneusement maquillé (on est à la télé, n’est-ce pas !). Anti-raciste mais modérément, capable d’employer toute la rigueur de la loi mais sans excès, supprimant les excès de la double peine mais pour mieux combattre l’immigration incontrôlée. Qui dit mieux ? Même les prétendants de gauche au titre présidentiel de 2007, de Lang à Fabius en passant par Strauss-Kahn ou Hollande, tout en grinçant des dents lui ont tiré leur chapeau. Comme quoi ses concurrents lui envient… sa capacité à mentir et son aplomb à le faire. Nous voilà prévenus.

Trompe-l’œil

Pour ceux que la prestation télévisée du ministre aurait pu dérouter, la loi Sarkozy pour la régulation de l’immigration, adoptée justement dans les jours qui ont suivi, devrait remettre les choses au point.

La double peine supprimée ? Faux. La nouvelle loi devrait permettre certains retours en France dans des cas d’expulsions particulièrement scandaleux. Mais un étranger condamné en justice purgera toujours sa peine en prison, sans possibilité de remise, avant d’être expulsé. Seul un tout petit nombre d’immigrés pourraient échapper à ce sort.

Les trafiquants et les réseaux mafieux (en particulier de proxénètes, mais pas seulement) dans le collimateur, comme l’a prétendu aussi Sarkozy ? Toujours faux. La loi ne prévoit rien pour punir ceux qui profitent scandaleusement de la situation précaire et misérable faite aux sans-papiers (exploiteurs et trafiquants de main d’oeuvre, marchands de sommeil, etc...). Comme avant ce sont les immigrants qui ne visent qu’à s’intégrer et à trouver du travail, qu’on inquiétera. Un grand nombre de sans-papiers le sont devenus du fait des lois et réglementations déjà existantes comme du comportement des administrations et de la police. La loi Sarkozy continuera à en fabriquer : des personnes précédemment en situation régulière pourront la perdre, depuis les étudiants ayant eu de mauvais résultats jusqu’à ceux dont les papiers ne seront pas renouvelés simplement pour avoir oublié ou pas su faire la démarche administrative adéquate.

Simplification des procédures ? Encore faux. Pour obtenir une carte de dix ans, il faudra désormais justifier de cinq ans (au lieu de trois) de résidence régulière (ou de deux ans de vie commune en cas de mariage avec un conjoint français au lieu d’un) ; n’avoir utilisé à aucun moment de documents irréguliers même pour obtenir du travail dans l’intervalle, ce qui est pratiquement impossible quand on est cinq ans sans statut ou en statut précaire ; et en plus prouver… sa bonne intégration dans la société française (sans statut stable, sans papiers, sans travail ! ! !).

Haro sur les âmes trop sensibles

Pour faire bonne mesure la nouvelle loi s’attaque aussi à ceux qui pourraient les défendre ou les aider. Les personnes qui hébergeront des sans-papiers sont menacées si elles ne se sont pas déclarées et n’ont pas payé (15 euros), si elles n’ont pas attendu l’accord de la mairie ou ont transgressé son refus. La mairie, la préfecture ou les services de l’immigration peuvent venir visiter l’appartement et refuser leur accord. Les maires sont autorisés à établir un fichier des hébergeants afin de poursuivre ceux qui établissent des déclarations d’hébergement par simple solidarité (de toute évidence on préfère encore ceux qui voudraient faire du fric de cette manière !).

A ce nouveau « délit d’hébergement » se rajoutent désormais la punition pénale du mariage de complaisance ou de la fausse déclaration de paternité en vue de régularisation d’un sans-papier : est passible de cinq ans de prison et 15 000 euros d’amende le conjoint français accusé de mariage blanc, et la paternité pour être acceptée nécessiterait de prouver que l’on a pendant une durée d’au moins deux ans subvenu aux besoins de l’enfant sans interruption. Enfin la carte de résident de plein droit est supprimée au titre du regroupement familial.

Oui, c’est bien vrai, avec des modérés comme Sarkozy, plus besoin d’extrémistes comme Le Pen.

Robert PARIS

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